Des politiques macroéconomiques propices ont favorisé la reprise en 2010. Des réformes structurelles plus profondes sont essentielles pour amplifier la croissance. Le FMI pense que la crise en Côte d'Ivoire menace la croissance économique et la lutte contre la pauvreté.
La reprise économique que connaît actuellement l'Afrique de l'Ouest est menacée par la crise politique qui persiste en Côte d'Ivoire. L'impact économique de la contestation des résultats des élections de l'an dernier sur l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et sur l'ensemble de la région va en s'aggravant.
D'après les estimations, la croissance économique de la zone UEMOA aurait retrouvé les niveaux enregistrés avant la crise financière mondiale et la flambée des prix alimentaires et énergétiques de 2007-08.
La croissance a bénéficié de mesures d'assouplissement monétaire et budgétaire, d'une production agricole satisfaisante, de la reprise chez les principaux partenaires commerciaux de la région, et d'un regain de l'activité économique en Guinée-Bissau et au Togo.
Dans le même temps, le taux moyen d'inflation est demeuré modéré dans l'ensemble des pays de l'UEMOA, malgré une légère poussée au deuxième semestre 2010. En moyenne annuelle, la hausse des prix à la consommation a atteint 1,4 %, contre 0,4 % en 2009.
Toutefois, plus récemment, l'augmentation des prix du pétrole et des denrées alimentaires a contribué à un réveil de l'inflation mais l'inflation sous-jacente, même si elle est en augmentation, reste modérée.
Si une solution rapide et non violente intervenait en Côte d'Ivoire et qu'elle s'accompagnait de politiques avisées, la région pourrait poursuivre sur la voie de la reprise. En effet, d'après les prévisions, l'activité économique de l'ensemble de la zone devait continuer de progresser pour atteindre près de 4½ % en 2011, après avoir totalisé 4 % l'année précédente et 3 % en 2009. Mais la stabilité politique de la région est une condition nécessaire pour que cette hypothèse favorable se réalise.
La persistance de la crise ivoirienne - qui s'est d'ailleurs intensifiée depuis quelques semaines - présente des risques considérables qui peuvent se transmettre par plusieurs canaux : échanges et transports, envois de fonds et migrations, ainsi que liens financiers.
Depuis la crise politique qui s'était déjà produite en Côte d'Ivoire il y a une dizaine d'années, les pays limitrophes ont établi d'autres itinéraires de transport, et, le commerce intra-régional étant limité, les dynamiques de croissance sont un peu moins interdépendantes. En revanche les liens financiers sont maintenant plus étroits, par le biais du marché obligataire régional.
La fermeture des locaux ivoiriens de la Banque centrale des États de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO), la banque centrale régionale, fin janvier, suivie mi-février par celle de la plupart des banques du pays, a plongé le système bancaire ivoirien dans le désarroi.
Depuis décembre 2010, pour limiter les risques de liquidité et de solvabilité du secteur bancaire de l'UEMOA, la BCEAO a prorogé l'échéance des titres publics ivoiriens arrivant à terme, qui sont détenus essentiellement par des banques de l'UEMOA.
Les pays limitrophes, et en particulier le Libéria, doivent faire face à un afflux de réfugiés qui pèsent lourdement sur des ressources déjà limitées. Si la crise ivoirienne s'enlise, les retombées économiques pour la région seront graves, ce qui aura un coût humain et financier élevé.
Une chute de la production en Côte d'Ivoire comme celle qui s'est produite en 2000 et 2002 pourrait faire passer la croissance moyenne de la région en dessous de 3 %, d'où une baisse du revenu par habitant et une augmentation de la pauvreté en Côte d'Ivoire, voire dans toute la région.
Outre la crise en Côte d'Ivoire, l'essoufflement de l'économie mondiale pourrait aussi ralentir la reprise en Afrique de l'Ouest par son effet sur les exportations, les transferts de fonds des migrants et les flux de capitaux. Une poursuite de la hausse des prix des denrées alimentaires et carburants représenterait une menace inflationniste à surveiller.
POUR ACCÉLÉRER LA CROISSANCE
Dans ses consultations régionales annuelles sur les politiques communes de l'UEMOA, le FMI note qu'il sera crucial d'accélérer les réformes engagées dernièrement et d'améliorer la compétitivité.
Outre la stabilité politique, un certain nombre de réformes seront essentielles pour stimuler la croissance : maintenir la stabilité macroéconomique, notamment en créant une marge de manoeuvre budgétaire pour les dépenses prioritaires, et ce en augmentant les recettes fiscales et en améliorant la qualité de la dépense ;
approfondir les marchés financiers ; améliorer la coordination des politiques nationales, notamment en améliorant la gestion des finances publiques par l'application en temps opportun des directives pertinentes ;
accélérer la mise en oeuvre des grandes réformes structurelles pour améliorer le climat économique, la gouvernance, et le fonctionnement du secteur énergétique.
Maintenir la stabilité macroéconomique : Les besoins en infrastructure sont importants et la politique budgétaire doit s'atteler à les combler. À moyen terme, la politique budgétaire aura pour tâche délicate de parvenir à combler les énormes déficits d'infrastructure tout en évitant une surchauffe de l'économie et en maintenant l'endettement public à un niveau viable.
La banque centrale doit se tenir prête à resserrer sa politique monétaire au cas où la montée des prix alimentaires et pétroliers viendrait à se répercuter sur l'inflation sous-jacente et sur les anticipations inflationnistes.
Les progrès louables accomplis dans la mise en oeuvre d'un nouveau cadre de politique monétaire doivent être confortés par des postulats analytiques complémentaires et par une stratégie de communication claire et transparente.
Approfondissement des marchés financiers : Même si les progrès accomplis jusqu'à présent sont réels, le rythme des réformes doit s'accélérer. Le ralentissement de l'activité économique en 2009 a dégradé la qualité des actifs détenus par les banques.
Pour renforcer la supervision, il faut recueillir plus rapidement les indicateurs de solidité financière et intensifier l'analyse de la stabilité financière. La contribution du secteur au financement de la croissance devrait être renforcée grâce à la poursuite des réformes institutionnelles, notamment celles qui vont dans le sens d'une utilisation simplifiée des garanties, de l'échange de renseignements, et de la transformation d'échéances.
Améliorer la coordination des politiques nationales : Les progrès vers les critères de convergence définis pour une union économique plus étroite ont été inégaux, et les réformes visant à favoriser l'intégration régionale doivent être accélérées.
Il convient de saluer les initiatives en cours pour clarifier certaines définitions des critères de convergence et pour améliorer la surveillance des arriérés de paiement intérieurs.
L'évaluation en cours du Programme économique régional 2006-10, qui comprenait un certain nombre de projets visant à améliorer l'intégration régionale, servira de base pour le programme qui suivra. Les projets régionaux doivent être définis en fonction d'analyses de rentabilité économique solides.
Accélérer la mise en oeuvre des grandes réformes structurelles : Il est primordial d'améliorer la compétitivité, en particulier sur des critères autres que les prix, notamment en améliorant les infrastructures (par exemple la fourniture d'électricité et le réseau routier), la qualité des institutions et l'intégration des échanges.
La persistance d'obstacles non tarifaires, comme les longs contrôles douaniers et les barrages routiers fréquents, pénalise les échanges intra-régionaux. Par rapport aux pays extérieurs à la région, la faiblesse au cours de l'année écoulée de l'euro - auquel est rattaché le franc CFA a en partie compensé l'érosion de la compétitivité des prix observée pendant la période précédente.
Bulletin du FMI en ligne
Source: http://fr.allafrica.com
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