Bénin : un test de popularité pour le président Boni Yayi
le 27/04/2015 13:11:05
BĂ©nin

Les Béninois se rendent aux urnes dimanche pour des législatives vécues comme un "galop d'essai" en vue de la présidentielle de 2016, pour le camp du président Thomas Boni Yayi comme pour celui de l'opposition, éclatée et peu structurée.

Au total, 4,4 millions d?électeurs sont inscrits et 83 sièges de députés sont à pourvoir, lors d'un scrutin initialement prévu en mars et dont la société civile craint qu'il puisse être marqué par des fraudes, notamment à cause de cafouillages dans la distribution des cartes d'électeurs.

Dans ce petit pays ouest-africain de 10 millions d'habitants, la campagne électorale a été monopolisée par un débat qui déchire la classe politique béninoise depuis des mois, sur une possible modification de la Constitution.

Quelques mois après la tentative de révision de la Constitution du président burkinabé Blaise Compaoré, qui avait finalement causé sa chute, après 27 ans au pouvoir, l'opposition béninoise accuse le président Boni Yayi de vouloir modifier la loi fondamentale pour briguer un troisième mandat.

Les bureaux de votes étaient censés ouvrir à 7H00 (06h00 GMT) et fermer neuf heures plus tard. Mais dans plusieurs quartiers de Cotonou, la capitale économique, les bureaux de vote étaient toujours fermés en début de matinée, a constaté un journaliste de l'AFP, à cause de retards dans la mise en place du matériel électoral.

De nombreux Béninois se sont plaint cette semaine de ne pas avoir pu récupérer leur carte d'électeur biométrique dans les centres de distribution et des organisations de la société civile ont dénoncé le retrait de plusieurs cartes par certains.

-"Un carton rouge pour les députés" -

Dans le quartier CG l'Océan, où les opérations de vote ont pu démarrer peu avant 07h30, Valentine Amouzou, une sage-femme à la retraite âgée de 66 ans et mère de six enfants, a expliqué s'être déplacée malgré son état de santé, pour "donner un carton rouge à ces anciens députés" et "voter pour un nouveau candidat".

Guy Kodjo, un électricien de 45 ans au chômage depuis cinq ans, affirme voter pour un candidat qui a promis d'encadrer les prix des logements, parce que "le logement coûte trop cher à Cotonou et les propriétaires exagèrent".

Mais selon l'analyste politique Rock Sosthène Nepo, "le débat de fond sur les projets de société est inexistant ou du moins réduit" lors de ces législatives. "Du coup on assiste à une campagne aux allures d'un référendum centré sur la révision ou non de la Constitution".

M. Boni Yayi, qui aime à se présenter comme un "Monsieur Propre" de la corruption, a toujours nié avoir l'intention de se présenter en 2016 et soutient vouloir amender la Constitution pour y inscrire notamment l'imprescriptibilité des crimes économiques.

L'opposition, qui accuse le chef de l?État de vouloir en profiter pour supprimer la limitation des mandats présidentiels pour briguer un troisième mandat, refuse qu'il touche à la loi fondamentale.

"L'enjeu, pour le pouvoir, c'est d'avoir une très large majorité à l'Assemblée nationale, ce qui permettrait au président d'envisager des réformes constitutionnelles et sans doute d'autoriser un troisième mandat", ajoute Gilles Yabi, analyste politique spécialiste de l'Afrique de l'Ouest basé à Dakar.

Le parti présidentiel, Forces Cauris pour un Bénin Émergent (FCBE), détenait la majorité à l'Assemblée nationale jusqu'à récemment. Mais plusieurs députés ont claqué la porte du parti pour rejoindre des formations d'opposition à quelques semaines du scrutin.

Il n'est pas exclu cependant que ceux-ci ou d'autres se rapprochent à nouveau du FCBE, dans un pays où les hommes politiques passent régulièrement d'un parti à l'autre au gré des opportunités du moment, selon les observateurs.

"La scène politique est éclatée et très peu structurée (. . . ) et dominée par les personnalités" au Bénin, explique Gilles Yabi. On assiste donc à des "transhumances politiques" à la veille des élections, "certains candidats, qui s'estiment mal placés sur les listes, n'hésitant pas à changer de camp à la dernière minute".

En tout, une vingtaine de partis présentent des listes lors de ces législatives, dont de nombreux partis et alliances d'opposition.

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