20110320 Xinhua DAKAR, 19 mars (Xinhua) -- L'alternance politique intervenue dans un engouement populaire, le 19 mars 2000, au Sénégal avec l'accession au pouvoir de l'opposant Abdoulaye Wade, affiche onze ans après un bilan mitigé, selon les spécialistes et le Sénégalais moyen.
Le changement de régime après 40 ans de pouvoir du Parti socialiste avait suscité beaucoup d'espoir chez les Sénégalais qui venaient de vivre 20 ans de politique d'ajustement structurel avec des mesures drastiques d'économie au détriment de la demande sociale des populations, notamment des jeunes.
Et en portant Abdoulaye Wade à la magistrature suprême, ils espéraient le "sopi" (changement en langue locale Wolof) promis par l'opposant Wade.
Mais, onze ans après, certains Sénégalais estiment que le changement espéré n'est pas encore au rendez-vous.
"On a l'impression qu'il n'y a pas eu d'alternance. Tout est devenu cher et même plus cher qu'avant 2000. Par exemple le kilo du sucre en poudre était de 320 en 2000 aujourd'hui, il est à 700 francs CFA. Le kilo de riz était de 140 francs contre 280 francs aujourd'hui 280", constate Fatoumata Sy, une mère de famille.
Arouna Seck enseignant, souligne pour sa part "que beaucoup de choses ont été faites. Des routes, des ponts et des écoles ont été construites". Même s'il reconnait au passage la cherté des denrées de première nécessité.
La cherté du coût de la vie constitue d'ailleurs le principal grief contre le régime du président Wade. Elle a été d'ailleurs à l'origine de plusieurs marches de protestation des partis politiques et des associations de consommateurs.
"Après onze ans d'alternance, la demande sociale est loin d' être satisfaite", se plaint le président de l'Union des Consommateurs du Sénégal, Jean Pierre Dieng.
Analysant les onze ans de l'alternance sur le plan social, le sociologue Djibril Diakhaté, parle de bilan mitigé.
"Au début de l'alternance, Wade avait insisté sur le travail, la création de richesse, la lutte contre la pauvreté, la lutte contre l'exclusion sociale", rappelle M. Diakhaté.
Selon lui les efforts ont été faits dans les domaines comme l' éducation avec la construction des écoles et l'augmentation du salaire des enseignants. Mais, constate le sociologue ces dernières années sont caractérisées par des "dérapages".
Il s'y ajoute, selon le sociologue, une conjoncture économique détériorée qui explique l'immigration clandestine des jeunes avec son lot de morts.
Même constat chez l'économiste Moubarack Lô qui a aussi souligné la réalisation de grands projets d'infrastructures : la construction de routes, l'aéroport international Blaise Diagne, l' autoroute à péage etc.
Seulement, le spécialiste déplore le manque de cohérence de la politique économique de Wade qu'il explique par l'absence de planification de l'économie qui entraîne des dérapages dans la gestion des finances publiques.
Le paysage politique s'est recomposé en onze ans: les anciens alliés de Wade se retrouvent avec d'autres partis politiques dans l'opposition, au sein de la Coalition Bennoo Siggil Senegaal.
En face, le Parti démocratique sénégalais a créé avec de nouveaux alliés, dont beaucoup de ses anciens adversaires socialistes, une nouvelle coalition avec en ligne de mire l' élection présidentielle de 2012 et la reconduite du président Wade pour un troisième mandat. Même si cette candidature suscite pour le moment de vives polémiques.
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