ABIDJAN, 31 juillet (Xinhua) -- La chute de l'ex-président ivoirien Laurent Gbagbo le 11 avril dernier a entraîné une vague de départs en exil dans les rangs des militaires pro-Gbagbo.
Plusieurs ex-combattants parmi lesquels figurent des officiers de renom se sont ainsi retrouvés du côté du Ghana voisin et dans d'autres pays non encore identifiés.
A l'initiative de deux membres du gouvernement Ouattara, le ministre de l'Intégration africaine Adama Bictogo et le ministre délégué à la Défense Paul Koffi Koffi, un processus de retour de ces soldats semble être amorcé.
Quatre haut-gradés de l'Armée ivoirienne proches de l'ancien président ont ainsi regagné le pays vendredi en provenance du Ghana, après plus de 100 jours d'exil.
DES TRACTATIONS DANS L'OMBRE
Selon des observateurs, le retour de ces officiers est le fruit d'une diplomatie souterraine, notamment de longues tractations entre les autorités ivoiriennes et les autorités ghanéennes d'une part, et d'autre part entre les autorités militaires ivoiriennes et les soldats concernés.
Ces tractations qui se sont déroulés dans l'ombre ont abouti à un résultat plutôt tonitruant.
"Le Ghana a pris l'option de laisser partir les militaires ivoiriens exilés pour préserver sa stabilité", a estimé Elise Dia Lou, une juriste ivoirienne, indiquant que la stabilité de la sous-région était à l'ordre du jour lors de la récente visite du Premier ministre français François Fillon au Ghana.
Dans cette mouvance, les autorités sécuritaires ivoiriennes annoncent un retour progressif des militaires et civils ivoiriens exilés à l'extérieur depuis plus de trois mois.
"L'arrivée du colonel-major Boniface Konan, du lieutenant- Delafosse Oulai et des officiers Zoin Honoré et Sama sonne le retour de nos compatriotes qui sont à l'extérieur", avait déclaré vendredi le ministre délégué ivoirien à la Défense Paul Koffi Koffi.
L'un des ex-exilés, le colonel-major Boniface Konan, avait lui-même reconnu que leur retour au pays sains et saufs constituait un gage de confiance pour les autres exilés qui pourraient ainsi leur emboîter le pas.
L'ULTIMATUM DE OUATTARA
Toutefois, au-delà de la diplomatie menée, certains Ivoiriens soutiennent pour leur part que l'ultimatum du président Ouattara a été pour quelque chose dans ce retour au bercail.
Lors d'une rencontre avec le Haut commandement militaire le 21 juillet dernier, Alassane Ouattara avait invité les militaires, policiers, gendarmes, douaniers et agents des Eaux et Forêts en exil à rentrer avant la fin du mois, au risque d'être radiés des effectifs.
Le chef de l'Etat ivoirien avait rassuré les uns et les autres qui accepteraient de retourner quant à leur sécurité.
"Je constate que ces quatre officiers sont revenus au pays deux jours avant le délai donné par le président. C'est dire qu'ils n'ont pas voulu prendre le risque d'être renvoyés puisque le président de la République qui a lancé cet avertissement est le chef suprême des armées", a commenté un leader du Rassemblement des jeunes pour la démocratie et la paix (RJDP) d'Abobo (quartier populaire au nord d'Abidjan), Mamadou Sangaré.
Qu'il s'agisse de diplomatie, de négociation ou de menace, toujours est-il que l' absence remarquée de certaines têtes fortes de l'armée ivoirienne en exil a suscité des interrogations au sein des populations.
Des ex-combattants pro-Gbagbo à l'exemple du commandant de gendarmerie Jean Noël Abéhi, partis eux aussi en exil, n'aient pas du voyage retour organisé vendredi dernier.
Nombreux sont alors ceux qui se demandent si les autorités gouvernementales et militaires ivoiriennes réussiront à ramener le commandant Abéhi, parti du pays il y a plusieurs semaines pour une destination jusque là inconnue.
SIGNE D'APAISEMENT ?
Toujours est-il que le retour progressif des exilés ivoiriens est une réalité qui, pour certains habitants, apporte une bouffée d'oxygène en ces moments où les rumeurs de déstabilisation ont pignon sur rue dans le pays.
Des soldats supposés être au centre des actions de déstabilisation contre le régime Ouattara selon ces informations véhiculées de manière récurrente, font partie de ceux qui viennent de rentrer au pays.
"Je pense que le retour de ceux-ci est un signe d'apaisement. C'est un soulagement pour les personnes qui étaient tétanisées par la crainte de nouvelles violence", a énoncé Frérédic Edoukou, cadre du ministère ivoirien de l'Intérieur.
De l'avis de celui-ci, la fièvre de la rumeur ne tardera pas à tomber et plusieurs personnes croiront de moins en moins en la prophétie du religieux qui a prédit le chaos en Côte d'Ivoire, d'autant que les présumés acteurs de ce bouleversement sont pour la plupart de retour et vivent quotidiennement avec les autres.
"De mon point de vue, ces militaires sont officiellement en liberté mais en réalité sous surveillance des autorités, pour une question de vigilance", a-t-il évoqué.
Pour des observateurs, les "vaillants" soldats pro-Gbagbo encore en exil pourraient représenter toujours un danger, mais cela ne doit pas "gravement" alarmer l'opinion.
"Les autorités sont conscientes de cette psychose, et elles ont pris toutes les dispositions sécuritaires pour parer à toute éventualité", a énoncé un officier des Forces républicaines de Côte d'Ivoire (FRCI), sous couvert de l'anonymat.
Face aux rumeurs persistantes, le gouvernement ivoirien est monté au créneau, à travers une déclaration vendredi du ministre délégué à la Défense Paul Koffi Koffi et un communiqué samedi du Premier ministre Guillaume Soro, appelant les populations à la sérénité et au calme.
La Côte d'Ivoire retrouve de manière progressive la normalité, après une crise post-électorale aigüe qui a secoué le pays cinq mois durant et qui a occasionné au moins 3.000 morts et un million de déplacés.
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