ABIDJAN, 12 avril (Xinhua) -- Le président sortant ivoirien Laurent Gbagbo a été arrêté lundi en fin de matinée à sa résidence par les forces pro-Ouattara.
Au-delà des réactions diverses des populations, ou les anti-Gbagbo ont jubilé et les pro-Gbagbo ont fondu en larmes, les uns et les autres s'interrogent sur les perspectives de la Côte d'Ivoire après Gbagbo.
"Il faut tout d'abord reconnaitre que la page Gbagbo n'a pas été facile à tourner, car il a résisté avec ses forces spéciales", a fait remarquer Louis Adou, un étudiant résident à Yopougon.
Pour celui-ci, plusieurs facteurs ont joué en défaveur de Laurent Gbagbo : "Il y a eu d'abord la défection de ses généraux. Cela a agi sur son moral. Ensuite il y a le fait que les forces impartiales (l'ONU et les forces française Licorne) ont soutenu les forces pro-Ouattara à travers les frappes aériennes", a-t-il ajouté, estimant que la destruction des armes lourdes de Gbagbo par les frappes aériennes a affaibli son armée.
UNE ATTITUDE DE DEFIANCE
Pour une autre habitante, c'est l'entêtement de Gbagbo qui l'a fait perdre. "Il donnait l'impression d'être seul contre tous, car il n'a accepté aucun compromis. Son attitude de défiance vis-à-vis de la communauté internationale ne l'a pas arrangé. Il a balayé du revers de la main les recommandations des différentes médiations telles que les mesures contraignantes de l'Union africaine", a-t-elle énoncé.
"C'est après le refus de Gbagbo d'appliquer les mesures contraignantes de l'Union africaine (UA) que les forces de Ouattara ont décidé de prendre leurs responsabilités en passant à l'offensive", a renchéri le président de l'organisation de "jeunesse et démocratie" Parfait Goohoré.
"Il ne faut pas aussi oublier que l'opinion s'est braquée contre lui après le massacre des femmes à Abobo et les tirs meurtriers d'obus sur le marché par ses forces qui ont crée une vive émotion dans le monde", a-t-il soutenu.
Pour nombre d'observateurs, la victoire de Ouattara sur son rival est le résultat d'une longue marche mais surtout le fruit d'une coalition avec des alliés.
"L'appui des candidats de poids comme Henri Konan Bédié et Albert Mabri Toikeusse a été profitable à l'élection de Ouattara. Côté militaire, son Premier ministre et ministre de la défense Guillaume Soro a joué un grand rôle", a fait savoir Bertin Kouassi, enseignant.
Pour celui-ci, Guillaume Soro a profité de son statut de chef des forces nouvelles (ex rébellion) pour remobiliser les troupes et constituer les forces républicaines de Côte d'Ivoire (FRCI, forces pro-Ouattara) pour les mettre au service de Ouattara.
LES CHANTIERS DE OUATTARA
Maintenant que Ouattara a écarté son rival, il est en position de véritable chef d'Etat et doit s'atteler à réaliser ses chantiers.
Dans un premier temps, le président élu ivoirien devrait œuvrer à la normalisation des activités dans le pays notamment à Abidjan où les populations qui s'étaient terrées depuis plusieurs jours sont confrontées au manque de nourriture, d'eau, de soin et d'argent.
De l'avis d'un observateur, Ouattara se penchera, à la suite, sur la reconstruction et le développement du pays, mais cela devrait passer par la réconciliation nationale.
"Il y a une fracture ouverte entre le nord et le sud depuis plusieurs années. Il est impérieux d'agir pour la cohésion sociale pour que les ivoiriens apprennent à s'accepter et à vivre ensemble", a estimé celui-ci.
L'épisode Gbagbo est clos concernant le pouvoir d'état, mais des perspectives pourraient toutefois demeurer pour son avenir politique ou celui de son camp.
"Je pense que la majorité présidentielle (LMP, groupe politique de Gbagbo) ne va pas disparaître. Elle va se réorganiser, et continuer le combat de Gbagbo qui est le combat de la souveraineté nationale", a soutenu Georges Blé, chef d'entreprise.
"Avec le soutien des organisations panafricanistes, les leaders des jeunes de la LMP vont à l' avenir organiser des rassemblements anti-Ouattara. La LMP pourrait même devenir plus forte", a-t-il ajouté.
L'EPILOGUE DE LA CRISE
L'arrestation de Gbagbo est l'épilogue de plusieurs mois de crise et de tergiversations. Gbagbo a été capturé vivant selon les consignes de Alassane Ouattara à ses troupes. M. Ouattara s'est par ailleurs engagé à protéger l'intégrité physique de son rival, d'où le cordon de sécurité très verrouillé mis autour du président sortant et de son épouse après leur arrestation et leur transfert à l'hôtel du Golf.
Lundi en début de soirée, l'Onu avait soutenu que les gendarmes de l'Onuci allaient assurer la sécurité du couple Gbagbo.
De son coté, l'ambassadeur de la Côte d'Ivoire à l'Onu Yousoufou Bamba a souligné que Gbagbo est vivant et bien portant et qu'il sera "traduit devant la justice pour répondre de ses actes".
"Afin de construire un état de droit, je demanderai au Garde des sceaux, ministre de la justice d'engager une procédure judiciaire à l'encontre de M. Gbagbo, de son épouse et de ses collaborateurs", a déclaré le président élu ivoirien lui-même, dans une déclaration télévisée diffusée lundi soir.
La Côte d'Ivoire tourne ainsi une page et en ouvre une autre. "Une page blanche s'ouvre dans notre pays symbole d'espérance et de paix", a relevé le président Alassane Ouattara.
Toutefois pour plusieurs observateurs, la délivrance du pays qui a enduré de nombreuses souffrances ne sera totale que quand le pays sera uni.
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