Menaces pesantes

09072012
Alors que l’Afrique de l’Ouest s’apprête à envoyer une force régionale dans le pays, des groupes islamistes ainsi qu’Al-Qaëda au Maghreb islamique ont menacé d’attaquer les pays qui la composeraient.

« Agir avec fermeté et détermination », telle est la menace la plus récente d’Al-Qaëda au Maghreb islamique (Aqmi), contre l’intervention militaire africaine au nord du Mali. « Nous prévenons chacun, devant la tentation de tirer profit de la situation actuelle dans le nord du Mali en collaborant avec les forces étrangères qui guettent la région, que nous ne resterons pas les bras croisés et que nous agirons en fonction de situation avec fermeté et détermination », a affirmé samedi Mokhtar Belmokhtar, l’un des chefs d’Aqmi, cela dans un communiqué diffusé par l’Agence Nouakchott Informations (ANI), un média privé en Mauritanie. Un autre groupe armé présent dans la zone, le Mouvement pour l’unicité et le djihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), qui a revendiqué l’attentat meurtrier du vendredi contre une gendarmerie dans le sud de l’Algérie, a aussi menacé de s’attaquer aux pays qui composeraient une telle force ouest-africaine.

« Les branches du Mujao dans plusieurs pays sont prêtes à frapper les intérêts des pays qui ont l’intention de participer à la force de la Cédéao », a affirmé le porte-parole du groupe, Adnan Abu Walid Sahraoui.

En effet, les dirigeants de la Cédéao (Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) se sont réunis vendredi en sommet à Yamoussoukro, en Côte d’Ivoire, afin d’exhorter le Conseil de sécurité à accélérer le processus pour arriver à une résolution autorisant le déploiement de troupes au Mali. Les chefs d’Etat qui étaient présents dans la capitale politique ivoirienne autour de leur homologue Alassane Ouattara, président en exercice de la Cédéao, doivent envoyer rapidement une mission technique composée de militaires pour « préparer le terrain », et se sont alarmés de l’objectif des groupes terroristes de créer dans le Nord-Mali un sanctuaire et un centre de coordination pour les réseaux terroristes du continent. Les préparations de l’envoi éventuel d’une force, dont l’effectif est actuellement fixé à quelque 3 300 hommes, ont commencé depuis plusieurs semaines. Mais la Cédéao a besoin, avec l’Union Africaine (UA), d’un soutien international à une telle opération et d’un appui notamment logistique des Etats-Unis et de la France. Un premier projet a été jugé beaucoup trop imprécis au Conseil de sécurité de l’Onu, et la Cédéao revoit sa copie.

Les Etats-Unis ont d’ailleurs adressé cette semaine une mise en garde contre une « entreprise très lourde pour la Cédéao », qui devrait être « préparée très soigneusement et disposer de ressources en conséquence ».

En effet, depuis le mois de mars, les islamistes ont renforcé spectaculairement leur assise sur le Nord malien, qu’ils avaient conquis avec la rébellion touareg du Mouvement National de Libération de l’Azawad (MNLA). Le groupe islamiste Ansar Dine et le Mujao, considéré comme une dissidence d’Al-Qaëda au Maghreb islamique, veulent imposer la charia (loi islamique) au Mali. Ils tiennent désormais les places fortes du nord avec les djihadistes d’Aqmi, après avoir supplanté le MNLA, sécessionniste et laïque. Les dirigeants africains qui trouvent que la chute du Nord malien aux mains des groupes armés est due au putsch du 22 mars ont également haussé le ton face aux tâtonnements de la transition à Bamako, lancée après le putsch. Ils ont retiré au leader de l’ex-junte, le capitaine Amadou Haya Sanogo, le statut d’ex-chef de l’Etat qu’il avait obtenu il y a plus d’un mois. Et ils ont enjoint au gouvernement malien de transition, critiqué par la classe politique et la société civile à Bamako, et jugé à Yamoussoukro trop faible ou complaisant envers l’ex-junte, d'être plus inclusif.



Violents combats

Par ailleurs, et dans un nouveau et dangereux développement, au moins 35 personnes, dont des civils, ont été tuées dans les violents combats ayant opposé cette semaine les islamistes et les rebelles touareg à Gao, dans le Nord malien. La rébellion touareg (MNLA) a affirmé vendredi dans un communiqué avoir dénombré quatre morts et dix blessés dans ses rangs. Parmi les blessés, figure son secrétaire général Bilal Ag Achérif, évacué au Burkina Faso, pays médiateur pour une sortie de crise au Mali. Les combats ont été violents entre la rébellion et le Mujao. Ce dernier avait pris le contrôle de Kidal (extrême nord-est), Gao (nord-est) et Tombouctou (nord-ouest). A l’issue des affrontements, des habitants ont exprimé leur soutien aux djihadistes.

Le Mujao, issu d’Aqmi, a affirmé avoir infligé une lourde défaite au MNLA, qu’il a chassé de Gao et de Tombouctou. Selon plusieurs autres témoins, ce mouvement a également été contraint de se retirer jeudi dernier de ses dernières positions dans la ville de Tombouctou et ses alentours sur injonction d’Ansar Dine. Avec ses combats, les délégations qui passent cette semaine à Ouagadougou entre MNLA et Ansar Dine ne verront à rien. En outre, Ansar Dine a détruit samedi trois des mausolées de saints musulmans de Tombouctou, ville mythique classée patrimoine mondial en péril, ce que l’Unesco a qualifié de nouvelle tragique, alors que Bamako a dénoncé une « furie destructrice » et des actes assimilables « à des crimes de guerre ». Les actes commis par les groupes armés et qui sont condamnés mondialement pourront selon des experts dépêcher le processus d’une intervention militaire.

Sabah Sabet

Source:http://hebdo.ahram.org.eg
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