14122011 Jeune afrique Selon Victor Basile Séri Dehoua, chef de file des indépendants du FPI aux législatives ivoiriennes du 11 décembre, aucun d'entre eux n'a remporté le moindre siège. En cause : le mot d'ordre de boycott du FPI qui, jumelé à la crainte de nouvelles violences sur les populations, a laissé un boulevard aux candidats du pouvoir. Le taux de participation risque d'être historiquement bas.
« Ca été catastrophique ! » Dans la voix de Victor Basile Séri Dehoua, la déception est patente. Candidat indépendant malheureux dans la circonscription d'Iboguhé (département d'Issia, centre-ouest de la Côte d'Ivoire, région natale de Gbagbo), ce désormais ex-député du Front populaire ivoirien (FPI, parti de Laurent Gbagbo) avait mis en place une coalition de candidats indépendants, tous pro-Gbagbo, alors que son parti avait appelé à boycotter les législatives de dimanche.
Après la publication des premiers résultats par les commissions locales, et en attendant leur consolidation puis leur proclamation par la Commission électorale indépendante (CEI), Victor Basile Séri Dehoua a fait le point. « Aucun parmi nous n'a été élu », révèle-t-il. En cause, le boycott de son parti. « Des gens favorables au boycott sont passés dans les villages, ou ont fait circuler des SMS pour jouer sur la peur de nos électeurs, assure-t-il.
« L'un de ces messages que nous avons interceptés dit aux populations que si elles sortent pour voter le 11 décembre, les FRCI (Forces républicaines de Côte d'Ivoire, armée nationale mise en place par Alassane Ouattara, NDLR) vont les tuer. Or justement, les FRCI, pour ce qui concerne ma circonscription, se sont très bien comportées pendant la campagne et le jour du vote ».
Cuisant revers de Gervais Coulibaly
Comme Séri Dehoua, d'autres indépendants pro-Gbagbo ont essuyé des revers dans le centre-ouest du pays, traditionnellement favorable à l'ancien chef d'État, mais aussi dans le sud, le nord-est et à Abidjan. À Yopougon, la plus grande commune pro-Gbagbo de la capitale économique, la liste conduite par Gervais Coulibaly, ex-porte-parole de Gbagbo et membre du Congrès national pour la résistance démocratique (CNRD, coalition de mouvements et partis politiques pro-Gbagbo) a essuyé un cuisant revers. Là encore, le mot d'ordre du FPI a triomphé.
Avec la sécurité, le taux de participation était l'un des enjeux de l'élection. Pour l'heure, la CEI et les autorités ne donnent pas de chiffre officiel. Une attitude surprenante, puisque le taux de participation est la première donnée statistique donnée après chaque scrutin en Côte d'Ivoire. Une prudence inhabituelle qui laisse présager un très faible taux de participation.
Le président de la CEI, Youssouf Bakayoko misait dimanche, sur un taux de participation qui tournerait autour de 35 %. En décembre 2000, sous Laurent Gbagbo, le taux de participation aux législatives boycottées par le Rassemblement des républicains (RDR d'Alassane Ouattara) s'est élevé à environ 33 %. De leur côté, les pro-Gbagbo en exil à Accra ont livré leur propre chiffre. Ils parlent d'un taux qui ne franchirait pas la barre des 20%. « Une victoire pour Gbagbo », avait titré lundi Notre Voie, le journal du FPI.
Suspension du FPI
Victor Basile Séri Dehoua ne désespère pour autant pas de la politique ivoirienne. Aujourd'hui, lui et la vingtaine de candidats indépendants issus du FPI sont suspendus par leur parti. Il reste convaincu que « l'option du boycott était une erreur » et ne regrette pas d'avoir participé au scrutin. « Je voulais être le symbole du courage politique et de la réconciliation », avoue-t-il. Et de la realpolitik aussi, sans doute. Car l'épilogue de l'affaire Laurent Gbagbo à la Cour pénale internationale (CPI) n’est pas prévu de si tôt. Or le FPI avait fait de la libération de son leader et de ses responsables emprisonnés au nord du pays, entre autres, une condition à sa participation aux législatives.
Les projets politiques de Séri Dehoua ? « J'ai joué ma partition, la population dans ma circonscription n'a pas joué la sienne. Avec dix électeurs sur 500, dans des bureaux de vote, nos adversaires sont aujourd'hui députés. Demain, quand il s'agira de parler des vrais problèmes du pays, tel que le foncier rural, dans notre région, nous ne serons pas là pour en parler. Peut-être vais-je plus m'investir dans la politique à Abidjan que dans ma région natale où mon combat est incompris », lâche-t-il.
En ligne de mire, les élections municipales et régionales dont la date n'est pas encore connue, mais qui devraient être organisées au plus tard à la fin du premier semestre de 2012. Le FPI va-t-il boycotter aussi ces élections ? Pour l'heure, le président par intérim de ce parti, Sylvain Miaka Oureto et son secrétaire général intérimaire, Laurent Akoun, ne se sont pas exprimés sur le sujet.
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