Accouchement au forceps du gouvernement tunisien d'Ali Larayedh. Le nouveau né reste dans la lignée du précédent exécutif, sauf pour les ministères de souveraineté devenus indépendants.
Il a fallu qu’Ennahdha parti au pouvoir se rende à l’évidence. Pour sortir la Tunisie d’une impasse politique et d’une crise socio économique sans précédent, elle devait accepter un nouveau gouvernement, suggéré et soutenu par l’ancien chef du gouvernement Hamadi Jebali depuis juillet 2012. Aujourd’hui, c’est chose faite. Ali Larayedh, successeur de Jebali et ancien ministre de l’Intérieur, a bouclé son tour de table sans avoir élargi le nouvel exécutif à d’autres familles politiques que celles de la troïka préalablement en place.
Le noyau dur de cette alliance entre Ennahdha, le Congrès pour la république (CPR) et Ettakatol est donc toujours présent pour gérer les affaires de l’État. Le remaniement porte sur la moitié du gouvernement et est marqué par l’arrivée de nombreux indépendants tandis que certains ministères, comme celui de l’Environnement, deviennent des secrétariats d’État. Cette composition non élargie signifie beaucoup. Ennahdha, au fur et à mesure de négociations marathon qui ont duré 15 jours, a concédé peu de choses si ce n’est l’indépendance des ministères régaliens.
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Les revendications portant sur la dissolution des ligues de protection de la révolution, la révision des nominations effectuées depuis les élections du 23 octobre 2011, ainsi que sur la fin de la mission du nouvel exécutif au 31 décembre, n’ont pas abouti. Ainsi, les ministères régaliens échoient comme prévu à des indépendants dont trois magistrats : Lotfi Ben Jeddou, procureur de la République à Kasserine, à l’Intérieur ; Rachid Sabbagh, ancien président du Conseil supérieur islamique, à la Défense ; Leïla Bahria, juge, Secrétaire d’État aux Affaires étrangères. Le ministre Othman Jerandi est quant à lui un ancien diplomate de carrière et le ministère de la Justice sera dirigé par un juriste, Nadhir Ben Ammou. Industrie, Enseignement, Santé, Culture, Sport, Équipement et Justice transitionnelle sont des portefeuilles toujours détenus par les mêmes formations.
"Chaises musicales"
Cependant, ce n’est pas tant la composition de cette équipe ou la répartition entre les différents partis qui est essentielle, mais la feuille de route qui sera adoptée et les relations avec la classe politique et la société civile qui en résulteront. Des proches du chef du gouvernement affirment que les priorités sont très proches de celles fixées par les principaux partis lors de la consultation qu’avait menée Hamadi Jebali avant que son initiative d’un gouvernement de technocrates ne soit déboutée par Ennahdha - avec comme conséquence sa démission, le 21 février. D’autres estiment que le nouvel exécutif adoptera la même ligne que le précédent, puisque les portefeuilles sont attribués aux mêmes personnes - dont le bilan mitigé avait entraîné une crise gouvernementale.
D’entrée de jeu, la tâche de l’équipe Larayedh ne sera donc pas facile. D'autant que les augmentations du prix des carburants accentuent la grogne sociale et que d’importants mouvements de grève sont annoncés. « Ils ont tourné en rond pendant des mois pour finir par nous offrir un savant jeu de chaises musicales où on ne prend pas tout à fait les mêmes mais où on recommence », assène un médecin de la santé publique en colère pour ses conditions. Tout aussi désabusé, le constitutionnaliste Ghazi Grairi déclare quant à lui « qu’il n’y a pas de quoi pavoiser ! »
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Composition du nouveau gouvernement tunisien :
Chef du gouvernement: Ali Larayedh Ministres auprès du chef du gouvernement :
- Noureddine Behiri
- Ridha Saïdi, chargé du dossier économique
- Abderhamane Ladgham, chargé de la Gouvernanace et de la lutte contre la malversation
Ministre de la Défense : Rachid Sabbagh Ministre de l’Intérieur : Lotfi Ben Jeddou Secrétaire d’État auprès du Ministre de l’Intérieur chargé de l'Administration régionale et des collectivités locales : Saïd Mechichi Ministre des Affaires étrangères : Othamne Jerandi Secrétaire d’État auprès du ministre des Affaires étrangères : Leila Bahria Ministre de la Justice : Nidhal Ben Ammou Ministre des Droits de l’Homme et de la Justice transitoire : Samir Dilou Ministre des Affaires religieuses : Noureddine Khadmi Ministre des Finances : Elyes Fakhfakh Secrétaire d’État auprès du ministre des Finances : Chedly El Abed Ministre de l’Industrie : Mehdi Jomaa Secrétaire d'État chargé des Mines et Énergie : Nidhal Ouerfelli Ministre du Commerce et de l'Artisanat : Abdelwaheb Maatar Ministre du Tourisme : Jamel Gamra Ministre des Affaires sociales : Khalil Zaouia Secrétaire d’État auprès du ministre des Affaires sociale chargé de l’Immigration : Houcine Jaziri Ministre de l’Éducation : Salem Labiedh Ministre de la Santé : Abdellatif Mekki Ministre du Développement et de la Coopération internationale : Lamine Doghri Secrétaire d’État chargé du développement régional : Noureddine Kaabi Ministre de la Formation professionnelle et de l’Emploi : Naoufel Jemmali Ministre des Transports : Abdelkarim Harouni Ministre des Technologies de la Communication : Mongi Marzoug Ministre de l’Équipement : Mohamed Salmane Secrétaire d'État chargé de l'Environnement : Sadok Omri Secrétaire d’État chargé de l’Habitat : Chahida Fraj Bouraoui Ministre de la Jeunesse et des sports : Tarek Dhiab Secrétaire d’État auprès du Ministre de la Jeunesse et des sports : Dr Fethi Touzri Ministre de la Culture : Mehdi Mabrouk Ministre de la Femme : Sihem Badi Ministre de l’enseignement supérieur : Moncef Ben Salem Ministre des Domaines de l’État : Slim Ben Hmidane Ministre de l’Agriculture : Mohamed Ben Salem Secrétaire d’État auprès du ministre de l’Agriculture : Habib Jomli 10032013 Jeuneafrique
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