17032012
IRIB
Transparency International insiste sur le fait qu’elle ne mesure pas la corruption mais sa perception.
D’après un rapport de Transparency International, les pays africains sont énormément touchés par la corruption. Nombreux sont ceux qui stagnent au fond du classement:. Parmi eux, la Somalie touche le fond.Transparency International (TI) a publié ce rapport en décembre 2011 qui classe 185 pays en fonction de la perception de la corruption. Elle a établi le classement IPC (Indice de Perception de la Corruption) grâce aux données de dix-sept études provenant de treize institutions indépendantes.
L’ONG a attribué des notes de 0 à 10, 0 étant le plus faible niveau d’intégrité des pays. La grille de critère est ciblée: accès à l’information, renforcement des lois anti-corruption, pots-de-vin au cours d’acquisitions publiques, corruption officielle… Transparency International insiste bien sur le fait qu’elle ne mesure pas la corruption mais sa perception.
Les dix pays africains les plus corrompus sont classés dans les vingt-cinq derniers du classement.
10 – Zimbabwe
Avec un indice de le Zimbabwe est l'un des pays qui a le plus régressé avec une chute de vingt places par rapport à l'année précédente. L'instabilité du pays, l'inefficacité du système judiciaire sous la pression du pouvoir exécutif, le manque de transparence, le non-respect des droits des femmes, les listes électorales gonflées de centenaires décédés, la corruption est omniprésente et sévit à tous les niveaux. En 2009, un rapport commandé par l'ONU intitulé Zimbabwe, les diamants et le mauvais côté de l'histoire est publié. La corruption et le non-respect des droits de l'homme y ont été dénoncés. Les troupes militaires ont pris le contrôle des mines, chassé les mineurs et forcé la population locale à y travailler. Un embargo sur les diamants a été érigé puis levé en 2011. Ces «diamants de sang» continuent de se vendre sur les marchés.
D'abord Premier ministre en 1980, Robert Mugabe a été élu président du pays en 1987. Depuis, il conserve durement sa place de leader. En 2008, il perd la majorité parlementaire mais réussi à conserver son poste avec le retrait de son opposant Morgan Tsvangirai, sous pression. Alors même que la pauvreté et le choléra ravage le pays, Mugabe ne lésine pas sur les moyens pour se faire plaisir, 750.000€ pour ses 88 bougies. Et à chaque anniversaire, ses partisans n'hésitent pas à collecter quelques dons de la part des entreprises.
9 – Guinée
En 2006, c’était le pays le plus corrompu d’Afrique et le quatrième du monde selon le classement IPC. Depuis, d’autres pays se sont incorporés au classement et la Guinée stagne toujours entre la 160ème et la 164ème place. Malgré tout, son indice a augmenté et se tient aujourd’hui à 2,1 point, toujours loin derrière le Botswana, premier pays africain avec 6,1/10.
8 – Angola
Ex aequo avec le Tchad, la RDC et la Libye, l’Angola tient la 168 ème place. Après 27 ans de guerre civile, la corruption est ancrée dans tous les domaines. En 2011, 70% de la population survivait avec moins de 2€ par jour. Pourtant, l’Angola est l’un des premiers producteurs de pétrole et Luganda, sa capitale, l’une des plus chère à vivre. José Edouardo Dos Santos est au pouvoir depuis plus de 30 ans, nomme son vice-président ainsi que les membres de la Cour Constitutionnelle, validant les lois. L’un des signes flagrant de corruption est une loi abrogée en 2010. Elle stipule que «toutes les terres appartenant à l’Etat peuvent être attribuées à des particuliers en fonction de projet d’intérêt national».
L’une des figures de la lutte contre la corruption est Raphaël Marques. Ce militant pour les droits civiques et journaliste indépendant, a créé l’ONG Maka Angola pour lutter contre la corruption dans son pays. Il a également réalisé une enquête démontrant comment l’Angola est devenu le site de transactions commerciales douteuses.
7 – Tchad
Bien que la corruption soit encore présente, le Tchad est le seul pays à progresser: il monte de deux rangs par rapport au dernier classement avec le faible score de 2 points. Cependant, tout est loin d’être acquis. Depuis 2011, le gouvernement tchadien a lancé une campagne anti-corruption dirigée par le ministère du Contrôle d’Etat et de la Moralisation. Trois membres du gouvernement sont tombés pour la passation douteuse d’un marché de fournitures scolaires ayant couté 2 milliards de francs CFA, soit environ 3 millions d’euros.
Nouveau rebondissement en cette année 2012. Fin février, le ministre chargé de ce ministère tombe lui aussi pour corruption. Il aurait détourné des milliers de dollars destinés… à la lutte contre la corruption. Arrêté, il nie être responsable de ce détournement. Selon une source policière, Ahmadaye Al Hassan aurait dérobé environ 360 millions de francs CFA, soit près de 550.000 euros.
6 – République Démocratique du Congo
La corruption est profondément ancrée dans la société en RDC. Selon l’économiste congolais Oasis Kodila Tedika, 55% des recettes du trésor public se volatilisent à cause de la corruption. Comme il le souligne, elle s’est inscrite dans les mœurs et touche la population à tout moment du quotidien.
