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mobilisations sociopolitiques liées au temps mondial, d

YAOUNDE, 12 février (Xinhua) -- Vécus avec une très grande attention au Cameroun où des débats tiennent en haleine à l'exemple de celui organisé jeudi à Yaoundé sur le thème « Jeunesse et mobilisations sociales : entre logiques des acteurs et mutations sociopolitiques », les événements en Tunisie et Egypte sont liés au temps mondial, de l'avis de nombreux analystes interrogés par Xinhua.

« Il y a évidemment un phénomène qui est lié à ce qu'on appelle le temps mondial. Il faut rappeler que les mobilisations des années 90 en faveur de la libéralisation de la vie politique sont des mobilisations dont le temps a été mondial. Il y a eu une espèce de congruence d'un ensemble de phénomènes protestataires à toute l'Afrique subsaharienne, que certains situent d'ailleurs dans le sillage de la chute du mur de Berlin », a commenté le politologue Firmin Mbala.

Pour cet enseignant à l'Université catholique d'Afrique centrale (UCAC) à Yaoundé, dans la capitale camerounaise, les soulèvements populaires couronnés par la chute des régimes politiques en Tunisie e et en Egypte, deux pays d'Afrique du Nord, témoignent « des traditions protestataires qui existent dans ces pays et qui sont des traditions protestataires internationales dont se sont servis les pouvoirs de ces pays pour parfois éviter que les projecteurs soient braqués sur eux ».

« Je veux parler des mobilisations pro-palestiniennes dont sont familiers les groupes considérés, les mobilisations contre la guerre en Irak qui sont autant de mobilisations qui ont commencé à socialiser ce qu'on appelle la rue arabe à une tradition de protestation à laquelle s'ajoutent des ingrédients comme les mobilisations locales et des pré-réseaux et des pré-organisations », a-t-il précisé.

Après Zine El Abidine Ben Ali (au pouvoir depuis 1987) en Tunisie le 14 janvier à la suite d'une forte mobilisation populaire déclenchée mi-décembre, le départ précipité vendredi, au terme de près de trois semaines de résistance de la rue, du vieux raïs Hosni Moubarak (à la tête de l'exécutif égyptien depuis 1981) est perçu au sein de l'opinion publique camerounaise comme un phénomène révélateur d'un certain malaise voire une crise sociale comparable à d'autres pays du continent.

C'est le constat clairement établi par les conférenciers dont Firmin Mbala lors du débat « Jeunesse et mobilisations sociales : entre logiques des acteurs et mutations sociopolitiques » jeudi soir à Yaoundé, dans les locaux de l'Institut pour la gouvernance en Afrique centrale (IGAC), une structure privée nouvellement créée.

Chercheuse cette institution, Aline Messina Abéga s'est dite convaincue que « les mobilisations que l'on observe ne sont pas vraiment spontanées. Il s'agit d'une réponse très forte que la société donne à un fait qui était comme un clou sous le pied. C' est parce qu'il y avait un malaise, un grand malaise qui avait déjà pris forme dans le corps même de la nation et il était question pour les peuples tunisien et égyptien de prendre en main leur destin ».

A l'instar d'autres analyses entendues ça et là, cette diplômée en développement local s'inspire du cas des deux dirigeants maghrébins pour condamner la longévité au pouvoir qui caractérise d'autres leaders africains. « Il y en a qui sont là depuis une vingtaine d'années. Ce qui n'est pas normal dans un système qui se veut alternant. Mais, on constate bien qu'ils ont du souci à se faire ».

« Même s'ils ne le disent pas dans leurs discours, je suis sûre que les mobilisations qu'il y a en Tunisie et en Egypte sont des événements qui forcent la réflexion, qui devraient les amener à se soucier un peu plus de ce que le peuple pense », a insisté la chercheuse.

