17122011 Jeune afrique Le rejet par le Parlement européen, le 14 décembre, d’un accord de pêche autorisant 120 bateaux à pêcher dans les eaux marocaines, tend les relations entre le Maroc et l’UE et divise l’Europe en deux.
Le Parlement européen (PE) a rejeté, mercredi 14 décembre, le protocole d’extension de l’accord de pêche entre le Maroc et l’Union européenne, élaboré par la Commission européenne. La décision des députés de Strasbourg bloque un protocole d’un an, qui permettait à 120 bateaux européens, notamment espagnols, de pêcher dans les eaux marocaines en échange de 36,1 millions d’euros par an et de redevances sur les captures. Une activité concernant principalement la sardine et le poulpe, notamment au large du Sahara occidental.
Fermeté marocaine
326 députés se sont opposés à l’accord, contre 296 qui y étaient favorables. Dans une résolution séparée qui a recueilli 544 votes contre 123, les parlementaires européens ont également demandé qu’un futur accord sur la pêche avec le royaume respecte « entièrement » le droit international et « bénéficie aux populations locales, y compris le peuple sahraoui ».
Le gouvernement marocain a réagi immédiatement en demandant aux navires de pêche européens de quitter les eaux marocaines avant mercredi minuit. Un communiqué de presse du ministère des Affaires étrangères note que le Maroc n’a pas été demandeur de la prorogation de l’accord et qu’il a « répondu à une sollicitation vive et appuyée de la part de l’Union européenne ». Sans évoquer directement la question du Sahara occidental, la diplomatie marocaine insiste sur les considérations budgétaires, économiques et écologiques qui justifient le rejet du protocole, jugeant au passage qu’ « au-delà de ces arguments […], la campagne menée par des milieux hostiles à l’intégrité territoriale du royaume, n’a pas eu d’effet. »
De son côté, le royaume s’est attelé, depuis deux ans, à une stratégie nationale de développement du secteur, baptisée Plan Halieutis. Les opérateurs nationaux de la pêche se plaignent de la raréfaction de la ressource, accaparée par des opérateurs européens mieux équipés qu’eux. Les péripéties de ces derniers jours ne sont pas pour déplaire aux armateurs et patrons d’usine de conservation et de transformation de produits de la mer. « Nous avons les moyens de développer ce secteur sans l’Europe », explique le ministre sortant de l’Agriculture et des Pêches, Aziz Akhannouch.
Une Europe divisée
Pour sa part, la commissaire européenne aux Affaires maritimes et à la Pêche, la Grecque Maria Damanaki, préfère ne pas s’avancer : « Je ne sais pas si un nouvel accord de pêche avec le Maroc est possible. » Elle estime qu’un futur accord devrait « apporter des réponses convaincantes aux questions relatives à la soutenabilité environnementale, la profitabilité économique et la légalité internationale ». Une position qui reprend l’argumentaire de la majorité parlementaire. Côté marocain, on note que la commissaire européenne n’a démontré ni son efficacité ni son enthousiasme à défendre un accord qu’elle a pourtant elle-même négocié.
Face à des gouvernements européens plutôt favorables à l’accord - notamment ceux d’Espagne, d’où sont originaires la quasi-totalité des navires de pêches andalous bénéficiaires de ces autorisations de pêche, mais aussi du Portugal et de France - s’est constitué un front majoritaire de députés européens pro-Polisario, sensibles au lobbying intense des militants indépendantistes. Ces élus, majoritairement de gauche ou écologistes (mais pas seulement), sont pour l’essentiel suédois, finlandais, autrichiens, néerlandais ou allemands. Une chose est sûre : l’avenir de la coopération euro-marocaine en matière de pêche entre en eaux troubles.
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