Le gouvernement malien et les rebelles touaregs ont signé le 18 juin un accord préliminaire en vue de l’organisation de l’élection présidentielle à Kidal. Pour certains Maliens, cet accord sert davantage les intérêts des rebelles que ceux du pays. Tiébilé Dramé, émissaire de Bamako lors des négociations et probable futur candidat au fauteuil présidentiel, revient pour "Jeune Afrique" sur la signature de cet accord.
Tiébilé Dramé, le 8 juin 2013 à Ouagadougou.
Jeune Afrique : Pourquoi les négociations ont-elles été
aussi longues et tumultueuses ?
Tiébilé Dramé- Dans certains pays, ce genre de négociations prend des
mois et des mois, et au Mali, les gens s’étonnent qu’on ait discuté pendant onze
jours ! Nous sortons d’une crise profonde durant laquelle les trois-quarts du
pays ont été occupés par des groupes rebelles armés. La rébellion touarègue a
ouvert la voie à des terroristes fanatiques qui ont asservi notre peuple dans un
régime moyen-âgeux. Il est normal, à partir du moment où nous avons décidé de
nous parler, que cela nous prenne un peu de temps. Je trouve même que nous avons
été plutôt rapides.
Le 12 juin, vous avez refusé de signer le premier projet
d’accord accepté par les rebelles touaregs. Pourquoi ?
Les autorités maliennes tenaient à ce que les résolutions internationales du
Conseil de sécurité de l’ONU soient prises en compte. Et notamment la résolution
1820 qui mentionne la lutte contre l’impunité ou la résolution 2100 qui proclame
l’intégrité territoriale et l’unité nationale du Mali tout en exigeant le
désarmement des groupes armés.
Quand l’armée malienne se rendra-t-elle à Kidal ?
Les experts militaires sont en train de travailler (à Ouagadougou, NDLR) sur les
modalités concrètes du retour de l’armée malienne à Kidal. Dès qu’ils auront
terminé, les premiers éléments militaires maliens entreront dans la ville. Ce
qui devrait arriver dans les jours qui viennent.
Quel sort sera réservé aux rebelles poursuivis par la
justice malienne et qui sont également signataires de l’accord ?
L’accord n’évoque pas le cas des individus qui font l’objet d’un mandat d’arrêt
parce que cela relève de l’autorité judiciaire. Nous n’avons pas souhaité
interférer dans ce domaine. Et, jusqu’à preuve du contraire, le procureur de la
République n’a pas changé d’avis sur la question.
Est-ce compliqué d’être émissaire du gouvernement malien
aux négociations et certainement candidat à l’élection présidentielle ?
C’est une mission ponctuelle, que j’ai acceptée à la demande du président de la
République Dioncounda Traoré. Cette tâche m’a occupé jour et nuit pendant un
mois. Dieu merci, nous avons débouché sur un accord préliminaire qui permettra
l’organisation de l’élection présidentielle à Kidal dans des conditions de paix
et de sécurité. C’est le plus important.
Êtes-vous satisfait du travail accompli ?
Nous avons franchi une étape importante sur le chemin de la restauration de la
paix et de la stabilité au Mali. Il faut maintenant s’atteler à consolider la
cohésion nationale et à réconcilier les communautés du Nord. Il nous reste
encore beaucoup à faire. Mais je suis optimiste car le Mali est un peu comme
l’empereur Soundiata Keïta : quand il s'est relevé après être resté à terre
pendant des années, il a fait des pas de géant et fondé notre beau pays. Vous
verrez, le Mali débout et réconcilié étonnera l'Afrique et le monde !
___
Propos recueillis par Baba Ahmed, à Bamako
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