Le gouvernement ivoirien sort les grands moyens, soldats et bulldozers , pour reconquĂ©rir la forĂȘt classĂ©e de NiĂ©grĂ©, dans le sud-ouest du pays, laissant sur le carreau des milliers de paysans qui l'exploitaient illĂ©galement depuis des annĂ©es.
EnclavĂ© au cĆur de cette forĂȘt tropicale s'Ă©tendant sur 10.000 hectares dans la rĂ©gion de Sassandra (environ 360 km Ă l'ouest d'Abidjan), le village de BalĂ©ko-NiĂ©grĂ© a Ă©tĂ© complĂštement rasĂ© lors d'une opĂ©ration, dite de "dĂ©guerpissement", menĂ©e tambour battant courant juin.
Maisons en dur, cases en terre mais aussi école, marché et église ont subi les assauts des bulldozers, tandis que des militaires armés parfois de lance-roquettes investissaient les lieux.
"Nous avons occupĂ© la forĂȘclassĂ©e Ă la recherche de nourriture", explique Ă l'AFP un des paysans qui l'occupaient, Raymond N'Dri Kouadio. Comme lui, beaucoup s'Ă©taient installĂ©s pour cultiver le cacao, dont le pays est le premier producteur mondial. DĂ©sormais, ce planteur, la mine dĂ©faite, "ne sait oĂč partir".
Certes, les villageois vivaient ici "clandestinement", mais "l'Ă©vacuation a Ă©tĂ© brutale et surprenante", soupire LĂ©on Koffi N'Goran, un octogĂ©naire.Un homme passe, chargĂ© d'un vieux matelas, prĂšs d'un vĂ©hicule militaire. Au total, au moins 20.000 clandestins auraient Ă©tĂ© chassĂ©s de BalĂ©ko et d'autres campements dissĂ©minĂ©s dans la mĂȘme forĂȘt.
Le pouvoir a Ă©voquĂ© un prochain recasement des clandestins, mais le plus grand flou rĂšgne. Beaucoup de villageois ont trouvĂ© refuge dans d'autres campements, souvent chez des proches."Le gouvernement a dĂ©cidĂ© de reprendre le contrĂŽle de ses forĂȘts classĂ©es, qui lui a Ă©chappĂ© pendant dix ans", a justifiĂ© le ministre des Eaux et forĂȘts, Mathieu Babaud Darret.
La CĂŽte d'Ivoire a connu une longue dĂ©cennie de tourmente qui a culminĂ© avec la crise postĂ©lectorale de 2010-2011 ayant fait quelque 3.000 morts.Durant cette pĂ©riode, de nombreux clandestins se sont installĂ©s dans des forĂȘts, pourtant thĂ©oriquement protĂ©gĂ©es en raison de leurs richesses vĂ©gĂ©tales et animales. Parfois des "seigneurs de guerre" y ont de facto privatisĂ© et exploitĂ© des zones entiĂšres.Pour le ministre, il faut enfin agir pour protĂ©ger de l'"exploitation abusive et illĂ©gale" les trois millions d'hectares de forĂȘts restants. 20131007 Jeuneafrique
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