Le braconnage s’est professionnalisé en Tanzanie et le recensement de la population d’éléphants s’en ressent.
Du ciel, plus que les piles d'os éparpillés, c'est l'absence d'éléphants au sein
de la réserve de gibier de Sélous, en Tanzanie, qui choque. «L'équipe qui
faisait les comptes des animaux présents dans la réserve en 2013 et 2014 savait
que le braconnage était un problème, mais rien ne pouvait la préparer à ce
qu'elle allait découvrir», racontait ce dimanche 19 juillet The Telegraph, qui
est parti à leur rencontre.
En l'espace de quatre ans, la Tanzanie a perdu les deux tiers de sa population
d'éléphants.
En octobre 2013, les comptes étaient catastrophiques. Dans la réserve de Sélous
et ses alentours, le nombre d'éléphants était passé de 109.000, en 1976, à
13.084. «On a recalculé environ mille fois parce qu'on n'arrivait pas à croire
ce que l'on voyait», explique au quotidien britannique Howard Frederick,
conseiller technique sur l'étude sur le recensement des éléphants.
La raison principale de cette chute est évidente: le braconnage. Howard
Frederick raconte au Telegraph la professionnalisation de ce phénomène:
«Il y a les équipes de tête qui avancent en éclaireurs et explorent la zone. Les
équipes qui s'occupent de tuer les éléphants arrivent ensuite, les prennent en
embuscade et tuent des groupes entiers. Et ils passent à la zone suivante,
pendant que la troisième équipe, celle des bouchers arrive, coupe les défenses
et que l'équipe de transport arrive. On est passé du braconnage ponctuel à des
individus ultra-organisés.»
Crime organisé
Après l'annonce du gouvernement de Tanzanie, en juin dernier, que la population
d'éléphants avait baissé de plus de 60% ces dernières années, le ministère des
Ressources naturelles et du Tourisme estimait qu'il était également possible que
des éléphants aient migré dans les pays voisins.
Dans le Guardian, en juin dernier, le directeur de programme des espèces de WWF
monde affirmait que la disparition des éléphants au Ruaha Rungwa, toujours en
Tanzanie, –où leur nombre a chuté de 34.000 en 2009 à 8.000 en 2014– ne pouvait
s'expliquer que par l'implication du crime organisé:
«Le massacre de milliers d'éléphants au Ruaha Rungwa montre clairement
l'implication de crime international organisé, qui est aggravé par la corruption
et la faible capacité d'application de l'autorité en Tanzanie –et le besoin
urgent d'augmenter les efforts pour lutter contre cette épidémie de braconnage
avant que les troupeaux d'éléphants vivant dans cette zone ne soient tués.»
Quartz rappelait cependant que la Tanzanie a fait des efforts pour mettre fin à
ce trafic, notamment en arrêtant plusieurs vendeurs d’ivoire et braconniers.
Et Mary Rice, directrice exécutive ce l'agence d'investigation
environnementale,interrogée par National Geographic, est pleine d’espoir:
«C'est un peu comme avec la Fifa... C'est l'une de ces situations où tout le
monde sait qu'il y a de la corruption et qui sont les personnes corrompues. Mais
on n'a pas réussi à les attraper. Et c'est très semblable au trafic d'ivoire. On
sait qu'il y a des gens très investis là-dedans, des gens puissants impliqués
dans des activités criminelles autour de ce trafic. Et on sait que ces gens
savent qui ils sont. Alors [le scandale de la Fifa] m'emplit de l'espoir qu'un
jour la bonne chose va arriver.»