Des lampadaires solaires mobiles, fabriqués avec une roue de vélo et des objets recyclés, transforment la vie d'artisans au Mali en leur permettant de travailler la nuit pour échapper à une chaleur de 40 à 45 degrés le jour.
Ce moyen d'éclairage original, doté d'une lampe au bout d'un long tuyau métallique, munie d'une roue de vélo qui en facilite la mobilité, fait le bonheur de la communauté rurale de Cinzana, forte de quelque 35. 000 habitants, dans la région de Ségou (centre du Mali).
C'est un architecte et vidéaste italien, Matteo Ferroni, qui a eu l'idée de ces lampadaires à l'occasion d'un séjour en 2010 dans des communautés rurales dépourvues d'électricité.
M. Ferroni explique s'être rendu compte que les habitants étaient peu actifs dans la journée en raison de la chaleur écrasante et travaillaient plus la nuit en s'éclairant de lampes de poche ou en profitant du clair de lune. "J'ai réalisé combien la nuit était importante pour ces communautés. "
Il a dessiné un prototype pouvant être "reproduit facilement" par des artisans locaux et réalisé à partir d'objets fournis par les villageois, explique-t-il sur le site dédié à son invention.
En 2011, Matteo Ferroni est revenu au Mali avec le prototype et "ensemble, à Ségou ici, on a conçu la première lampe portable", raconte Alassane Keïta, qui dirige l'association Faso Gniètaa qui est le relais local de la fondation suisse eLand finançant le projet.
C'est un travail d'équipe qui implique plusieurs artisans locaux: soudeur, Amadou Sidibé, confectionne le corps de la lampe à partir de vélos usés. Spécialisé dans la production de théières, Aboubacar Dagnon, fabrique les boîtiers abritant les ampoules LED en recyclant des ustensiles de cuisine en aluminium. Cet artisan est le seul à Ségou à réaliser ce travail de précision.
Cet ingénieux lampadaire mobile et écologique est utilisé par 15 des 72 villages de la communauté rurale, qui l'appellent "Foroba yelen" ("la lumière collective" en bambara, une des langues du Mali), a-t-on expliqué à l'AFP.
Chacun y a droit et le réserve pour ses besoins: Alou Coulibaly est allé réserver un des lampadaires pour la cérémonie de baptême de son nouveau-né, une fille.
Il ne tarit pas d'éloges sur cette initiative, qui a amélioré le quotidien des villageois, pauvres, qui n'avaient pas les moyens d'acheter un groupe électrogène collectif, qui nécessite un budget en carburant.
Déficit de production d'électricité
Aujourd'hui, Foroba yelen, géré par la collectivité, "est entré dans le travail, la vie sociale et rituelle" de la communauté. "A l'heure actuelle, plus de 90 lampes sont réparties sur 15 villages et 3 centres de santé", selon le site du projet.
A Dona, autre village proche de Cinzana, c'est chez Issouf Dagnon qu'on vient recharger la batterie de la lampe ou réserver sa lampe au prix de 250 FCFA (0,40 euro) par nuit, somme qui permet d'en financer l'entretien.
Chaque village bénéficiaire dispose d'un kit de quatre lampes et d'un panneau solaire de 50 watts d'un coût total de 500 euros financés par eLand.
On utilise le Foroba yelen pour les besoins du petit commerce, de funérailles, d'accouchements au dispensaire de la commune. . . Certains particuliers le louent occasionnellement, comme Alou Coulibaly. Mais d'autres y recourent régulièrement, comme Djènèba Djoni, une potière.
Avant, "nous fabriquions les canaris (récipients en terre cuite) à la lumière de la lune et avec la torche attachée sur la tête, comme font les chasseurs", mais aujourd'hui, avec la lampe solaire mobile, il n'y a plus ces tracas, explique Mme Djoni.
Autant de choses qui font de ces lampadaires solaires mobiles une sérieuse alternative à l'éclairage public au Mali, pays de plus de 16 millions d'habitants régulièrement en proie ces dernières années à des coupures intempestives de courant.
Le 14 mai, le gouvernement malien a fait état d'un déficit de production d'électricité ayant "atteint le niveau exceptionnel de 111 mégawatts en 2013 (45% de la demande)".
La société d'énergie EDM-SA, détenue à 66% par le Mali et à 34% par une filiale du groupe Aga Khan, est dans une situation "critique" et ne parvient pas à assurer un approvisionnement normal en dépit de subventions de l'Etat (57,5 milliards de FCFA en 2013, soit près de 87,7 millions d'euros), selon Bamako. 26052014 Jeuneafrique
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