En Centrafrique, les exactions ne sont pas tolérables, mais il faut laisser leur chance aux autorités de la transition, selon l'ancien Premier ministre Martin Ziguélé.
C'était il y a à peine plus de trois mois. Le 24 mars, les hommes de la coalition rebelle Séléka mettaient François Bozizé en déroute et Michel Djotodia lui succédait à la tête de l'État de Centrafrique. Depuis, Bangui a souvent paru sur le point de sombrer dans le chaos. Mais jamais Martin Ziguélé n'a regretté le président déchu. « Pour mon parti, le MLPC [Mouvement de libération du peuple centrafricain], un coup d'État n'est jamais une bonne nouvelle, insiste l'ancien Premier ministre, candidat malheureux aux présidentielles de 2005 et 2011. Nous l'avions dit en 2003, quand Bozizé avait pris le pouvoir, et nous le disons encore aujourd'hui. Il a joué avec le feu. Il a refusé l'application des accords de Libreville. Il est responsable de ce qui est arrivé. Nous aurions préféré que le changement se fasse par les urnes plutôt que par les armes, mais nous ne pleurerons pas sur lui. »
Martin Ziguélé, 56 ans, refuse de dire s'il briguera la magistrature suprême lors des élections qui seront organisées au terme des dix-huit mois de transition. Ce sera à son parti d'en décider, explique-t-il, « parce que le MLPC est structuré et que l'on ne se lève pas le matin en se proclamant candidat ». D'ailleurs, « chaque chose en son temps. Il est bien trop tôt pour en parler. L'important aujourd'hui, c'est la survie des Centrafricains ».
Chaos
Et les rapports en provenance de Bangui sont alarmants. Insécurité, pillages, exactions... Les autorités de la transition peinent à contrôler les troupes qui les ont portées au pouvoir. La situation n'est pas meilleure dans le reste du pays, menacé par endroits de pénuries alimentaires. « Cela va mieux qu'il y a quelques semaines, affirme Martin Ziguélé, mais le pays est dans une situation très difficile. Tous les jours des actes de violence sont perpétrés. Ce sont souvent des actes isolés, qui sont le fait d'hommes ou de femmes mal éduqués, mais si l'on n'agit pas, ce sera de pire en pire. Il faut que le gouvernement fasse davantage. » Pense-t-il que le président Djotodia a pris la mesure de la gravité de la situation ? « Il est à Bangui, il vit les choses en direct et rien ne permet de douter de sa volonté de trouver une solution. » Comprend-il que ce genre de propos puisse être interprété comme un soutien à la Séléka ? « Moi, je soutiens la transition, parce que je veux accompagner la Centrafrique dans sa marche vers la démocratie. Nous avons tous intérêt à ce que le gouvernement réussisse à restaurer la paix et la sécurité. »
Y parvenir sera une gageure. Le 2 juin, le ministre de la Sécurité publique, le général Noureddine Adam, ne s'est-il pas fait braquer à Notre-Dame-d'Afrique par des membres de la Séléka qui ne l'avaient pas reconnu ? « Il ne suffit pas de faire le constat du problème ou de condamner les exactions. Il faut agir ! »
Agir donc, mais vite. Le 24 juin, trois mois jour pour jour après la chute de Bozizé, il a suffi de quelques coups de feu et d'une présence militaire renforcée dans les rues de la capitale pour qu'un vent de panique ferme écoles et administrations et vide le centre-ville. 20131007 Jeuneafrique
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