Dévoilée par une poignée de journaux dans le monde, la base de données récupérée par l'International Consortium of Investigative Journalist, qui contient des millions d'informations sur des sociétés basées dans les paradis fiscaux, révèle ses premiers noms. Parmi eux, certaines personnalités nigérianes, djiboutiennes tanzaniennes et zimbabwéennes ressortent.
Ahmed Gulak, conseiller politique du président
Goodluck Jonathan, figure sur cette liste
Les informations arrivent de manière parcellaire, mais c'est un véritable
tremblement de terre dans le monde de la finance. Des millions de courriers, des
centaines de milliers de sociétés, et des milliers de noms, reliés à des paradis
fiscaux, sont révélés au compte goutte par une poignée de journaux sélectionnés
à travers le monde par l'International Consortium of Investigative Journalist
(ICIJ). L'organisation, créée en 2011 et composées de 86 journalistes
d'investigation répartis à travers le monde, a récupéré il y a quinze mois ce
qui s'apparente à la plus grande fuite de l'histoire, l'équivalent de 162 fois
Wikileaks, soit 260 gigabits de données. Baptisé Offshore Leaks, le contenu a
été fourni par les anciens salariés de deux entreprises de services financiers
offshore, Portcullis TrustNet et Commonwealth Trust Limited. Ces dernières ont
aidé à la création de centaines de milliers de sociétés, à partir de la fin des
années 1990 et tout au long des années 2000, dans les îles Vierges britanniques,
aux Caïmans, aux îles Cook, aux Samoa, et à Singapour.
Blanchiment
Après un travail de fourmi réalisé par les enquêteurs de quelques journaux dont
Le Monde en France, The Guardian en Angleterre, ou encore le Premium Times au
Nigeria, les noms de personnalités, d'hommes d'affaires, de trafiquants d'armes
ou parfois même d'agriculteurs (Grèce) ou de hackers (Italie), sont révélés
depuis jeudi 4 avril. Dans cette galerie de portraits éclectiques, quelques noms
africains ressortent déjà. C'est le cas au Nigeria, où le Premium Times prévient
: « Le conseiller politique spécial du président Goodluck Jonathan, Ahmed Gulak,
est en haut d'une liste qui ne cesse de grossir, de personnalités politiques et
du monde des affaires qui ont détenus ou détiennent encore des compagnies
secrètes et des comptes en banque offshore où ils cachent leur fortune pour
échapper à l'impôt, blanchir de l'argent ou commettre des fraudes. »
Ramifications
Ahmed Gulak, proche du président et homme d'affaires diversifiés notamment dans
la fourniture de matériel militaire pour le gouvernement, détient les clés
d'Erojim Group of Companies, basé à Lagos mais aussi aux Iles Vierges
britanniques. Dans cette même liste apparaissent Edmund Daukuru, ancien ministre
du Pétrole, et Bello Gwandu, un homme politique du parti au pouvoir, ancien
directeur de Nigeria Ports Authority. Tout deux siègent au Conseil
d'administration de Caverton Offshore Support Group, ayant elle aussi des
ramifications dans les Iles Vierges Britanniques.
Instabilité politique
De l'autre côté du continent, à Djibouti, l'homme d'affaire et opposant
malheureux à l'élection présidentielle de 2011, Abdourahman « Charles » Boreh,
actuellement exilé à Dubaï, possède lui deux sociétés dissimulées : Net Support
Holdings Ltd aux Iles Vierges Britanniques et Value Additions Ltd aux Iles
Samoa. Interrogé par l'ICIJ, M. Boreh a indiqué utiliser ces compagnies pour
piloter ses investissements à travers le monde afin de mettre ses actifs à
l'abris d'une éventuelle instabilité politique. En Tanzanie, Mehbub Yusufali
Manji, issu d'une des familles les plus riches du pays à la tête d'un
conglomérat (Quality Group Limited) diversifié dans l'automobile ou
l'agroalimentaire, était, de 2007 à 2009, directeur et actionnaire d'Interstrade
Commercial Services Limited basé aux Iles Vierges. Toujours dans le même paradis
fiscal, l'ICIJ a remonté la piste d'Artemis Group, qui appartient en réalité au
Zimbabwéen Conrad Billy Rautenbach, un proche du président Mugabe. Blacklisté
par les États-Unis car soupçonné d'aider le régime à détourner l'argent du pays.
D'après son avocat, Ian Small Smith, l'entreprise qui aurait servi à investir en
Russie, n'existe plus.
Si la liste des personnalités africaines risquent de s'allonger dans les jours
qui viennent, elle n'apportera peut être pas toutes les réponses aux multiples
questions qui se posent désormais : à quoi servent concrètement ces sociétés ?
Simple optimisation fiscale ou fraude ? Détournement ? Blanchiment ? Sûrement un
peu de tout ça à la fois...
Source: Jeuneafrique.com
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