20111017 Xinhua YAOUNDE, 16 octobre (Xinhua) -- Emmenés par le dirigeant du Social Democratic Front (SDF), Ni John Fru Ndi, des responsables de l'opposition au Cameroun se sont réunis samedi à sa résidence à Yaoundé pour former une coalition destinée à œuvrer à l'annulation de l'élection présidentielle tenue dimanche, jugée selon eux entachée de fraudes et de graves irrégularités .
Déjà chef de file incontesté de l'opposition depuis plus de 20 ans, Fru Ndi a pu regrouper autour de lui ses collègues Adamou Ndam Njoya de l'Union démocratique du Cameroun (UDC), Jean de Dieu Momo des Patriotes démocrates pour le développement du Cameroun (PADDEC), Albert Dzongang de la Dynamique pour la renaissance nationale, Bernard Muna de l'Alliance des forces progressistes (AFP) et Walla Edith Kahbang alias Kah Walla du Cameroon People's Party (CPP).
C'est six candidats sur les 22 concurrents du président sortant Paul Biya à la présidentielle de dimanche. Jusqu'à cette rencontre, ils ne se parlaient pas, faisaient savoir leurs proches. Avec Bernard Muna et Kah Walla, le "Chairman" du SDF a célébré des retrouvailles avec deux lieutenants dissidents ayant choisi de faire bande à part au profit de leurs propres ambitions politiques.
"Nous n'avons pas grand-chose à vous dire, sinon de vous faire savoir que nous avons fait du travail et qu'il y a beaucoup de choses à faire, vu la très grande importance pour notre pays de l'élection présidentielle. C'est pour cela que nous vous invitons seulement à la conférence de presse qui aura lieu lundi à 11 heures au siège de l'Union démocratique du Cameroun, à Yaoundé", a déclaré à la presse Ndam Njoya, qui prenait part à la réunion en compagnie de son épouse.
C'est au cours de l'échange annoncé avec les médias que la coalition a décidé de dévoiler le contenu de sa concertation, sanctionnée par la signature d'une déclaration effectuée samedi soir au terme de longues heures de discussions, sans Albert Dzongang, reparti un peu plus tôt pour Douala, la métropole économique où il réside.
"Nous nous sommes réunis pour l'élection présidentielle de 2011. C'est clair et net, parce qu'il y a des candidats qui sont ici, qui sont dirigeants des partis politiques. Vous savez ce qui peut nous réunir", s'est contenté de répondre le dirigeant de l'UDC, sur l'insistance des journalistes présents. A la question de savoir pourquoi maintenant et non pas avant, il a dit : "Nous sommes en démocratie, les choses avancent".
Tous les six membres de la coalition, originaires des régions voisines de l'Ouest et du Nord-Ouest, ont saisi la Cour suprême de justice agissant comme Conseil constitutionnel, de requêtes demandant pour quelques-uns dont Fru Ndi, Ndam Muna, Walla l'annulation totale du scrutin présidentiel critiqué, et pour d'autres, à savoir Momo et Dzongang, une annulation partielle concernant certaines circonscriptions électorales.
D'après des sources proches de ce regroupement, une action commune sera consacrée pour l'annulation totale du rendez-vous électoral. Dans la Déclaration de Yaoundé (en français et en anglais) dont Xinhua a pu obtenir quelques détails, la coalition dénonce le verrouillage de l'élection par le pouvoir en place à Yaoundé.
"Le peuple camerounais revendique depuis des décennies la tenue des élections libres, justes et transparentes par une commission électorale indépendante", souligne ce document pour qui, créé à la suite de l'Observatoire national des élections (ONEL), Elections Cameroon (ELECAM) ne rassure pas quant à son indépendance, sa neutralité et son impartialité.
"Pour parachever le verrouillage de cet organe, le président de la République a rempli Elections Cameroon des membres du bureau politique et du comité central du RDPC (Rassemblement démocratique du peuple camerounais, ndlr), parti au pouvoir", estime la coalition qui constate que, dans le cadre de la présidentielle du 9 octobre, "moins de 30% des cartes d'électeur étaient effectivement remises à leurs propriétaires légitimes".
Elle s'indigne également contre le "non fonctionnement des commissions départementales de supervision chargées de connaître des irrégularités".
Chez les autres candidats de l'opposition, la tenue de cette réunion est mal perçue, considérée comme une démarche surprenante. "Je n'ai pas été invité. Ils ont voulu faire entre eux. Ils estiment qu'ils ont le monopole de l'opposition, c'est bon. On espère qu'ils arriveront à leurs fins", a réagi Victorin Hameni Bieleu, président de l'Union des forces démocratiques du Cameroun (UFDC), joint par Xinhua.
Même réaction pour Jean Njeunga du Front uni du Cameroun (FUC) qui a fait savoir que "John Fru Ndi est président d'un parti. Je suis aussi président d'un parti. Je n'étais pas au courant. Je suis autonome, je ne suis pas là pour qu'on me fasse marcher, ni le RDPDC, ni quelqu'un de l'opposition. En 1992, j'ai donné ma voix à Fru Ndi. S'il est reconnaissant, il peut aussi me donner sa voix un jour".
Pour André Wache, premier vice-président du Mouvement pour l'émergence et le réveil du citoyen (MERCI) et directeur de campagne du candidat Isaac Feuzeu, "c'est une bonne initiative. Tout ce qu'on peut regretter est que cette réunion qui aurait dû se faire il y a quelques mois, comme nous l'avons toujours prôné".
Selon celui-ci, "le parti MERCI a toujours pensé qu'il faut la concertation à tout moment, il a toujours prôné le dialogue national sur tous les points de vue. Nous avons toujours demandé que de telles initiatives soient menées. Malheureusement, elle se fait après les élections. Un impact peut-être pour le futur, mais pour l'élection qui vient de se passer, je ne pense pas que cette réunion puisse influencer cette élection".
A l'instar de Hameni Bieleu, Wache juge la démarche discriminatoire. "C'est bien dommage qu'on puisse faire le Cameroun sans le parti MERCI. Je ne vois pas tellement une opposition qui se concerte sans Isaac Feuzeu. Je vous rappelle que le parti MERCI est la tête d'un groupe de 22 partis d'opposition qu'on appelle le GPDM, le Groupe de partis pour le dialogue national".
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