Alors que la médiation de l'UA tentée par Jean Ping entre les deux présidents proclamés Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara a été un échec, des membres de la communauté internationale (ONU, Cedeao, UE, États-Unis, France...) commencent à menacer personnellement Laurent Gbagbo et sa famille de sanctions. Et l'UA discute d'une éventuelle intervention militaire...
La pression internationale s'est considérablement renforcée vendredi 17 décembre sur le président sortant Laurent Gbagbo, sommé de quitter très rapidement le pouvoir au lendemain de violences meurtrières à Abidjan contre les partisans de son rival, le président élu Alassane Dramane Ouattara.
De onze à une trentaine de personnes, selon diverses sources, ont en effet été tuées jeudi et au moins 80 blessées, essentiellement lorsque des sympathisants de Ouattara ont tenté de marcher sur la télévision d'Etat, la RTI.
"Parodie de démocratie"
Nicolas Sarkozy, président de l'ex-puissance coloniale française - qui compte encore quelque 15 000 ressortissants dans le pays -, a prévenu que Gbagbo devait partir "avant la fin de la semaine". Sans quoi il figurera "nommément" avec son épouse Simone sur la liste des personnes visées par des sanctions de l'Union européenne (UE).
L'UE a exhorté l'armée à "se placer sous l'autorité" de Ouattara, reconnu par la communauté internationale comme le vainqueur de l'élection controversée du 28 novembre.
"Le temps presse", a averti quant à lui le département d'État américain, brandissant aussi la menace de sanctions.
De son côté, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a estimé que le maintien au pouvoir de Gbagbo conduirait à une "parodie de démocratie", mettant en garde contre toute attaque des troupes des Nations unies sur place (environ 10 000 éléments).
Enfin, la Cedeao (Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest) a appelé le sortant à transférer "immédiatement" le pouvoir au "président élu" Ouattara. Selon une information révélée par jeuneafrique.com hier, le président nigérian Goodluck Jonathan, actuel président de l'organisation, a envoyé une lettre au nom de la Cedeao à Gbagbo. Elle lui a été remise par le président de la Commission de l'Union africaine Jean Ping.
Échec de la médiation de Jean Ping
Ce dernier est arrivé jeudi soir à Abidjan pour une médiation "de la dernière chance", dans l'espoir d'éviter le pire à la Côte d'Ivoire, déchirée par une quasi-guerre civile en 2002-2003 et coupée en deux depuis lors. Il a rencontré les deux rivaux, mais n'est pas parvenu à un consensus. Laurent Gbagbo a simplement répondu "je suis le seul président élu" à la lettre de Goodluck Jonathan. Jean Ping s'est ensuite envolé pour Alger, afin de discuter avec le président Abdelaziz Bouteflika de la mise en place d'une éventuelle force d'intervention de l'UA en Côte d'Ivoire.
Vendredi après-midi, dans Abidjan quadrillée par les forces fidèles à Gbagbo, les partisans de Ouattara ne se sont pas mobilisés, malgré le fait que Premier ministre de Ouattara, le chef de l'ex-rébellion des Forces nouvelles (FN) Guillaume Soro, avait appelé la population à reprendre la marche sur la RTI, symbole et atout majeur du camp Gbagbo, ainsi que sur le siège du gouvernement.
Mais la capitale économique est restée calme, même si des tirs sporadiques d'origine indéterminée ont été entendus dans certains quartiers populaires. "C'est trop dangeureux pour sortir", confiait à l'AFP un militant au Golf hôtel, QG de Ouattara. Le quartier d'Adjamé (nord) offrait le même spectacle que celui de Yopougon (sud, fief de Gbagbo), avec de nombreuses patrouilles des forces de l'ordre.
Barrage
Les locaux de la chaîne étaient du reste cernés par un impressionnant déploiement de gendarmes, de membres des Forces de défense et de sécurité (FDS) et de policiers, avec un véhicule blindé garé à l'entrée.
Jeudi, les partisans de Ouattara n'avaient pas réussi à converger vers le grand bâtiment bleu, la progression des manifestants étant bloquée par des forces loyales à Gbagbo, qui ont dans certains quartiers tiré sur la foule.
Le gouvernement Ouattara n'avait pu sortir du Golf hôtel. Vendredi les FDS ont gardé le contrôle du barrage limitant l'accès à l'établissement, barrage que les FN n'avaient pas réussi à faire sauter la veille, malgré de violents échanges de tirs. (Avec AFP)
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