Égypte : le décès d'un militant relance les appels à une réforme de la police
le 05/02/2013 10:39:25
Égypte

Le décès lundi d'un militant après sa détention par la police et des images d'un manifestant dénudé et battu par des agents des forces de l'ordre relancent les appels à une réforme de l'appareil policier en Egypte, comme lors de la révolte qui fit chuter Hosni Moubarak il y a deux ans.


Mohamed al-Guindi, 28 ans, avait disparu le 25 janvier sur la place Tahrir au Caire où il participait à une manifestation à l'occasion du 2e anniversaire du soulèvement anti-Moubarak, qui avait pris la forme d'un rassemblement contre l'actuel chef de l'Etat, l'islamiste Mohamed Morsi.

Selon ses avocats, le militant a été torturé dans un camp de la police, avant d'être conduit dans un hôpital où, selon ministère de la Santé, il avait été admis inconscient et souffrant d'une hémorragie interne. Tombé dans le coma, il est décédé lundi.

"Il est mort des suites de la torture", a affirmé son parti, le Courant populaire, dans un communiqué.

"Il n'est pas le seul à mourir (sous la torture) sous Morsi. Mais comme c'est un activiste, son nom nous est familier", a déploré Hossam Bahgat, directeur de l'Initiative égyptienne pour les droits de la personne (EIPR), l'une des principales organisations de défense des droits de l'Homme du pays.

Des photos le montrant à l'hôpital, le visage meurtri, ont circulé sur les réseaux sociaux et des activistes l'ont présenté comme le nouveau Khaled Saïd, un Egyptien battu et tué par la police en 2010 et devenu depuis un symbole de la lutte contre les brutalités policières.

L'opinion publique est aussi sous le choc d'images diffusées sur internet et à la télévision montrant des policiers anti-émeute dénuder et battre un manifestant vendredi soir lors d'un rassemblement contre M. Morsi devant le palais présidentiel au Caire.

Hamada Saber Mohamed Ali, un père de famille de 50 ans, qui avait initialement assuré avoir été attaqué par des manifestants et secouru par la police, est finalement revenu sur cette version peu crédible déjà démentie par des proches ayant fait état de pressions pour dédouaner la police.

Pas de changement de fond

Les deux incidents ont embarrassé le président Morsi. Son cabinet a indiqué avoir demandé au parquet d'enquêter sur les circonstances du décès de M. Guindi et a exclu "un retour aux violations des droits des citoyens et des libertés après la révolution" qui a provoqué la chute du régime Moubarak.

Il y a deux ans, la réforme de la police, accusée de bénéficier d'une impunité systématique pour ses nombreuses exactions, était l'une des principales revendications des Egyptiens descendus dans les rues.

"La police égyptienne pratique systématiquement la violence et la torture, parfois elle tue", a dénoncé l'EIPR dans un rapport publié la semaine dernière, en indiquant enquêter sur des dizaines de cas de torture ces derniers mois.

"Il n'y a pas eu de changement de fond, ou même une amélioration cosmétique, dans l'appareil policier en matière de structure administrative, de prise de décision, de contrôle du travail de la police, ou de réforme et de renvoi des officiers et agents responsables de torture et de meurtres", a ajouté l'ONG.

"Les jeunes sont encore torturés et tués dans leur quête de dignité", a souligné Mohamed ElBaradei, une figure de proue de l'opposition.

"Derrière chaque martyr, il y a une police corrompue", a renchérit Gamal Eid, un des défenseurs des droits de l'Homme les plus connus en Egypte.

Lundi, des centaines de personnes ont participé sur la place Tahrir à une prière à la mémoire de Mohamed al-Guindi et d'un autre militant tué par balle lors d'une récente manifestation. "Obtenir justice pour eux, ou mourir comme eux", a scandé la foule.
05022013
Jeuneafrique

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