Oasis Kodila Tedika prend comme exemple phare la situation des transports en RDC, conséquence directe de la corruption sur l’économie congolaise. Les taxis et taxis-bus sont contraints de payer régulièrement les forces de l’ordre pour pouvoir circuler : pour un simple contrôle de véhicule ou un droit de passage. 8% des recettes journalières sont prélevées, ce qui constitue une perte pouvant aller jusqu’à 60% de leur revenu moyen. En plus des retombées économiques, ce phénomène influe sur le trafic et crée un déséquilibre sur les transports en commun: embouteillages, contournements d’itinéraires…
5 – Libye
Ce pays est l’unique Etat du Printemps arabe de ce Top 10. Il a perdu 22 places par rapport au classement précédent. Après la chute de Mouammard Kadhafi, les milices ont pris le contrôle de la Libye et torturent en toute impunité. De nombreux villes et villages possèdent leur propre groupe armé. Ces différentes milices s’affrontent pour contrôler les routes et carrefour qui sont de véritable source de revenus. Elles imposent amendes, taxes diverses et droit de passage aux automobilistes. Le Conseil National de Transition élu fin 2011 va devoir faire ses preuves tant dans la lutte contre la corruption que dans l’encadrement de ces milices.
4 – Burundi
Phénomène social très répandu, la corruption s’est infiltrée dans tous les domaines, de la politique à la santé et la confiance dans l’Etat ne cesse de se détériorer. En février 2012, l’Union Européenne a demandé officiellement l’indépendance de la justice au gouvernement burundais. Le militant anti-corruption Faustin Ndikumana a été écroué deux jours avant cette annonce et il a été relâché quelques temps après.
Cette année, le gouvernement a sollicité l’aide de la Transparency International pour lutter contre la corruption. Au Burundi, l’accès au soin est mis à la mal à cause de la corruption. Fin février, le deuxième vice-président Gervais Rufyikiri a recommandé la création de comités de contrôles de l’état de la corruption dans les hôpitaux et au ministère de la Santé publique.
3 – Guinée Equatoriale
Teodoro Obiang Nguema est considéré comme l’un des chefs d’Etat les plus riches au monde. A la tête de la Guinée Equatoriale depuis 1979, il prépare son fils Teodorin à prendre la relève. La famille présidentielle est réputée mondialement pour ses frasques. Ministre de l’Agriculture et des Forêts, vice-président du parti au pouvoir, Teodorin fait l’objet de plusieurs enquêtes de blanchiment d’argent et de corruption aux Etats-Unis, mais aussi en France et en Espagne.
Le Sénat américain soupçonne un détournement de plusieurs milliards de recettes pétrolières nationales transférées sur un compte off-shore contrôlé par Teodoro Obiang Nguema. L’affaire des biens mal-acquis, très médiatisée, a été impulsée par une plainte de Transparency en ce début d’année et le fils du président est encore une fois dans le viseur de la justice. Mi-février, son appartement parisien a été perquisitionné: au total plus de 2.000 m² et de nombreuses œuvres d’arts.
2 – Soudan
Le Soudan a été sectionné en deux officiellement le 9 juillet 2011 avec l’indépendance du Sud-Soudan mais un seul et unique IPC a été calculé. Ravagés par la guerre, ces deux pays souffrent de la corruption. Principalement utilisée par les fonctionnaires, elle affaiblit l’administration et rend le budget laxiste. Aucun accès à l’information gouvernementale n’est proposé au public et les gouvernements se gardent bien de les filtrer.
Seulement une institution anti-corruption a été mise en place dans chacun des pays. Le Sud-Soudan a créé la commission SSACC en 2006. Elle n’avait aucun pouvoir de poursuite mais le gouvernement a assuré qu’elle aurait un nouveau statut courant 2011/2012. Cette année, les généraux de l’armée Sud-Soudanaise ont rencontré la SSACC afin de déclarer leurs revenus et leurs actifs. Les comptes de forces armées n’avaient pas été vérifiés depuis 2005. Un premier pas dans la lutte contre la corruption, reste à savoir si cette enquête portera ses fruits.
1 – Somalie
Ex æquo avec la Corée du Nord, la Somalie prend la dernière place du classement. Plongée dans la guerre civile depuis plus de 20 ans, la Somalie frôle le fond avec une note de 1/10. Le peuple somalien souffre de la famine et les différentes milices, notamment à Mogadiscio, rendent la vie insupportable pour la population. Un groupe d’observation des Nations Unies a affirmé que de nombreuses aides alimentaires ont été siphonnées par différents groupes armés. En janvier 2011, le gouvernement a voulu lancer une campagne anti-corruption dans l’administration sans grand effet. Tant que la situation géopolitique s’aggravera d’année en année, la Somalie ne parviendra pas à se débarrasser de la corruption et sa note continuera de se dégrader (chute de 0,1 point par rapport à l’ICP 2010).
Justine Gonsse