Hosni Moubarak multiplie les tentatives d’apaisement. Il a promis mardi matin une hausse de 15 % des salaires des fonctionnaires, ainsi que l’ouverture d’une commission d’enquête sur les violences du 2 février perpétuées entre partisans et détracteurs du régime. Mais les Égyptiens restent sceptiques et poursuivent leur mobilisation. Le président égyptien joue la carte de l’apaisement. Face à un rassemblement record depuis le 25 janvier - on comptait encore plusieurs dizaines de milliers de manifestants place Al-Tahrir au Caire ce mardi -, le président contesté Hosni Moubarak a ouvert la voie au dialogue ce matin en annonçant l’adoption de plusieurs mesures importantes. Des promesses gouvernementales Ainsi, la promesse d’une augmentation de 15 % du salaire des fonctionnaires et des retraites à partir du 1er avril 2011. Le pouvoir égyptien envisage la formation d’une commission d’enquête sur les violences commises le 2 février à la place Al-Tahrir lors d’affrontements entre les militants et les opposants du président Moubarak. Selon un bilan non confirmé de l’ONU, il y aurait au moins 300 morts (297 selon Human Rights Watch, HRW) et des milliers de blessés depuis le 25 janvier. Après l’ouverture dimanche du dialogue national avec les principales forces de l’opposition, dont les Frères Musulmans, le président égyptien souhaite également amender la Constitution en vue de la prochaine élection présidentielle de septembre 2011. Scrutin auquel il ne se représentera pas. Les amendements prévoient d’assouplir les conditions pour la candidature au poste de chef d’État et de limiter le nombre de mandat. Selon le vice-président Omar Souleimane, il s’agit de faire la preuve « d’une transition pacifique du pouvoir basée sur la Constitution ». À ce propos, les États-Unis, jusque-là indécis sur l’attitude à adopter, ont félicité le régime des efforts entrepris et qualifient de « progrès » l’amorce de dialogue politique. L’objectif recherché par le gouvernement semble clair : améliorer les conditions de vie de la population. D’ailleurs, le Premier ministre Ahmed Chafiq assure que « le gouvernement se préoccupe du citoyen égyptien ». Contre une détermination intacte Cependant dans la rue la contestation continue. Des dizaines de milliers de manifestants étaient présents mardi matin pour marquer la troisième semaine consécutive du mouvement réclamant le départ sans équivoque du président Moubarak. Des journalistes de l'AFP présents à la place Al-Tahrir ont même affirmé que le nombre de manifestants a dépassé celui des rassemblements précédents. Drapeaux égyptiens et banderoles sont là pour rappeler que la colère du peuple est loin d’être apaisée. Leitmotiv de la révolte anti-Moubarak, le slogan « Le peuple veut faire tomber le régime » était inscrit partout, alors que les manifestants scandaient : « Nous sommes le peuple, nous sommes le pouvoir ! » Devant cette grande manifestation, on peut douter de l’efficacité des annonces gouvernementales. Grâce au nouvel outil de mobilisation que constituent les réseaux sociaux, les jeunes protestataires ont pu relayer les appels à manifester. « Nous avons entendu dire qu'un million de personnes allaient manifester aujourd'hui », affirme Mahmoud el-Naggar, 26 ans, arrivé de Fayyoum (sud du Caire) avec un groupe d'amis. Dans d'autres villes égyptiennes, près de 20 000 personnes ont également manifesté contre le régime, notamment 5 000 à Alexandrie (nord) et 5 000 Minya, mais également à Sohag et Assiout (sud du Caire). On note que les contestataires restent sceptiques devant l’appel au « dialogue national ». Mohammad Nizar, 36 ans, s’insurge contre les promesses du gouvernement et parle d’un « pot-de-vin politique pour réduire le peuple au silence ». Il regrette qu'aucune de ses demandes n’a été entendue. Pour lui comme pour les milliers d’occupants de la place Al-Tahrir, la revendication reste la même : Moubarak doit quitter le pouvoir immédiatement.