Le déploiement d'une brigade d'intervention de l'ONU, dans l'est de la République démocratique du Congo, soulève de l'espoir parmi la population de Goma même si, face aux violences des rebelles, les Nations unies estiment que la solution politique demeure primordiale.
"Nous voulons que la brigade intervienne. A chaque fois que le gouvernement a négocié avec les rebelles, d'autres sont apparus. Nous ne croyons pas à Kampala. Cette fois, il faut les traquer", assène Ester Kamate, pharmacienne de Goma, dans le quartier de Katindo.
A la suite de l'entrée des rebelles à Goma en novembre 2012, les pays de la région ont obtenu leur retrait de la capitale provinciale du Nord Kivu en échange de négociations, qui durent toujours à Kampala.
Dans Goma, toujours sous la menace de M23 qui campe à ses abords, les habitants sont vindicatifs et, même, s'ils ne se font pas beaucoup d'illusions sur la capacité d'action de la brigade d'intervention, leur espoir est perceptible.
Cette brigade d'environ 3. 000 hommes, décidée en mars dernier par les Nations unies pour prêter main forte aux 17. 000 casques bleus déjà sur place, est dotée d'un mandat "offensif", pour lutter, avec l'armée congolaise, contre les groupes armés, en première ligne desquels, le M23. La résolution 2098 du 28 mars dernier suggère des offensives "ciblées et robustes" destinées à "neutraliser" et à "désarmer" les groupes armés.
Plusieurs groupes opèrent dans l'est, notamment le M23, constitué principalement d'ex-mutins qui ont été réintégrés dans l'armée en 2009 avant de nouveau se rebeller en 2012 pour, disent-ils, protester contre le non-respect d'un accord signé avec le gouvernement. Une trentaine d'autres groupes armés prolifèrent dans cette région, essentiellement pour protéger d'importants intérêts particuliers dans l'extraction illégale de diamants, d'or ou de coltan, utilisé dans l'industrie de pointe et la téléphonie mobile. Des minerais qui sont ensuite exportés illégalement dans le monde entier, via les pays voisins (Burundi, Ouganda, Rwanda).
Le précédent mandat de la mission des Nations unies pour la stabilisation du Congo (Monusco) était axé sur la protection des populations, ce qui l'a souvent empêché d'intervenir aux cotés de l'armée régulière, suscitant frustration et animosité dans une large part de la population.
"La brigade ne changera rien"
Dans le camp de déplacés de Mugunga I, au milieu des tentes et des étals improvisés, Kahindi Noodle, 48 ans, explique d'ailleurs ne plus avoir confiance en la force onusienne : " D'où je viens, dans le Masisi, je m'étais installée à côté des soldats de la Monusco. Ils étaient là , pourtant, ils n'ont pas empêché les massacres de civils. (. . . ) La brigade ne changera rien".
L'enjeu est donc de taille pour les Nations unies, présentes en RDC depuis 15 ans, dont les concepts militaires se sont jusqu'à présent basés sur l'interposition et non sur l'intervention.
Aussi, cette brigade qui sera composée à part égale de Sud-Africains, de Malawites et de Tanzaniens avec, à sa tête, un général tanzanien, est très attendue. Une petite moitié du contingent, déjà sur place, a commencé à patrouiller dans la ville et sur l'axe stratégique entre Goma et Saké, localité située à une vingtaine de km à l'ouest de la capitale régionale où elle devrait être cantonnée.
Des patrouilles avec un double objectif; permettre aux militaires de se familiariser avec le terrain, et rassurer les populations impatientes.
"La brigade doit faire preuve de force pour éradiquer le M23. J'ai confiance", assure Théobald Buswagire, habitant du quartier de Ndosho, où un obus a tué un enfant, au cours d'affrontements en mai entre le M23 et l'armée régulière.
"Quand j'ai vu la brigade, je me suis dit qu'il allait y avoir du changement. J'ai vu leur munitions, ce sont de bonnes munitions ", affirme-t-il, ponctuant ses phrases de larges mouvements de tête.
Mais, interrogé sur la reprise des négociations de Kampala entre le M23 et le gouvernement congolais à l'occasion de sa première visite officielle dans la région cette semaine, le nouveau commandant de la Monusco, le général brésilien Carlo Alberto dos Santos Cruz, a rappelé que la solution politique était "extrêmement importante". "Tout le monde sait que la solution est politique (. . . ) La composante militaire demeure totalement synchronisée avec la composante politique", a-t-il dit.
Malgré tout, le général Cruz, a assuré que la force de l'ONU utilisera "tous les moyens possibles" pour lutter contre les exactions contre les civils. "Il est important de se souvenir que nous avons un mandat très clair et que la priorité demeure la protection des civils", a-t-il rappelé à l'occasion de cette première déclaration publique. 20131606 Jeuneafrique
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