Sénégal : Aucune femme dans les prisons sénégalaises le 20 janvier
le 16/01/2012 11:55:56
Sénégal

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IRIB
Alors que la campagne pour l’élection présidentielle prévue le 26 février prochain bat son plein au Sénégal, le président sortant Abdoulaye Wade, candidat à sa succession, a créé la surprise le 3 janvier en faisant une proposition pour le moins inattendue.



Il a en effet décidé de faire du 20 janvier une journée sans femme en prison. « Celles dont les peines et délits commis ne sont pas lourds, bénéficieront de la grâce présidentielle », « D’autres seront libérées sous conditions ». « Les autres enfin seront autorisées à sortir de prison du 19 janvier 2012 à 00h au 21 janvier », indique le communiqué de la présidence. Cette journée sans femme en prison est en outre couplée avec une journée du don qui signifie que « chaque Sénégalais ou étranger vivant parmi nous offre à son prochain un cadeau si modeste soit-il ». Le porte parole de la présidence a à ce sujet souligné que « les autorités compétentes ont reçu du chef de l’Etat les instructions nécessaires à l’application de ces deux mesures tout à fait révolutionnaires ».

Le moins que l’on puisse dire c’est que cette mesure ne fait pas l’unanimité. Les femmes dans leur ensemble y sont plutôt favorables, « la journée du 20 janvier 2012 sera historique pour toutes les femmes en général et celles d’entre elles emprisonnées surtout », a déclaré Mame Yacine Cissé de l’association des mères éducatrices de Sedhou (sud du Sénégal), citée par l’Agence de presse sénégalaise (APS). « Cette décision salutaire peut permettre aux prisonnières de prendre conscience des erreurs commises qui les sont conduites en prison », ajoute-t-elle.

De son côté, la coordinatrice régionale du Forum des éducatrices africaines (Fawe) Abibata Diallo Diatta, y voit l’intérêt que le chef de l’Etat porte aux femmes. « Avec la loi sur la parité hier et la journée sans femmes en prison nous sentons qu’il a davantage de considération à notre égard », a-t-elle notamment déclaré, réfutant toute récupération électorale de la part d’un président en campagne.

On compte aujourd’hui 200 femmes, Sénégalaises et étrangères, enfermées dans les 37 prisons du pays. 2/3 d’entre elles sont en détention provisoire, en attente de jugement. Or le président n’a le droit d’agir que sur des personnes déjà condamnées en leur accordant une grâce. C’est la raison pour laquelle les magistrats sont très réservés quant à cette journée du 20 janvier. Et les réactions en provenance de l’Union des magistrats du Sénégal (UMS), l’organisation syndicale la plus importante, ne se sont pas fait attendre. L’UMS dénonce l’attitude du chef de l’Etat qui outrepasse ses droits en faisant fi de la séparation des pouvoirs entre l’exécutif, le législatif et le judicaire. Pour le président de l’organisation syndicale, Abdoul Aziz Seck, « la grâce présidentielle obéit à certaines règles, les procédures en la matière doivent être suivies ».

Cette mesure ne satisfait pas non plus l’administration pénitentiaire qui ne voit pas comment elle peut dire à des femmes purgeant de longues peines : « partez, et revenez dans 48 heures ». Le manque de personnel ne permettra pas de les suivre, souligne le site d’informations Nettali. Pourquoi-le-President-Wade-ne-peut.html Que faire en outre des étrangères qui n’ont pas de famille pour les accueillir ? demande l’administration.

Pour d’autres, enfin il s’agit d’une mesure tout simplement discriminatoire. C’est le cas du juriste Mady Boiro, de l’université Gaston Berger de Saint Louis, cité par le site Dakaractu.com, qui rappelle qu’ « un crime reste un crime quel qu’en soit son auteur homme ou femme ».

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