Ancien leader de l'Association pour la défense des droits du étudiants du Cameroun (ADDEC), sorte de syndicat estudiantin radical ayant parfois donné du fil à retordre aux autorités camerounaises, Mouafo Djontu, aujourd'hui diplômé en droit de l' homme et action humanitaire, y a trouvé un prétexte pour appeler les gouvernants africains à repenser les institutions pour les adapter au nouveau contexte, avec l'alternance comme système de gestion du pouvoir.

« L'alternance politique est un élément qui structure et enracine la démocratie dans un pays. Moubarak était là depuis plus de 30 ans, Ben Ali depuis plus de 20 ans. Les jeunes n'arrivaient plus à se retrouver dans ces leaders politiques dominants dans ces différents Etats. Cela peut justement poser le problème du type de démocratie que nous voulons aujourd'hui adapter en Afrique », a-t- il souligné.

Enseignant associé à l'Institut des relations internationales du Cameroun (IRIC), Laurent Mbassi a aussi relevé de son côté l' aspiration des peuples à un meilleur-être et un meilleur-vivre. « Nous avons tendance en Afrique à confondre le centre et la périphérie. Le centre, c'est de prendre en main notre destin et améliorer les conditions de vie de la population », a-t-il expliqué.

« Il y a une part de mécontentement populaire et ce mécontentement est dû à la dégradation des conditions de vie des populations. Lorsque vous mettez en conjugaisons deux données, à savoir la situation des droits de l'homme qui n'est pas toujours très reluisante d'une part, et d'autre part la crise de l'emploi, il est tout à fait légitime que l'on assiste à des formes de mécontentement », a-t-il poursuivi, parlant notamment des situations tunisienne et égyptienne.

Mais s'il se dit d'accord « pour qu'un certain nombre de systèmes qui ont perduré soient remis en cause pour être réformés », il insiste que cela se fasse « sous une impulsion interne, selon des visées, des approches, des convictions tout aussi internes ». D'après lui, lorsqu'on observe la manière dont un certain nombre de pôles internationaux, notamment les Nations Unies et quelques puissances, perçoivent et réagissent aux événements en cours, on est en droit de se demander s'il s'agit véritablement d'une évolution positive des rapports contemporains.

« Parce qu'en définitive, je pense que cela n'est pas assez souligné, la trajectoire historique d'un Etat dépend en premier lieu de ses seuls ressortissants. Bien sûr, nous vivons une époque où l'interpénétration entre les peuples, entre les Etats est assez développée. Je crois qu'il ne faut pas qu'on en arrive au stade de vider ou d'obérer presque complètement la notion de souveraineté », énonce l'analyste politique.

Certes, rappelle Firmin Mbala, « les régimes Moubarak et Ben Ali ont bâti leur assise sur une alliance extrêmement forte notamment avec un certain nombre de puissances occidentales sur l' idée qu'ils étaient des remparts à l'islamisme. Ils jouaient donc la politique du « moi ou le pire », « moi au l'islamisme ». Mais, analyse Mouafo Djontu, par ailleurs secrétaire général de l'IGAC, la posture de Occidentaux montre qu'ils sont de mauvais messagers.

« Avec l'exemple tunisien, la France ne peut pas parler avec autorité, vu l'histoire qui a lié l'autorité politique tunisienne et l'autorité politique française. Donc, je pense pour ma part que la communauté internationale doit comprendre que le monde évolue, les peuples prennent davantage conscience », avance-t-il.

« Je convoque par exemple ici le cas de l'ONUCI (Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire, ndlr) en Côte d'Ivoire pour dire que s'ils ont aujourd'hui une position tranchée en disant que Gbagbo doit partir, il faut aussi que quelque part ils prennent en compte la situation interne même du pays. Je ne pense pas l'ONUCI puisse avoir tous les éléments qui lui permettent de prendre des décisions véritablement au profit de la population. C'est pour dire qu'il faut soit assez critique pour savoir où est la limite », a renchéri Aline Messina Abéga.

Source: http://french.news.cn

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