NAIROBI, 20 décembre (Xinhua) -- Cette année, alors que la crise économique continue d'avoir un effet néfaste sur plusieurs pays et régions, le continent le plus sous-développé du monde affiche une performance particulièrement bonne de sa relance.
Les données générales de l'économie affichent de l'optimisme, mais une série de défis intimidants doivent être abordés avant que le continent ne sorte de la crise sain et sauf.
DONNEES OPTIMISTES
Selon les Prévisions économiques régionales pour l'Afrique sub- saharienne publiées par le Fonds monétaire international (FMI) en octobre, la croissance du Produit intérieur brut (PIB) en 2010 est projectée à 5%, une hausse par rapport à la précédente prévision de 4,75%. Une nouvelle croissance de 5,5% devrait être enregistrée en 2011, d'après le FMI.
"Si ces statistiques venaient à se confirmer, la croissance économique dans la plupart des pays de la région connaitraient effectivement un rebond proche des niveaux élevés de la moitié des années 2000," a indiqué le rapport.
Le FMI a salué la forte résilience de l'Afrique pendant la crise, l'attribuant à la saine politique économique d'application. L'Afrique a enregistré une croissance stable, une faible inflation, et des équilibres fiscaux soutenables, une hausse des réserves de change extérieures et un recul de la dette publique avant la crise, donnant assez d'influence pour limiter les impacts de la baisse économique.
La Banque africaine de développement (BAD), se faisant l'écho de la position du FMI, s'est montrée aussi optimiste pour la relance du continent. Dans l'un de ses rapports économiques en octobre, la banque a indiqué que la production agricole en Afrique sub-saharienne a connu une croissance forte dans la seconde moitié de 2010.
Entre temps, la plupart des économies de la région sont sur une tendance baissière de l'inflation, qui a atteint son niveau le plus élevé en 2008 lorsque 27 économies sub-sahariennes ont enregistré une inflation à deux chiffres. Cette année, cependant, seuls six pays de la région devraient enregistrer une inflation à deux chiffres.
UNE REPRISE INEGALE
Bien que la photo d'ensemble s'annonce bonne, les pays d' Afrique sub-saharienne pourraient connaître différents destins au niveau de leur reprise en raison de leurs différentes situations économiques.
L'Afrique du Sud, le Nigeria, l'Angola, l'Ethiopie et le Kenya sont les "cinq grandes" économies de l'Afrique sub-saharienne, et représentent presque les deux tiers de la production totale de la région. Pour l'Afrique du Sud qui affiche le niveau le plus élevé de connectivité avec le monde, la crise a eu des conséquences sérieuses. En 2009, le pays a perdu plus d'un million d'emplois, devenant ainsi le seul pays sur les cinq à connaître une récession. Le pays continuera de souffrir si le gouvernement n'arrive pas à prendre des mesures immédiates et efficaces pour augmenter l' emploi et renforcer le bien-être social cette année et les années qui suivent.
Pour l'Angola, dont l'économie dépend beaucoup du secteur pétrolier, la chute des prix du brut sur le marché international provoquée par la crise a été dévastatrice. Sa croissance était de moins de 1% en 2009 par rapport à environ 13% en 2008. Cette année, alors que les prix du pétrole augmentent, la reprise des recettes liées à l'or noir devrait permettre à l'Angola d'afficher une croissance de 7%.
Par ailleurs, le Nigeria, l'Ethiopie et le Kenya connaissent une reprise régulière, la croissance du Nigeria devant atteindre 7,5% et celle de l'Ethiopie près de 10% en 2010/2011.
D'après les analystes, les pays africains avec moins de diversités économiques et une dépendance élevée d'un seul secteur rencontreront des difficultés plus grandes sur la route de la reprise. Le Botswana, où les exportations de diamants représentent un large segment de l'économie, fait partie de ces pays. En 2009, la croissance excluant le secteur minier a atteint 6,25%, mais l' expansion totale a été diminuée à seulement 3,75% en raison d'une baisse drastique de la demande en diamants sur le marché international. Pour les pays comme le Botswana, qu'une économie diversifiée puisse être structurée ou que le marché international puisse se réchauffer est vital pour la reprise dans l'année à venir.
DES DÉFIS IMPOSANTS
Lors de la crise économique mondiale, de nombreux pays développés et partenaires de développement de l'Afrique ont réduit leurs investissements et leur aide vers ce continent, et l' essentiel des afflux de capitaux a été dirigé vers un petit nombre d'industries clé et de pays. De plus, la baisse des échanges mondiaux à la suite de la crise a contraint un certain nombre de pays à adopter des mesures de protectionnisme, elles-même nuisant aux exportations de l'Afrique.
Des experts ont souligné que les plus imposants obstacles freinant la reprise économique africaine se trouvaient non pas au niveau extérieur mais à l'intérieur même du continent, la faiblesse des infrastructures et l'instabilité politique étant les plus notables.
Le retard des infrastructures africaines, caractérisé par un manque de structures routières, ferroviaires, portuaires, électriques et de communication, effraie un grand nombre d' investisseurs et partenaires de développements potentiels du continent.
D'après la Banque mondiale, l'Afrique aurait besoin pour se doter d'infrastructures de niveau mondial, d'une somme colossale de 93 milliards de dollars par an, alors que le montant actuel des dépenses consacrées dans ce but s'élève à 45 milliards de dollars seulement. Pour atteindre l'objectif d'efficacité nécessaire, 17 milliards de dollars pourraient être économisés, réduisant à 31 milliards de dollars l'ampleur minimale du fossé à combler.
De nombreux pays africains ont réalisé que les ressources de l' État étaient loin de suffire à couvrir cette différence, et par suite identifié la nécessité de mobiliser différentes ressources dont les partenariats public-privé afin de rassembler suffisamment de capitaux pour améliorer le niveau des infrastructures sur le continent.
Par ailleurs, vers la fin de cette année, les sources d' instabilité politique et les menaces pour la sécurité régionale, anciennes ou récentes, sont apparues comme un danger important pour le continent, ajoutant un nouvel obstacle à la reprise économique.
En Afrique de l'Ouest, la Côte d'Ivoire, plus important pays producteur de cacao, est embourbé dans une impasse politique opposant violemment deux présidents et deux gouvernements pour l' exercice du pouvoir. "La crise durable en Côte d'Ivoire risque d' entraîner encore plus d'Ivoiriens dans la pauvreté et d'affecter la stabilité et la prospérité économique de la sous-région d' Afrique de l'Ouest", estime un communiqué commun de la Banque mondiale et de la BAfD, ajoutant que les deux institutions comptent "réévaluer l'utilité et l'efficacité de (leurs) programmes dans ce contexte de défaut de gouvernance".
Dans l'est et le sud de l'Afrique, la situation volatile en Somalie continue de faire planer une menace sur la sécurité et l' activité économique régionales, tandis que le Zimbabwe, jadis grenier à blé de l'Afrique, peine à sortir son économie du bourbier dans le cadre de sanctions de l'Occident et de luttes politiques au sein du gouvernement d'unité.
L'année 2011 devrait être marquée par des élections présidentielles dans au moins 17 pays d'Afrique sud-saharienne, y compris le Nigeria, le Zimbabwe et Madagascar. Selon que la stabilité l'emporte ou non, leur issue devrait dans une large mesure déterminer si une reprise économique plus forte et un développement plus rapide pourront être réalisés au cours de l' année à venir.
french.news.cn/afrique