Laurent, un destin ?

ABIDJAN, 15 avril (Xinhua) -- La crise post-électorale entre le président sortant, investi par le Conseil constitutionnel, Laurent Gbagbo et le président déclaré élu par la Commission électorale indépendante (CEI) et reconnu par l'ONU, Alassane Ouattara, a connu un nouveau rebondissement avec l'arrestation le 11 avril de M. Gbagbo par les forces pro-Ouattara, soutenu par les forces de l'ONU et la Licorne (force française).

Le bras de fer entre Gbagbo et Ouattara aura duré plus de quatre mois avec son cortège de difficultés et d'intrigues et aura tourné en faveur du second.

Doté des pouvoirs de president de la republique, Alassane Ouattara attend relever un certain nombre de défis pour la reconstruction, le développement, mais d'abord pour la normalisation du pays.

De l'avis de certains observateurs, le destin de Laurent Gbagbo assigné en résidence depuis mercredi dans une villa au nord du pays, à un impact inévitable sur l'évolution de la situation du pays.

LE SORT DE GBAGBO

D'ores et déjà, plusieurs schémas se présentent concernant le sort du président sortant ivoirien.

Alassane Ouattara a déjà annoncé les couleurs en affirmant avoir donné instruction au garde des sceaux ministre de la justice afin d'engager une procédure judiciaire contre le couple Gbagbo.

Ce qui porte à croire que le président sortant ivoirien doit être jugé par les juridictions ivoiriennes.

Toutefois, le chef d'Etat reconnu par l'ONU pourrait aussi saisir la Cour pénale internationale (CPI) comme certains de ses proches le réclament afin de juger M. Gbagbo qui est accusé d'avoir organisé des massacres de populations civiles.

C'est que la crise post-électorale ivoirienne a été beaucoup meurtrière, et les deux camps antagonistes se sont toujours rejetés la responsabilité des tueries.

Par ailleurs, d'autres observateurs pensent qu'il n'est pas exclu que Laurent Gbagbo soit maintenu en résidence surveillée pendant un long moment le temps que les esprits se calment et que l'on amorce le processus de réconciliation.

"Il y a certes la justice, mais je crois que nous, les Africains, avons notre manière de trouver des solutions à nos palabres en discutant entre nous. Pour taire les rancoeurs, le président Ouattara peut régler le problème à l'africaine", a estimé Martin N'Gbesso, expert en sociologie.

CALMER LES RANCOEURS

M. N'Gbesso s'est ainsi réjoui de l'engagement de Alassane Ouattara à former un gouvernement d'union en faisant appel à toutes les forces politiques et à la société civile, et souhaité que le camp Gbagbo, s'il est sollicité, d'entrer dans ce gouvernement pour véritablement calmer les rancoeurs.

"Une chose est sure : c'est à travers la gestion du cas Gbagbo que M. Ouattara va affiner ses capacités politiques car c'est un défi à relever", a-t-il souligné par ailleurs.

Tout comme lui, plusieurs observateurs sont d'avis que le président reconnu par l'Onu a été bien inspiré en ordonnant à ses hommes de maintenir Laurent Gbagbo en vie lors de son arrestation, et en promettant de lui réserver un traitement digne.

Pour ceux-ci, M. Ouattara a la réputation d'un homme compétent et intelligent. Il devra le prouver par la suite qu'il va donner à l'affaire Gbagbo.

"Selon les résultats de la CEI, Gbagbo a obtenu environ 46% des voix au second tour de la présidentielle. Ce n'est pas du tout négligeable. Cela montre qu'il a des partisans et qu'il faudra compter avec eux", a prévenu Joseph Séka, un responsable de jeunesse communale de Cocody (quartier résidentiel d'Abidjan).

Le destin de Laurent Gbagbo se trouve entre les mains de M. Ouattara devenu pleinement détenteur du pouvoir exécutif après l'arrestation de son rival.

Les regards sont ainsi tournés vers le président élu reconnu par l'ONU, qui devra jouer avec dextérité la carte de l'union.

"Il ne faut pas penser que l'on va écarter de manière systématique Laurent Gbagbo de la scène socio-politique. Il ne peut pas avoir de réconciliation nationale sans Gbagbo", avait déclaré le week-end dernier le leader de la jeunesse pro Gbagbo, Charles Blé Goudé.

De fait, la Côte d'Ivoire doit amorcer son redécollage, sa reconstruction et son développement économique sous la conduite de M. Ouattara.

UN TRAVAIL DE TITAN

En homme de conviction, celui-ci s'est engagé à relever plusieurs défis et à honorer ses promesses. Assurément, la réconciliation nationale demeure un défi voire un travail de titan.

Le pays est jalonné de plaies profondes qu'il va falloir panser pour recoudre le tissu social déchiré par la haine, la violence et des maux de toutes sortes.

"La réconciliation est possible. Les ivoiriens demeurent des frères et soeurs. Il suffi d'oublier le passé et de penser à l' avenir", a énoncé un élément des forces républicaines de Côte d'Ivoire (FRCI, forces pro-Ouattara) exhortant ses frères d'armes à respecter la consigne de M. Ouattara d'éviter tout acte de vengeance et de représailles.

La condition préalable de la réconciliation se veut ainsi la paix, si cette paix est activement recherchée par tous les Ivoiriens, qui ont été bouleversés ces dernières semaines, par l'intensification des violences.

Par ailleurs, le destin de Laurent Gbagbo, pour l'heure détenu au nord du pays, est attendu par les uns et les autres, convaincus que la situation de Gbagbo aura un reflet sur la suite des événements socio-politiques.

Le pouvoir Ouattara devra gérer avec tact le dossier estampillé "Gbagbo" pour écrire de manière effective la nouvelle page de la Côte d'Ivoire, axée sur la reconstruction, le développement et la relance économique.

La Côte d'Ivoire se trouve dans la tourmente depuis plus de quatre mois en raison d'une crise post électorale entre Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara.

La crise a connu un nouveau rebondissement lundi, avec l'arrestation de Laurent Gbagbo, son épouse et de plusieurs de ses proches.

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