Longtemps accusé d'utiliser des enfants dans son armée, le Tchad, avec l'appui du Système des Nations Unies et des ONG, travaille activement pour atteindre l'objectif ambitieux de "zéro enfant associé aux forces et groupes armés".
"D'importantes étapes ont été franchies par le pays, à savoir entre autres, la nomination par décret présidentiel d'un point focal sur les questions d'enfants associés aux forces et groupes armés au sein du ministère de la Défense, la signature et la dissémination d'une directive présidentielle portant sur le respect des conditions de l'âge au recrutement au sein de l'Armée nationale tchadienne, et surtout les missions de formation, de sensibilisation et de vérification dans les zones de défense et de sécurité du Tchad", déclare le général de brigade Tamlengar Kimtolde Mathias, chef d'Etat-major particulier du ministère délégué à la présidence de la République chargé de la Défense et des Anciens combattants.
Du 15 août au 12 octobre 2013, le gouvernement tchadien, avec l'appui du Système des Nations-Unies, a organisé une mission de dissémination des notions de droits et de la protection de l'enfant dans les huit zones de défense et de sécurité de l'armée tchadienne. Cette mission a permis de visiter, former, sensibiliser et vérifier pendant les revus de troupes près de 4.000 hommes de rang.
"Le Tchad est passé par des moments difficiles en ce qui concerne la mise en œuvre de la feuille de route sur les enfants associés aux forces et groupes armés. Mais il convient de reconnaître que la situation s'est nettement améliorée depuis la signature de la nouvelle feuille de route", affirme, quant à lui, Thomas Gurtner, coordonnateur résident du Système des Nations-Unies au Tchad.
"Aujourd'hui, les vérifications indépendantes que nous avons pu effectuer dans les huit zones de défense militaire à travers le pays nous ont permis de constater sur place l'absence des enfants dans les rangs de l'Armée nationale tchadienne", ajoute-t-il.
Le point focal sur les questions d'enfants associés aux forces et groupes armés au sein du ministère tchadien de la Défense, colonel Abdel Wahab, est également très formel. "Il n'y a pas d'enfants soldats au sein de nos troupes. S'il y en avait eu, c'est par la faute des groupes armés qui se sont rebellés contre le pays puis sont revenus à la légalité, avec hommes et bagages", insiste-t-il.
Des dispositifs de protection de l'enfant ont par ailleurs été mis en place dans ces huit (8) zones de défense et de sécurité. Dans chaque zone, une cellule locale de protection a été installée pour vérifier et relayer l'information auprès des autorités en charge de la protection de l'enfant.
"Le but est de contribuer à renforcer l'appui et le suivi pour le renforcement de la surveillance interne du respect des droits de 'enfant au niveau de l'armée tchadienne," explique Bruno Maes, représentant de l'UNICEF au Tchad.
Pour le gouvernement tchadien et ses partenaires, le grand défi est de maintenir cet élan et le statut de zéro enfant associé aux conflits armés. "Nous allons largement diffuser et appliquer la directive présidentielle; produire des guides pour la vérification de l'âge à l'attention des agents recruteurs militaires; former sensibiliser et vérifier les militaires devant se rendre sur les théâtres d'opération militaire hors du Tchad; renforcer les cellules de protection au niveau des zones militaires; et adresser des problématiques d'ordre plus structurel, telles que l'adoption et la mise en œuvre d'une stratégie nationale d'enregistrement des naissances, l'adoption du projet de loi portant Code de protection de l'enfant ou encore la révision du Code pénal", promet le colonel Abdel Wahab.
Entre 2006 et 2010, le Tchad a été secoué par les combats entre les forces gouvernementales et les groupes tchadiens d'opposants armés; les violences intercommunautaires et ethniques dans l'Est; les conflits du Darfour et les tensions entre le Tchad et le Soudan le long de leur frontière commune.
De violations graves des droits de l'enfant ont été rapportées à cette période, y compris le recrutement et l'utilisation des enfants par les groupes armés et au sein de l'Armée nationale tchadienne.
En 2007, l'Armée nationale tchadienne a été inscrite sur la liste annexe 2 du rapport du Secrétaire général des Nations Unies sur les enfants et les conflits armés, comme partie au conflit qui recrute et/ou utilise des enfants, mais dont le Conseil de sécurité n'a pas encore été saisi.
En 2010, elle a été à nouveau inscrite sur la liste annexe 1 du rapport annuel du Secrétaire générale des Nations Unies. Ce rapport recommande l'élaboration et la mise en œuvre d'un plan d'action pour mettre fin au recrutement et à l'utilisation des enfants.
En octobre 2010, à New York, le ministre de l'Action sociale du Tchad a exprimé, à Mme Leila Zerrougi, représentante spéciale du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés, l'intention du gouvernement tchadien de préparer et mettre en œuvre ce plan d'actions.
A l'issue d'un long processus de négociation avec l'équipe pays des Nations Unies pour la Surveillance des violations des droits de l'enfant en temps de conflits, le plan d'actions est signé le 14 juin 2011 à N'Djaména (capitale du Tchad) en présence de la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies.
Cependant, la lenteur dans la mise en œuvre de ce plan d'actions, ainsi que la découverte d'enfants parmi les nouvelles unités de l'Armée nationale tchadienne recrutés en 2012, n'ont pas permis au Tchad d'être éligible au retrait de la liste dans les rapports du Secrétaire général en 2012 et en 2013.
En vue d'accélérer la mise en œuvre de ce plan d'actions, un atelier de revue a été organisé en mai 2013 par le gouvernement et l'équipe spéciale des Nations Unies; il permet d'élaborer une nouvelle feuille de route contenant dix actions prioritaires et un chronogramme précis, afin de rendre le Tchad éligible au retrait lors du prochain rapport 2014 du Secrétaire général des Nations Unies.
Depuis 2007, un total de 1.030 enfants dont 5% de l'Armée nationale tchadienne ont été retirés des forces et groupes armés et réinsérés dans leurs communautés, dans le cadre d'un partenariat entre le gouvernement tchadien, les agences onusiennes et les ONG.
"Quand nous découvrons un mineur dans nos rangs, nous le confions immédiatement à l'Unicef qui s'occupe de son réinsertion familiale et sociale", indique le colonel Abdel Wahab.
Pour le général de brigade Tamlengar Kimtolde Mathias, il est temps que le Tchad sorte de la "liste de honte" des pays qui utilisent les enfants dans les conflits armés. "C'est un grand préjudice que notre pays a subi, et nous n'attendons pas rester là . Tous les Tchadiens doivent comprendre qu'il n'est pas bon d'envoyer nos enfants mineurs à la guerre. Attendons qu'ils aient 18 ans au moins", conclut-il. Xinhua 20131127
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