Afrique


Coup d'Etat au Mali, mort de Merah : quelles conséquences sur les otages français ?



Atmane Tazaghart

INTERVIEW - La prise de pouvoir par les militaires au Mali et la mort de Mohamed Merah, qui a accompli des actes symboliques pour la mouvance islamiste, peut-elle jouer sur le sort des otages français détenus au Sahel ? Les réponses de TF1 News avec Atmane Tazaghart, spécialiste d'Aqmi. Jeudi matin, l'armée a pris le pouvoir au Mali en déposant le président Amadou Toumani Touré. Elle reprochait au chef de l'Etat un manque de moyens pour combattre la rébellion touareg au Nord ainsi qu'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Les élections, prévues en avril, sont annulées. La junte promet cependant de remettre le pouvoir aux autorités civiles le plus tôt possible. L'ensemble de la communauté internationale condamne ce coup d'Etat. La France, alliée d'Amadou Toumani Touré, suspend notamment sa coopération avec le Mali, sauf en matière d'aide à la population et de lutte contre le terrorisme. Six Français sont en effet retenus en otage dans le Nord du pays par Aqmi (voir notre infographie : "Les Français otages dans le monde"). TF1 News : Quelles sont les conséquences possibles du coup d'Etat au Mali sur les otages français détenus par Aqmi si la junte se maintient au pouvoir ? Atmane Tazaghart, spécialiste d'Aqmi* : Sur les négociations en elles-mêmes, les conséquences devraient être minimes. Certes, les émissaires du pouvoir qui vient d'être renversé sont généralement proches d'Amadou Toumani Touré. Mais ils n'agissent cependant pas au nom du gouvernement. Ils sont surtout à la recherche d'argent et de notoriété plutôt que de postes dans l'appareil d'Etat. Même si la junte se maintient au pouvoir, cela n'empêchera donc pas la plupart d'entre eux de continuer leurs médiations. En revanche, la nouvelle politique qui devrait être menée parmi les militaires aura probablement des répercussions indirectes sur les otages. TF1 News : C'est-à-dire ? A.T. : Les militaires réclamaient plus de moyens pour combattre à la fois Aqmi et les touaregs au Nord depuis que ceux-ci ont repris les hostilités grâce aux armes récupérées en Libye. A priori, ils devraient donc lancer plus d'opérations dans le Nord du pays, vaste espace où agissent autant Aqmi et les touaregs, pour tenter de rétablir l'autorité de l'Etat malien. Pour l'instant, les otages se trouvent probablement quelque part dans cette région du Nord du Mali. Les groupes liés à Aqmi au Sahel étant très mouvants, cela pourrait donc conduire l'organisation à déplacer les otages -dont on sait qu'ils sont séparés- au Niger voisin, voire en Libye. Selon une information des services maliens, validée par les autres services de renseignements étrangers, Mokhtar Ben Mokhtar, l'un des émirs d'Aqmi, s'est en effet rendu en Libye. Certainement pour nouer des liens avec les groupes islamistes libyens en train de se structurer afin de s'assurer, au cas où, une zone de repli. TF1 News : Se pose aussi la question de la réaction des pays concernés par la lutte anti-terroriste dans la région. A.T. : Tout à fait. On ne sait pas comment la France, dont les services coopèrent avec ceux du Mali mais aussi de la Mauritanie et du Niger, va réagir sur le moyen terme. Les mutins ont d'ailleurs probablement profité de la tuerie de Toulouse, qui monopolise tout le pouvoir en France, pour agir. L'attitude algérienne, également concernée par le problème touareg et bien sûr par Aqmi, sera aussi importante. TF1 News : La mort de Mohamed Merah, qui se revendique d'Al-Qaïda, peut-elle également avoir des conséquences sur les otages ? A.T. : Tout d'abord, Mohamed Merah n'avait rien du jihadiste traditionnel. Il s'agissait surtout d'un psychopathe qui a sombré dans une paranoïa lui permettant de lui faire croire qu'il était un jihadiste. Mais un danger existe cependant : comme il se revendiquait jihadiste et qu'il a accompli des actes symboliques aux yeux de la mouvance (s'attaquer à la France en raison de sa présence en Afghanistan et aux juifs), une réaction est tout à fait possible. Avec la campagne électorale et l'agitation médiatique qui l'entoure, ce serait d'ailleurs le bon moment pour agir. TF1 News : De quelle manière ? A.T. : Trois solutions peuvent s'offrir à Aqmi si le mouvement veut réagir. Tout d'abord, une réaction symbolique : rendre hommage à Mohamed Merah et revendiquer son appartenance à l'organisation, ou du moins à Al-Qaïda. Ensuite, tenter une action d'envergure en France pour marquer la campagne. La volonté ne manque certainement pas. Mais étant donné le niveau de sécurité dans le pays, cela semble difficile. Dernière possibilité : le coup d'éclat, en utilisant et mettant en scène les otages, voire en procédant à une exécution. Ecrivain et journaliste, Atmane Tazaghart est spécialiste algérien de l'islamisme. Il est notamment l'auteur de Aqmi, enquête sur les héritiers de Ben Laden au Maghreb et en Europe (Editions Jean Picollec, 2011). Par Fabrice Aubert , le 22 mars 2012
Source:  http://lci.tf1.fr

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