Les Seychelles laisseront-elles un arrière-goût de paradis perdu à Sakhr el-Materi, gendre de l’ancien président tunisien ? Selon le ministre tunisien de la Justice, celui-ci voulait entrer à Mahé, le 12 décembre, avec un passeport diplomatique périmé. Tunis essaye de profiter de la situation pour demander son extradition.
Sous le coup d’un mandat d’arrêt international, Sakhr el-Materi semble avoir très régulièrement séjourné aux Seychelles depuis son éloignement, en septembre 2012, du Qatar, malgré le statut de résident permanent qui lui a été accordé par les autorités de Doha après la révolution tunisienne. C’est en voulant entrer à Mahé, le 12 décembre, avec un passeport diplomatique périmé que le gendre de Ben Ali s’est mis dans une position délicate vis-à -vis des autorités de l’archipel, qui l’interrogent sur les raisons de sa présence sur leur sol.
La Tunisie compte profiter de l’incident pour demander l’extradition de Materi, mais aucun accord judiciaire connu entre les deux pays n’était opérationnel avant la révolution tunisienne. Une chose est sûre : la Tunisie a établi récemment des relations diplomatiques beaucoup plus étroites avec la république seychelloise.
Ascension fulgurante
Condamné à 15 ans de réclusion par contumace et faisant l’objet d’autres poursuites judiciaires, l’époux de Nesrine, fille aînée de Leïla Ben Ali, a eu une ascension fulgurante depuis son mariage en 2004. Présent dans la finance, le tourisme et les médias, le magnat de 31 ans réalisait 200 millions de dollars de chiffre d’affaires.
Son empire est, aujourd’hui, sous tutelle de l’État avant d’être mis en vente. Celui que Leïla Ben Ali préparait à prendre la relève de son mari affichait un islamisme modéré, malgré son goût pour la fête, et avait noué des relations avec les islamistes en exil à Londres, dont Rached Ghannouchi, président du parti d’Ennahdha aujourd’hui au pouvoir.
Émissaire
Lors d’un entretien téléphonique avec Jeune Afrique en octobre 2011, suite à la publication de son portrait, ce fils d’une famille nationaliste et bourgeoise s’était défendu d’avoir commis des malversations et avait confié son souhait d’être traité de manière équitable par la justice tunisienne, tout en estimant nécessaire un audit d’experts internationaux pour évaluer les opérations qu’il avait réalisées. Au cas où son extradition se concrétiserait, une question se pose : comment les islamistes vont-ils traiter l’un des hommes qui leur servait d’émissaire avec Ben Ali ?
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Par Frida Dahmani, Ă Tunis 15122012 Jeuneafrique
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