Recherche sur l'Afrique > Rapports et Articles de l'Afrique > Sahara : À quoi joue le royaume chérifien ?, par M. A. Boumendil

Sahara : À quoi joue le royaume chérifien ?, par M. A. Boumendil

21052012
Par cette attitude à tout le moins irresponsable, le Royaume chérifien pourrait parfaitement rechercher à pousser le Front Polisario à la faute, c'est-à-dire à reprendre les armes pour défendre les droits du peuple sahraoui.

Le gouvernement marocain a annoncé jeudi qu'il ne faisait plus confiance à Christopher Ross, l'accusant injustement de partialité. Aussi, ce dernier, auquel le secrétaire général de l'ONU a réaffirmé toute sa confiance, a annulé une visite aux territoires du Sahara occidental programmée de longue date.

C'est un rapport de l'ONU particulièrement critique à son égard qui a fait sortir le gouvernement marocain de ses gonds, n'hésitant pas à porter la responsabilité d'une grave crise diplomatique et d'un regain de tension dans la région. Le Royaume chérifien vient, une fois de plus, de donner la mesure de son entêtement et de sa volonté de faire barrage à toutes les solutions qui permettent au peuple sahraoui de présider à sa destinée, conformément au droit international qui consacre le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Par cette attitude à tout le moins irresponsable, le Royaume chérifien pourrait parfaitement rechercher à pousser le Front Polisario à la faute, c'est-à-dire à reprendre les armes pour défendre les droits du peuple sahraoui. Une telle situation revêtirait un caractère grave et aurait des implications incalculables sur la stabilité de toute la région déjà fragilisée par des difficultés économiques et des bouleversements politiques. Cela pourrait aussi remettre en cause les prémices d'un réchauffement des relations entre Rabat et Alger si nécessaire pour envisager la construction d'un ensemble nord-africain voulu et espéré par les peuples.

Le jeu marocain est particulièrement dangereux et néfaste. Il suffit, pour s'en rendre compte, de lire la presse marocaine, qui traduit assez fidèlement la position officielle du gouvernement. Ainsi, prenant comme prétexte le soutien de l'Algérie à M. Christopher Ross, et à travers lui à M. Ban Ki-moon et à la mission de l'ONU au Sahara occidental, la presse s'empresse de conclure que les dirigeants algériens sont "sortis du bois" et confirment leur qualité de "protagonistes" dans le conflit par "Front Polisario interposé". Elle en veut pour preuve le fait qu'en 2009, l'Algérie a désavoué le prédécesseur de Christopher Ross, le Néerlandais Peter Van Walsum, qui avait alors outrepassé ses prérogatives et failli à ses devoirs d'objectivité et d'impartialité. L'Algérie a d'ailleurs eu gain de cause tant la faute de l'émissaire onusien était évidente.

La vérité est que la presse marocaine, comme les dirigeants du royaume, sont gênés par une position algérienne constante, ferme et respectueuse du droit et des institutions internationales. Alors que l'Algérie considère, à juste titre, que le problème du Sahara occidental est un problème de décolonisation qui doit être traité comme tel, le Royaume chérifien n'a de cesse d'en faire "un conflit régional" impliquant l'Algérie comme protagoniste, malgré elle. L'attitude de la diplomatie marocaine lors des obsèques de l'ancien président de la République, Ahmed Ben Bella, condamnée unanimement même à l'intérieur du Royaume, montre sa fébrilité dès qu'il s'agit de l'Algérie. Les dirigeants du royaume savent pourtant que leur position est intenable et qu'ils ne doivent de faire perdurer l'injustice à l'égard du peuple sahraoui que grâce à quelques amitiés douteuses d'outre-Méditerranée. À quoi joue donc le royaume chérifien ?


Source: http://www.djazairess.com
  Envoyer cet article

Naviguer à travers les articles
Article précédent Oumar Sarr et Ousmane Ngom accusent la France et les Etats-Unis France : de la Coopération au Développement, quels changements pour la France en Afrique ? Article suivant
Les commentaires appartiennent à leurs auteurs. Nous ne sommes pas responsables de leur contenu.