Militaires et civils ont sélectionné leurs candidats pour le poste de président intérimaire du Burkina Faso samedi, jour où l'armée a annoncé le rétablissement de la Constitution, une étape déterminante pour permettre le retour au pouvoir des civils.
Un nom semble susciter l'adhésion générale : l'archevêque de Bobo-Dioulasso (sud), Mgr Paul Ouédraogo, que l'armée, l'opposition et la société civile ont placé dans leur "shortlist" malgré les réticences de la hiérarchie catholique.
Le président de la Commission épiscopale Burkina-Niger a pourtant déclaré publiquement qu'il n'était pas candidat. "Je ne l'envisage pas. Ce genre de pouvoir, le clerc ne s'y engage pas", avait-il tranché en début de semaine au micro de Radio France internationale.
Mais l'opposition et la société civile justifient leur choix par la possibilité d'une dérogation venant du Vatican, qu'elles espèrent obtenir en faisant pression, par leur consensus, sur les autorités catholiques.
Si une telle éventualité se produisait, le Burkina Faso, où un religieux succèderait en tant que chef d'Etat intérimaire au lt-colonel Isaac Zida, au pouvoir depuis la chute du président Blaise Compaoré le 31 octobre, se retrouverait dans une position rarissime.
Des journalistes présidents ?
Opposition et société civile proposent également deux journalistes pour le poste de chef de la transition, qui dirigera le pays pour une durée d'un an, de sa nomination jusqu'aux élections fin 2015.
Cherif Sy et Newton Ahmed Barry, patrons respectifs de "Bendré" et "L'événement", des hebdomadaires très critiques à l'égard de l'ancien régime, ont donné leur accord pour une éventuelle prise de poste, ont déclaré à l'AFP plusieurs sources proches du dossier.
L'armée, outre Mgr Ouédraogo, défend la candidature de Joséphine Ouédraogo, sociologue et ministre de l'Essor familial et de la Solidarité sous Thomas Sankara de 1984 à 1987.
Mme Ouédraogo, qui a quitté le Burkina à la chute du président Sankara, a occupé ensuite des postes de direction au sein de la Commission économique africaine, un organe onusien, puis de l'ONG Enda tiers monde à Dakar. Seules les autorités religieuses et traditionnelles ne se sont pas encore prononcées.
RĂ©tablissement de la Constitution
Les différentes parties ont jusqu'à dimanche midi pour communiquer leur liste de prétendants à un collège de désignation, a annoncé dimanche le lieutenant-colonel Isaac Zida, actuel homme fort du pays depuis la chute de Blaise Compaoré le 31 octobre.
Cette instance de 23 membres, dans laquelle les civils sont majoritaires, désignera ensuite le nouveau dirigeant parmi les personnalités proposées, ont expliqué des sources proches du dossier à l'AFP.
La nomination devrait intervenir officiellement en début de semaine prochaine, une fois la charte de la transition, sorte de Constitution intérimaire, validée par le Conseil constitutionnel burkinabè.
Cette dernière étape institutionnelle est permise par le rétablissement de la Constitution, annoncé samedi par le lt-colonel Zida pour "permettre d'engager le processus de mise en place d'une transition civile" et "d'envisager le retour à une vie constitutionnelle normale".
L'actuel homme fort du pays avait déclaré cette suspension le 31 octobre, jour de la chute du président Compaoré, déchu après 27 années de règne, et qui voulait se présenter de nouveau en modifiant la Constitution.
Une telle décision était alors obligatoire du point de vue des militaires car la "vacance" du pouvoir prononcée par l'ancien chef de l'Etat lors de sa démission devait aboutir constitutionnellement à son remplacement par le président de l'Assemblée nationale, ce que refusait l'armée.
Signature de la "charte de la transition"
La charte de la transition, sur laquelle civils et armée se sont mis d'accord jeudi soir, doit être signée officiellement dimanche après-midi.
La cérémonie, prévue samedi, a été repoussée au lendemain pour des raisons "techniques", a expliqué une source militaire, liées notamment au fait que la Maison du peuple, où elle doit avoir lieu, "est en train d'être réparée".
Le timing initial, annoncé par le lt-colonel Zida, était également trop court pour que des responsables provinciaux conviés à la signature ne parviennent à temps dans la capitale.
Un accord a été trouvé jeudi soir sur ce document, qui définit les contours institutionnels de la transition, une période qui doit durer un an et qui sera ponctuée par des élections en novembre 2015.
L'Union africaine a lancé un ultimatum le 3 novembre au Burkina Faso, qui devait valider d'ici à quinze jours ses institutions de transition et se choisir un président intérimaire. Ce délai expire lundi. 16082014 Jeuneafrique
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