Burundi : 24 heures pour une médiation
le 15/07/2015 11:34:57
Burundi

Image redimensionnéeA une semaine de la présidentielle controversée au Burundi, le président ougandais a entamé ce mardi une visite à Bujumbura pour tenter de démêler la crise. Yoweri Museveni, nouveau chef de la médiation est-africaine désigné lors du dernier sommet de Dar es Salaam, est arrivé avec sept heures de retard. Il a rencontré le président Pierre Nkurunziza, puis il a tenu un discours.

Le président Museveni est connu pour ses digressions, pas toujours facile à suivre avec des discours parfois ambigus, où l’on ne sait pas si ses remarques sont ironiques ou pas. Le chef de l’Etat ougandais a d’abord insisté sur les idées fausses et la première, le sectarisme. Il est revenu sur l’histoire du Burundi. « Ce que vous appelez histoire, c’est ce que j’appelle les affaires courantes car j’étais là, a-t-il souligné, provoquant un éclat de rire dans la salle. Le Burundi avait bien commencé. Vous aviez de bons dirigeants », a-t-il remarqué, faisant référence au prince Louis Rwasagore, le Premier ministre assassiné juste avant l’indépendance.

Le sectarisme, cette fausse idée, c’est ce qui a fait que l’Uprona, parti qui a dirigé le pays pendant 30 ans, n’a plus de dirigeants aujourd’hui, a pointé Yoweri Museveni, alors que le premier vice-président Prosper Bazombanza était assis juste à côté de lui. L’Uproniste Prosper Bazombanza, considéré comme proche du gouvernement, avait dans son discours expliqué que l’opposition avait toujours cherché à obtenir un gouvernement de transition, d’où la crise que traverse le pays.

Deuxième mauvaise idée, selon le président Museveni : l’idée que contrôler l’Etat est la chose la plus importante. Le chef de l’Etat ougandais a insisté sur l’importance à accorder au développement.

Autres phrases fortes, « les armes doivent rester le monopole de l’Etat et l’Etat doit rendre des comptes ». « Une guerre juste, a expliqué le président ougandais, est une guerre qui a une justification et qui ne peut se résoudre d'aucune autre manière ». Le président Museveni ajoute, référence au discours du premier vice-président burundais : « Je suis heureux d’apprendre que les armes ont été retirées des mains des Imbonerakure », littéralement « ceux qui voient loin », les jeunes du parti au pouvoir tant décriés.

L'opposition déçue par les discussions

Les membres du gouvernement ont ensuite été appelés à se retirer. Alors que ce mardi soir le président Museveni devait rencontrer l’opposition, la société civile, les leaders religieux et le secteur privé, il s’était étonné dans son discours de voir des membres du gouvernement, et plus largement du camp présidentiel, dans la salle.

Mais le premier vice-président avait donné le ton. Dans son discours, Prosper Bazombanza a rejeté la faute sur l'opposition, l'accusant d'avoir toujours voulu une transition mais de ne pas jouer le jeu démocratique. Le gouvernement peut encore faire des concessions, temporisait quant à lui à la sortie le ministre burundais des Affaires étrangères, Alain-Aimé Nyamitwe, mais il doit respecter les lois. Sous-entendu, hors de question d'accepter un vide constitutionnel.

L'opposition, la société civile, les leaders religieux et le secteur privé sont donc restés seuls avec le médiateur qui s'est contenté d'écouter les propositions des uns et des autres. Après plus de 3 heures de discussions, plusieurs leaders de l'opposition se disaient déçus. « Le président Museveni reste sur l'idée d'un gouvernement d'union nationale et qu'il faut accepter le fait accompli de ce simulacre d'élections », explique l'un d'eux. « Il faut qu'ils arrêtent de croire au Messie extérieur, mais qu'ils fassent des propositions concrètes pour éviter la guerre », estimait pour sa part un membre de la société civile.

Mais que peut-on vraiment espérer de cette médiation de la dernière chance ? Avec sept heures de retard, quelques heures de discussions pour résoudre une crise qui dure depuis plusieurs mois, et une présidentielle dans six jours, beaucoup d’acteurs semblent dubitatifs sur la capacité du médiateur ougandais à résoudre la crise.

Ce mercredi à 8h, Yoweri Museveni doit rencontrer le camp présidentiel, puis les anciens chefs d'Etat à 10h, avant de retrouver tous les acteurs en séances plénières à 11h pour livrer ses conclusions.

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