La crise au Nord-Kivu et la situation des droits de l’homme en RDC ont été les deux sujets forts de la visite de François Hollande, le 13 octobre à Kinshasa, à l’occasion du XIVe sommet de la Francophonie. Dans une ambiance plutôt fraiche entre le président français et son homologue congolais, Joseph Kabila.
Sur les marches du Palais du peuple de Kinshasa, à l’arrivée des chefs d’État à la cérémonie d’ouverture du XVIe sommet de la Francophonie, la poignée de main entre le président français, François Hollande, et son hôte congolais, Joseph Kabila, a été rapide et froide. Pas de regards échangés, pas de sourires polis. Les deux dirigeants s’étaient vus en tête-à -tête plus tôt dans la matinée et n’avaient l’intention ni l’un ni l’autre de feindre le parfait amour.
Dès sa descente d’avion, et après un passage rapide à son hôtel, samedi 13 octobre au matin, François Hollande a été reçu au Palais de la nation par Joseph Kabila. Les deux hommes se sont entretenus pendant près de 40 minutes, lors desquelles ont été évoqués la situation des droits de l’homme en RDC et le conflit au Nord-Kivu.
Hollande avait déjà donné son point de vue, le 9 octobre à Paris, en estimant que « la situation (en RDC) est tout à fait inacceptable, sur le plan des droits, de la démocratie et de la reconnaissance de l’opposition ». Il a répété son message en exprimant devant Joseph Kabila la « préoccupation de la France face à l’état précaire des libertés » dans le pays, selon un proche de l’Élysée. Dans la perspective des élections locales de l’année prochaine, la France souhaite ainsi que la réforme de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) ait aboutie afin que l’opposition y obtienne la place qu’elle réclame.
"Long processus" démocratique
Pour mieux marquer son point de vue, Hollande a également évoqué devant le président congolais le procès des meurtriers présumés de Floribert Chebeya, le militant des droits de l’homme assassiné en 2010, en rappelant que la France ne relâchera pas la pression pour que les responsables soient jugés.
Joseph Kabila a réagi froidement au discours de François Hollande.
Joseph Kabila a réagi froidement au discours de son invité. Il a tenu à lui rappeler que la démocratie était un « long processus » et a expliqué qu’une première loi a déjà été votée pour la réforme de la Commission des droits de l’homme tandis que celle sur la Ceni était en cours. Quant à l’affaire Chebeya, Kabila a souligné qu’il n’interférait pas dans les affaires de la justice et qu’il n’était pour rien dans le report du procès à une date ultérieure au sommet.
Après le tête-à -tête entre les deux dirigeants, François Hollande s’est rendu à la résidence de France où il a reçu cinq leaders de l’opposition congolaise, pendant environ 45 minutes. Étaient présents Vital Kamerhe (UPNC), Samy Badibanga (UDPS-FAC), Martin Faylu (UDPS-FAC), Jean-Lucien Bussa (MLC) et Pierre Matusika (Abako). Ils étaient accompagnés de représentants d’ONG comme la Voix des sans voix (ONG de Floribert Chebeya). Le même message qu’à Kabila leur a été transmis, et il a été bien mieux reçu évidemment.
Le Nord-Kivu, timide terrain d’entente
L’autre sujet à l’ordre du jour a permis d’apaiser un peu les esprits. Et la France en a peut-être un peu rajouté dans le sens de Kinshasa pour compenser les attaques formulées à l’encore du régime de Kabila.
Dans son discours, lors de la cérémonie d’ouverture du sommet, François Hollande s’est attardé sur la question des crises et a logiquement commencé par évoquer la situation des populations au Kivu. Il a martelé la nécessité de « réaffirmer que les frontières de la RDC sont intangibles ». L’ovation dans la salle n’a jamais été aussi intense et elle s’est poursuivit quand il a demandé à ce que les forces de l’ONU soient davantage présentes et que le mandat de la Monusco puisse être élargi.
C’est également ce message qu’il a transmis à Joseph Kabila, qui ne pouvait – sur ce sujet - qu’acquiescer au soutien répété de Hollande en faveur de la protection des frontières de la RDC.
Le président congolais ne s’est cependant pas privé de préciser au chef de l’État français qu’il trouvait dommage qu’on ne désigne jamais nommément l’agresseur – entendre le Rwanda accusé par Kinshasa de soutenir la rébellion du M23…
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Par Élise Colette et Philippe Perdrix, envoyés spéciaux à Kinshasa 14102012 Jeuneafrique
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