08102012
De grands espoirs en petits progrès, la politique américaine sur le continent
n'a guère évolué sous le premier mandat de Barack Obama. Mais les changements
intervenus après les révolutions arabes et les perspectives de croissance dans
la plupart des pays incitent Washington à réviser ses objectifs.
Les Africains espéraient chez lui un tropisme naturel, il a assuré le service
minimum. En trois ans et demi de présidence, Barack Obama, fils d'un Kényan et
d'une Américaine, ne s'est rendu que deux fois sur le continent : au Caire en
juin 2009 pour une ode au monde arabe ; et à Accra, un mois plus tard, pour
vanter démocratie et bonne gouvernance. Et puis plus rien, hormis la réception
ponctuelle de quelques chefs d'État en quête de photos-souvenir à la Maison
Blanche et de leaders de la société civile pour les 50 ans des indépendances
africaines. Les États-Unis se désintéresseraient-ils de l'Afrique ? Non, bien
sûr. Le continent n'est certes pas au coeur des priorités de leur politique
étrangère, mais il constitue une zone d'intérêt croissant où Hillary Clinton, la
secrétaire d'État, a effectué plusieurs tournées. À Washington, les dossiers
africains sont suivis par le département d'État (à savoir Johnnie Carson,
secrétaire d'État adjoint du bureau des Affaires africaines, Jeffrey Feltman,
son homologue pour le Proche-Orient et l'Afrique du Nord, et Susan Rice,
l'ambassadrice à l'ONU), le Conseil national de sécurité, le Pentagone et la
CIA.
Surprise par le Printemps arabe, la Maison Blanche a fini par épouser sa cause
en favorisant les changements de régime en Égypte et en Libye. Elle a investi
500 millions de dollars (386 millions d'euros) pour appuyer les transitions en
2011. Depuis longtemps, contrairement aux Français, les Américains discutent
avec les partis islamistes. Washington s'inquiète toutefois de la prolifération
des armes dans la région sahélo-saharienne depuis la chute de Kaddafi. Comme son
prédécesseur George W. Bush, Obama cherche à réduire l'influence des
djihadistes. Si la lutte contre les Shebab enregistre des progrès en Somalie, le
Sahel est un nouveau sanctuaire pour les terroristes. La recrudescence des
attaques de la secte Boko Haram au Nigeria est une autre inquiétude. Le géant
ouest-africain assure 8 à 9 % des besoins pétroliers américains, soit
l'équivalent des importations provenant d'Arabie saoudite. Washington redoute la
constitution d'un arc de cercle terroriste allant de l'Atlantique au Pacifique.
Construction
Alors que les troupes américaines ne sont pas les bienvenues, la Maison Blanche
assure une contribution multiforme (assistance en matériel, formation des
troupes, renseignement, actions ciblées contre des islamistes) pour aider les
gouvernements et les organisations régionales. Ce soutien s'articule autour du
Partenariat transsaharien contre le terrorisme et sa version militaire,
l'opération Liberté durable dans le Trans-Sahara menée par le Commandement
américain pour l'Afrique (Africom), basé à Stuttgart.
Presque 20 % des approvisionnements pétroliers américains proviennent d'Afrique,
où les majors texanes sont très implantées (Algérie, Libye, Nigeria, Angola,
Guinée équatoriale...). Une part qui n'a cessé de progresser depuis dix ans et
qui a dopé les importations des États-Unis, pour atteindre 74,2 milliards de
dollars en 2011. Les exportations vers le continent, quant à elles, sont passées
de 7 milliards de dollars en 2001 à 21 milliards de dollars en 2011. « L'Afrique
est un marché en pleine expansion », rappelle Johnnie Carson, qui a emmené en
février 2012 les grands groupes (Anadarko Petroleum Corporation, Chevron,
General Electric, Caterpillar...) en prospection dans quatre pays (Mozambique,
Nigeria, Tanzanie, Ghana). « Dans les dix à quinze prochaines années, le
continent va connaître un essor de la construction d'infrastructures - énergie,
routes, ports, chemins de fer. C'est important pour nos entreprises d'y
participer », précise Nils Tcheyan, directeur Afrique de General Electric.
Pour le reste, la doctrine américaine n'a pas évolué depuis Bill Clinton. « Nous
prévoyons de continuer à privilégier le financement des programmes qui
renforcent la démocratie, la bonne gouvernance et la primauté du droit, et de
promouvoir la participation des femmes et de la société civile », a expliqué
Johnnie Carson devant la Commission des affaires étrangères du Sénat, le 18
avril dernier. Régulièrement, Washington adresse bons et mauvais points. Le
président américain a reçu le 29 juillet 2011 ses homologues Boni Yayi (Bénin),
Mahamadou Issoufou (Niger), Alassane Ouattara (Côte d'Ivoire) et Alpha Condé
(Guinée). « Tous ces dirigeants ont été élus lors d'élections libres et justes
», a-t-il justifié. Cette année, l'administration américaine a appelé le
président Wade à respecter les institutions et le verdict des urnes. Carson a
déploré que la présidentielle camerounaise ait été entachée d'irrégularités. Une
façon de justifier l'aide américaine à l'émergence de sociétés civiles
dynamiques, seuls véritables contre-pouvoirs de régimes jugés autocratiques.
Onze présidents règnent en Afrique depuis plus de quinze ans. C'est visiblement
trop pour Washington, qui préconise la limitation de la durée des mandats.
Source: http://www.jeuneafrique.com
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