Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, est arrivé samedi à Bangui pour une visite de quelques heures destinée à afficher la détermination des Nations unies à déployer une force de maintien de la paix en Centrafrique, toujours livrée à des violences meurtrières.
En route pour Kigali, où il doit participer aux cérémonies marquant le 20e anniversaire du génocide rwandais, M. Ban a été accueilli à sa descente d'avion par la présidente centrafricaine de transition, Catherine Samba Panza, a constaté un journaliste de l'AFP. Il devait s'entretenir avec elle des moyens de mettre fin au cycle infernal de violences intercommunautaires et interreligieuses qui ensanglante le pays depuis un an et a amené des responsables onusiens à évoquer le spectre d'un nouveau génocide en Afrique.
Le secrétaire général - "terrorisé à l'idée d'un nouveau Rwanda", selon un diplomate à l'ONU - doit également prononcer un discours devant le Conseil national de transition (CNT, parlement provisoire) pour renouveler ses appels à une mobilisation internationale sur le drame centrafricain. Appuyé par la France - qui a déployé une force de 2.000 hommes dans son ancienne colonie pour aider la force africaine (Misca) à pacifier le pays - le secrétaire général plaide pour le déploiement avant fin 2014 d'une opération de l'ONU en Centrafrique, forte de 12.000 hommes.
Cette opération devrait prendre le relais des Français de Sangaris, de la Misca - dont le Tchad a annoncé jeudi son retrait, sur fond de polémique avec l'ONU notamment - et de la force européenne attendue prochainement à Bangui. Mercredi encore, au sommet Union européenne-Afrique, Ban Ki-moon a exhorté la communauté internationale à "fournir les troupes supplémentaires nécessaires et des fonds".
Reconstruire un Etat
Début mars, le secrétaire général a exposé au Conseil de sécurité son projet d'opération qui comprend un ambitieux volet civil destiné à rétablir un minimum d'Etat et d'administration dans un pays livré au chaos. Mais certains pays restent réticents à une telle opération, notamment pour des raisons financières.
L'ONU espère notamment que des pays européens vont contribuer, ne serait-ce qu'en formant des soldats africains, et que même après le déploiement des Casques bleus, les Français laisseront sur place quelques centaines d'hommes en appui, comme au Mali. Le rapport recommande un effectif policier "nettement renforcé" pour tenir compte de la spécificité de l'opération: rétablir l'ordre, plutôt que pourchasser des extrémistes comme au Mali, ou s'attaquer à une rébellion armée comme en République démocratique du Congo.
En outre, pour rétablir le fonctionnement de l'Etat et aider à l'organisation d'élections générales en principe au plus tard en février 2015, il faut également une composante civile, dont le coût n'a pas été chiffré jusque présent. Au final, cette opération ambitieuse fait craindre à certains une facture colossale, alors que les agences de l'ONU ne parviennent déjà pas à lever les fonds nécessaires pour venir en aide à la population.
La situation s'est dégradée
La Centrafrique traverse une crise humanitaire sans précédent, avec des centaines de milliers de déplacés fuyant les violences. Ces violences ont contraint à l'exode des dizaines de milliers de musulmans, de régions entières du pays, pourchassés par les miliciens majoritairement chrétiens anti-balaka, amenant Amnesty International à dénoncer un "nettoyage ethnique".
Formées en réaction aux exactions contre la population perpétrées pendant des mois par les combattants essentiellement musulmans de la Séléka après leur prise du pouvoir en mars 2013, les milices anti-balaka, groupes formés à l'origine de paysans chrétiens de l'ouest de la Centrafrique, s'en prennent depuis à la population musulmane. Le président français François Hollande a jugé mardi que la situation sécuritaire en Centrafrique s'était "dégradée" et que les musulmans y étaient "directement visés", à l'issue d'un entretien à Paris avec Mme Samba Panza. 06042014 Jeuneafrique
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