Plus de deux mille personnes se sont rassemblées lundi sans incident à Tunis pour dénoncer les violences politiques et une dérive autoritaire du pouvoir dominé par les islamistes, quelques jours après la mort d'un opposant, selon une journaliste de l'AFP sur place.
Le Front populaire, une coalition de gauche, a mobilisé ses partisans à partir de 11H00 GMT dans le centre de Tunis, sur l'avenue Habib Bourguiba.
Trois autres partis, dont Nidaa Tounès, le mouvement de l'ex-Premier ministre Béji Caïd Essebsi, ont réuni de leur côté sur la même avenue leurs sympathisants pour protester contre les violences politiques.
Les deux cortèges se sont rejoints et aucun incident n'a eu lieu jusqu'à la fin de la manifestation vers 15H00 GMT.
Les manifestants ont scandé "Le peuple veut la chute du régime" ou encore "emploi, liberté, dignité", le cri de ralliement de la révolution de 2011 qui a chassé le président Zine El Abidine Ben Ali.
Ces manifestations interviennent quelques jours après la mort dans le sud de la Tunisie d'un représentant de Nidaa Tounès, tués lors d'affrontements avec des manifestants proches d'Ennahda, le parti islamiste qui dirige le gouvernement tunisien.
"Je manifeste contre la violence. Je pense que ce gouvernement est irresponsable et comme toute personne irresponsable il ne peut rester au pouvoir", a déclaré à l'AFP le député à l'ANC, Ahmed Khaskhoussi. "Ils ne se rendent pas compte de la gravité de la situation", a-t-il ajouté.
"La Tunisie passe par une période assez difficile et le recours à la violence ne peut qu'empirer la situation", a jugé Mustapha Kamel Nabli, l'ex-gouverneur de la Banque centrale tunisienne, limogé cet été dans des conditions controversées.
Un groupe d'une vingtaine de jeunes militants pro-gouvernementaux ont aussi manifesté avenue Bourguiba en scandant des slogans favorables à Ennahda.
Ces manifestations ont lieu à la veille du premier anniversaire des premières élections libres en Tunisie ayant abouti à la formation de l'Assemblée nationale constituante (ANC).
Les travaux de celle-ci ont pris un grand retard, ne permettant pas d'achever la rédaction de la Constitution, comme promis, avant le 23 octobre 2012.
Une partie de l'opposition considère dès lors que le gouvernement de coalition regroupant Ennahda et deux partis de centre-gauche perd sa légitimité mardi.
Dans ce contexte tendu, les ministères de l'Intérieur et de la Défense ont indiqué que des renforts avaient été déployés pour protéger les bâtiments officiels mais aussi des centres commerciaux en cas de débordements.
"L'armée a été déployée depuis dimanche pour garder les points sensibles comme les centres commerciaux et les banques dans tout le territoire tunisien", a expliqué à l'AFP le colonel Mokhtar Ben Nasr, porte-parole du ministère de la Défense.
L'état d'urgence est en vigueur en Tunisie depuis janvier 2011 et la fuite du président déchu à l'issue d'une révolution.
Le Premier ministre tunisien, l'islamiste Hamadi Jebali, a de son côté déclaré dans un entretien dimanche au quotidien français Le Parisien vouloir "bâtir une démocratie modèle pour le monde arabe", et appelé à l'aide l'Europe et les Etats-Unis pour y parvenir.
"Sinon, l'alternative, c'est le chaos, l'anarchie", a-t-il prévenu.
L'ANC se réunira pour une séance extraordinaire mardi en présence du président Moncef Marzouki et de M. Jebali afin de célébrer le premier anniversaire des élections. Les députés débattront alors du préambule de la future Constitution. 23102012 Jeuneafrique
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