La Côte d'Ivoire fête samedi le 50ème anniversaire de son accession à l'indépendance, mais ce qui devait être une grande fête populaire est pour de nombreux Ivoiriens trop éloigné de leurs préoccupations quotidiennes.
Pour ce cinquantenaire, les deux grands ponts qui relient le sud et le nord de la capitale économique Abidjan ont été parés aux couleurs nationales.
De même, à la Place de la République au Plateau, le quartier des affaires, sur les grandes artères et devant les services administratifs flottent des drapeaux.
Sans plus. Dans les quartiers populaires, Yopougon et Abobo, en passant par Adjamé, rien n'annonce ce grand événement. Dans la commune huppée de Cocody, l'appel du maire aux habitants, pour qu'ils mettent à chaque balcon ou devant chaque villa un drapeau ivoirien, ne semble pas avoir été entendu.
"Je suis triste et en même temps écoeuré que cela se passe ainsi", déplore le porte-parole du Rassemblement des républicains (RDR, opposition), Joël N'guessan.
Selon lui, les Ivoiriens auraient souhaité fêté en "grande pompe" cet anniversaire historique mais, s'empresse-t-il d'interroger : "à quoi cela sert de fêter quand on ne dispose pas du minimum vital pour se soigner, manger à sa faim, scolariser ses enfants, quand les jeunes se retrouvent au chômage, sans espoir d'avoir un jour du travail".
De fait, l'opposition s'est d'emblée opposée à l'organisation avec faste du cinquantenaire par le régime de Laurent Gbagbo.
"Le cinquantenaire est une bêtise. La priorité, c'est de rétablir l'image ternie de ce pays, rétablir la légalité constitutionnelle, redonner la légitimité au pouvoir", soutient le porte-parole du parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI, opposition), Niamkey Koffi.
Pour lui, "la meilleure façon de faire un bilan en ce qui concerne la Côte d'Ivoire actuelle, c'est d'abord de sortir le pays de l'impasse".
Emboîtant le pas aux politiques, les organisations de la société civile ont exigé la fixation d'une date pour la tenue effective de l'élection présidentielle, décrétant le 7 août " journée de recueillement" si la date du scrutin n'était annoncée avant la célébration du 50ème anniversaire.
Au sein des Forces nouvelles (ex rébellion), le chef d'état- major adjoint appelle à accorder la priorité à la réunification du pays par le règlement de la question de la démobilisation et de la réinsertion des ex-combattants minée par des problèmes financiers.
"J'aurais souhaité qu'on règle d'abord le problème des démobilisés et des miliciens avant de fêter le cinquantenaire en décembre", indique le commandant Issiaka Ouattara.
Dans les rues et les restaurants-buvettes communément appelés " maquis", c'est le budget du cinquantenaire qui fait monter la poudre aux nez des jeunes dont certains avancent le chiffre de quatre milliards de FCFA quand d'autres parlent de 20 milliards de FCFA.
"C'est du gâchis", lance un jeune, entre deux gorgées dans une gargote du quartier populaire de Yopougon. "C'est même une foutaise", renchérit son voisin d'en face qui égrène les problèmes d'emploi des jeunes et les conditions de vie difficiles des populations ivoiriennes.
Même au sein de "la galaxie patriotique", des partisans de Laurent Gbagbo ne décolèrent pas.
"Mettre 20 milliards de FCFA dans l'organisation du cinquantenaire est inopportun. La Côte d'Ivoire est dans une phase critique", estime Watchard Kédjébo, porte-parole de la coordination des mouvements patriotiques en ex zones rebelles et directeur de campagne de Laurent Gbagbo dans la région de Bouaké ( centre).
"Dans le monde entier, on fête tous les 50 ans, la liberté recouvrée dans les pays", se justifie le président Laurent Gbagbo martelant qu'un "jubilé se fête toujours", à l'ouverture du colloque international sur "l'indépendance et les perspectives en Afrique subsaharienne", présenté par les organisateurs comme le temps fort de la célébration du cinquantenaire en Côte d'Ivoire.
Outre le "message à la nation" du chef de l'Etat vendredi, la fête sera également marquée par une fresque mettant en scène près de 2000 artistes et des concerts de musique dans des quartiers d'Abidjan en attendant la cérémonie de prise d'armes au Palais présidentiel samedi.
Dans la foulée, le gouvernement a fixé le premier tour de l'élection présidentielle tant attendue au 31 octobre.
"Il appartiendra au président élu d'organiser la grande parade", indique le comité d'organisation qui souligne que les festivités du cinquantenaire couvrent toute l'année.
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