Égypte : si près, si loin du but
le 10/06/2012 11:55:43
Égypte

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IRIB
Au Caire, à Alexandrie et ailleurs sans doute, la rue arabe rue dans les brancards ces jours derniers en Egypte, faisant peser de sérieuses menaces sur la tenue du second tour de l’élection présidentielle, prévue pour les 16 et 17 juin prochains.



La brusque montée de fièvre survient dans un contexte fort éprouvant. Il y a d’abord la commémoration, un an après, de la mort du jeune Khaled Saïd. Battu à mort le 6 juin 2010, le jeune Egyptien est depuis lors, devenu une icône de la révolution. Ensuite, le verdict retentissant du procès de l’ex-président Hosni Moubarak.

L’ex Raïs ainsi que son ex-ministre de l’Intérieur, Habib al-Adli, ont été condamnés à la perpétuité, alors que la peine de mort avait été requise à leur encontre. Par ailleurs, six responsables de la sécurité ont été acquittés. Eux aussi étaient poursuivis pour la mort de 840 personnes pendant la révolution de janvier et février 2011. Enfin, les charges pour corruption pesant contre Hosni Moubarak et ses deux fils, Alaa et Gamal, n’ont pas été retenues. Les manifestants jugent ce verdict trop clément.

Cela, d’autant que c’est encore un ancien du régime Moubarak, Ahmed Chafik, qui figure au second tour de l’élection présidentielle. Comme s’il en était de trop, les manifestants récusent désormais la qualification de cet acteur politique au scrutin. Ahmed Chafik, l’un des deux candidats qualifiés pour le second tour de l’élection présidentielle avec Mohamed Morsi, candidat des Frères musulmans, n’aurait pas dû se présenter au premier tour, en vertu d’une loi prévoyant que les anciens membres du régime Moubarak (Ahmed Chafik a été son dernier Premier ministre) soient privés de leurs droits civiques pendant dix ans.

L’homme, un temps disqualifié, avait fait appel et avait gagné le droit de se présenter, arguant de l’anti-constitutionnalité de la loi. L’affaire est devant la Haute cour constitutionnelle qui doit se prononcer le 14 juin, soit deux jours seulement avant le second tour du scrutin présidentiel. Représentant toutes les tendances, laïques et religieuses, les manifestants dénoncent l’issue du procès de Moubarak et ne réclament ni plus ni moins que le report du deuxième tour de la présidentielle.

Mais pourquoi donc n’avoir pas laissé passer le second tour ? Dans ce combat sans cesse reconduit et à l’issue incertaine, on pourrait y voir de la stratégie. Quelque part, il y a comme un manque de fair-play dans ces sorties des acteurs politiques égyptiens dans leur ensemble. Ces tours de passe-passe dont l’opinion internationale est témoin ne présagent rien de bon pour l’avenir de la démocratie dans ce pays. On se demande pourquoi n’avoir pas vraiment insisté sur le tri à effectuer avant le scrutin.

Le procès semble avoir réveillé un passé nostalgique pour les uns et amer pour les autres. En tout cas, il donne l’impression d’avoir joué un vrai sale tour aux Frères musulmans qui ruminaient sans doute une certaine vengeance, auréolée d’une victoire au second tour. En tout cas, le verdict, lui, tombe mal.

Si les troubles devaient persister, n’y aurait-il pas risque pour ce pays de basculer vers l’arrière ? Que ferait l’armée ? Se scinderait-elle en trois ? Après celle des Pharaons, que nous réserve donc l’Egypte de demain ?

Chaque jour qui passe voit s’augmenter un peu plus la détresse du peuple égyptien. Les acteurs politiques aux affaires, comme ceux qui attendent leur tour, continueront sans doute à scruter le ciel. Car, plus le second tour se rapproche, plus les chances de le voir se réaliser, s’éloignent.

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