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Participation massive au référendum d'autodétermination du Sud - Soudan



Depuis dimanche dernier,
les Sud-Soudanais participent massivement au référendum sur leur indépendance.
La partition du plus grand pays d'Afrique est la tendance lourde qui s'imprime.
Une page importante de ce grand pays d'Afrique est en train d'être écrite.


Le Sud-Soudan, vaste région
sous-développée mais riche en ressources naturelles, a connu deux guerres contre
le Nord. La première de 1955 à 1972 et la seconde de 1983 à 2005. Elles ont fait
des ravages incommensurables : environ 2,5 millions de morts et au moins quatre
millions de déplacés.


L'accord de paix global ayant
mis fin à la sinistre guerre en 2005 a prévu la tenue d'un référendum
d'autodétermination du Sud le9 janvier 2011. Ainsi, l'histoire se répète. Les
Soudanais, qui ont choisi la séparation en 1956 de l'Egypte, se retrouvent
confrontés à une volonté de divorce de la part des Sudistes avec l'aide
manifeste de forces occidentales.


L'engagement que plusieurs
observateurs jugeaient impossible à tenir il y a encore quelques mois a
finalement été respecté. Pendant sept jours de scrutin, les Sud-Soudanais
exprimeront leur volonté.


Pour ces premiers jours,
l'affluence est au rendez-vous. En revanche, dans le nord du Soudan, c'est la
tristesse qui domine : plus de 115 000 Sudistes sont inscrits et la
participation reste très faible.


Près de quatre millions de
personnes sont inscrites sur les listes électorales. Les observateurs et les
médias sont unanimes. Ils pronostiquent une victoire de l'option sécessionniste.


Pour que le résultat du
référendum soit validé, il faudrait que 60% au moins des électeurs inscrits
votent. Les responsables politiques sudistes avaient exhorté la population à se
rendre en masse aux bureaux de vote dès le début du scrutin.


Le mot d'ordre semble être
suivi. Les résultats préliminaires sont attendus vers la fin janvier, mais ils
pourraient commencer à filtrer dès la semaine prochaine. Les résultats
définitifs sont prévus à la mi-février.


Le danger du précédent


Le référendum d'indépendance du
Sud-Soudan pourrait constituer un véritable précédent en Afrique, remettant en
cause les frontières héritées de la colonisation. Le fait que d'autres régions
puissent être tentées par la sécession ne manquera pas d'inquiéter.


Ce qui se passe au Soudan est
une première. Il n'y a jamais eu de référendum dans un pays africain permettant
à une partie de la population, à une région en particulier, de décider de son
avenir par rapport à une grande entité. Le choix populaire de rester dans le
cadre d'un Etat unitaire ou, au contraire, de se séparer à l'amiable ne fait
nullement partie des moeurs du continent.


Lors de la fameuse conférence
de Berlin, en 1885, les puissances occidentales s'étaient partagé l'Afrique.
Après la décolonisation au début des années 1960, l'Organisation de l'unité
africaine (OUA), ancêtre de l'Union africaine, est née.


L'organisation s'est donné pour
règle «l'intangibilité» des frontières héritées de la période coloniale. En
2005, résultat d'une sanglante guerre entre le nord et le sud du Soudan, la
règle est mise en cause. Un accord de paix reconnaît le droit des populations du
Sud à un référendum d'autodétermination.


Un scrutin qui pourrit mener à
terme à la partition du plus grand pays d'Afrique. Il y a certes le cas de
l'Erythrée qui s'était prononcée en 1993 sur son indépendance face à l'Ethiopie.
L'Algérie y avait d'ailleurs joué un rôle diplomatique non négligeable.
Cependant, à la différence du Sud-Soudan, c'est un retour aux sources, puisque
l'Erythrée avait déjà existé en tant que colonie italienne.


Fait marquant, le référendum en
cours se déroule dans les règles décrites par le droit international, avec
l'accord de Khartoum et une supervision internationale qui doit en contrôler la
crédibilité. Cependant, la symbolique produite aux yeux des éventuelles
sécessionnistes inquiète : «Il est possible d'obtenir le partage.»


Dans ce pays, les rebelles du
Darfour, en proie à la guerre civile, ont récemment appelé à la tenue d'un
référendum sur l'avenir de leur région. Dans quelques semaines, la possibilité
du démembrement du géant soudanais ne sera plus une vue de l'esprit.


De nombreux chefs d'Etat
africains ont déjà exprimé leurs réserves face à la sécession attendue de la
partie sud du Soudan. Si la reconnaissance du nouveau-né sud-soudanais par les
puissances occidentales semble être une lapalissade, en revanche, son
acceptation par certains voisins africains réfractaires au cauchemar d'un tel
scénario est plus circonspecte.


Abyei, la poudrière


En plus de la dichotomie
Nord-Sud, assez alambiquée, l'enclave d'Abyei risque d'aggraver la situation.
Cette zone est devenue au fil des ans une fixation pour le Nord et le Sud.


Et les ingrédients d'un
cocktail explosif sont loin de manquer : lutte pour l'accès aux sources
hydriques, rivalité historique, champs pétrolifères et différends ancestraux
entre tribus.


Au moment où le référendum se
déroule à quelques encablures de là, des affrontements entre les tribus rivales
Dinka et Messiriya font des dizaines de morts. Le fonctionnement
ethnosociologique risque d'en être fortement affecté.


La région, habitée
principalement par les Sudistes Dinka Ngok, est traversée chaque année par les
Messiriya dans leur migration vers le Sud-Soudan, en quête de pâturage.


Si le Sud fait sécession, les
Messiriya pourraient ne plus avoir accès à Abyei. Un référendum sur le
rattachement d'Abyei au Nord ou au Sud devait également avoir lieu. Le scrutin a
été repoussé en raison de multiples entraves dont un différend sur le droit de
vote. La loi référendaire accordait ce droit aux Dinka Ngok, qui estiment ne
plus avoir à faire de compromis, mais pas aux Messiriya.


Ces derniers ont promis de
faire capoter le scrutin en cas de non-participation. Les négociations pour
trouver une solution à la crise ont échoué. Les gouvernements du Nord et du
Sud-Soudan s'accusent mutuellement d'entretenir le pourrissement.


Pour l'instant, leurs armées
n'ont pas le droit de rentrer à Abyei, contrôlée par les forces de l'ONU et des
unités mixtes. La situation est tellement précaire qu'elle pourrait devenir
explosive.


Dans les tourments multiples et
complexes de ce pays particulier qu'est le Soudan, une conclusion s'impose.
L'histoire retiendra indéniablement que les gouvernants, héritiers d'une
géographie avantageuse, ont lamentablement échoué dans la transformation du
Soudan en nation.



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