Ils ne sont pas payés, reçoivent un repas par jour, dorment où ils peuvent: les milliers de rebelles centrafricains du Séléka qui ont renversé il y a deux semaines le régime de François Bozizé, vivent à Bangui dans des conditions difficiles, malgré les pillages dont ils sont en partie responsables.
"On n'a pas reçu de +Papa Golf+ depuis le début de l'attaque", affirme un des 3. 000 à 5. 000 membres, voire plus, de la coalition Séléka. Par "Papa Golf", il faut comprendre la Prime générale d'alimentation (PGA), soit le nerf de la guerre: l'argent. Les hommes, eux, voudraient bien toucher un per diem de 2. 000 à 5. 000 francs (3 à 7,5 euros).
Alors, après la mise à sac de la capitale centrafricaine tombée le 24 mars aux mains de la rébellion, de nombreux dérapages persistent, des pillages de maisons aux petits rackets.
"En l'absence de salaires, ils se paient sur la bête", souligne une source sécuritaire. "C'est une habitude des rébellions. Mais là , ils ont pris le pouvoir. Il faut que ça cesse. Il faut les payer ou les cantonner (en les regroupant dans des lieux déterminés, ndlr), sinon ce n'est pas tenable".
Dans les casernes, les hommes du Séléka se sont installés là où ils le peuvent, dormant à même le sol ou à l'air libre.
En général, ils reçoivent un repas par jour. Au Camp Kasai, où vivent plusieurs centaines d'hommes, ce repas est distribué de manière méthodique. On procède à l'appel. Chaque homme vient avec sa gamelle et est alors servi. On évite ainsi tout gaspillage.
Ce jour-là , le repas est composé de riz avec des sardines en boîte. "C'est bon", assure Barthelemy Lesseka, qui a rejoint le Séléka le 25 mars, au lendemain de la prise de Bangui. Pour cet ancien vendeur ambulant qui "gagnait mal" sa vie, intégrer la coalition rebelle a été une aubaine.
"On travaille toute la journée et le soir, rien!"
"Le soir, on se débrouille. On dépend de la bonne volonté des gens du quartier. On leur demande quelque chose", explique-t-il.
Rackette-t-il à ce moment là ? "C'est faux. Ceux qui racontent ça sont des menteurs. On ne force personne. Jamais".
Toutefois, loin du camp Kasai, au centre-ville, un gardien d'une maison individuelle raconte: "Mon patron m'avait donné 5. 000 FCFA pour aller faire des courses à l'épicerie voisine à la tombée de la nuit. Je suis tombé sur une patrouille (du Séléka, ndlr) qui m'a demandé ce que je faisais. Je leur ai expliqué. Ils m'ont pris les 5. 000 en disant qu'eux non plus n'avaient pas mangé".
Certains rebelles ayant participé à toute l'offensive lancée depuis le Nord sont plus énervés. S'ils avaient reçu une prime de 30. 000 FCFA (45 euros) pour le début des opérations, de décembre à janvier, en plus des bénéfices des pillages, ils sont depuis au régime sec.
"On n'a rien touché! On travaille toute la journée et le soir, rien! On fait comment?", demande l'un d'eux.
Les chefs de la rébellion essayent de "tenir" leurs hommes pour sécuriser la ville. Ils ont ainsi commencé à les cantonner pour limiter leur nombre dans la capitale et mieux les contrôler. Mais, comment faire pour les payer alors que les caisses sont vides? Un responsable du Séléka balaie la question en disant: "On ne paie pas les fonctionnaires tous les jours, mais à la fin de chaque mois".
Avec l'application des recommandations du sommet N'Djamena, pour mettre en oeuvre une transition démocratique, la Centrafrique espère recouvrer une certaine légitimité et avoir de nouveau accès aux financements de la Banque centrale d'Afrique centrale et des bailleurs de fonds internationaux.
Mais pour le "Papa Golf", les hommes devront attendre. 20130704 Jeuneafrique
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