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Égypte : la spirale de la violence

Trois attentats ont tué neuf personnes, lundi 7 octobre, au lendemain de heurts ayant fait 51 morts civils, en marge de manifestations islamistes essentiellement au Caire. L'un des attentats, une voiture piégée qui a tué trois personnes dont un policier, devant un commissariat de police à Al-Tur, a été perpétré dans le sud de la péninsule du Sinaï, au coeur des stations balnéaires de la mer Rouge, dont la célèbre Charm el-Cheikh, où les touristes sont pourtant de retour après une longue absence.



 

À Ismaïliya, sur le canal de Suez, six soldats ont été tués par des inconnus qui ont ouvert le feu sur leur patrouille, dans une région qui, comme le Sinaï, est en proie à une multiplication des attaques de groupes islamistes, dont certains ont fait allégeance à Al-Qaïda. Enfin, dans la nuit, des roquettes ont endommagé une gigantesque antenne d'un centre de communication satellitaire à Maadi, un quartier aisé du Caire.

Ces attaques interviennent au lendemain de manifestations réclamant le retour du président Morsi au cours desquelles au moins 51 personnes ont trouvé la mort, dont 47 au Caire. Autorités et islamistes s'accusent mutuellement d'avoir ouvert le feu. Dimanche au Caire, les manifestants pro-Morsi, "pacifiques" selon eux, ont "été attaqués de sang-froid par les forces du coup d'État qui ont tiré pour tuer", a affirmé lundi l'Alliance pour la Démocratie et contre le coup d'État, une coalition menée principalement par les Frères musulmans.

"Des heurts ont éclaté entre des résidents et des Frères musulmans" qui ont "utilisé des armes et de la chevrotine, faisant 47 morts", a pour sa part déclaré le ministère de l'Intérieur dans un communiqué, ajoutant : "Les forces de sécurité ont réussi à s'interposer et contrôler" les affrontements. "La police a fait usage uniquement de gaz lacrymogènes", a affirmé à l'AFP le général Ayman Helmi, porte-parole du ministère.

Des journalistes de l'AFP ont quant à eux constaté que des résidents provoquaient, voire tiraient sur des manifestants quand ils passaient dans leurs quartiers. Des policiers, certains en civil, auraient ouvert le feu à plusieurs reprises sur les manifestants. Après une trêve relative dans les dispersions extrêmement sanglantes de leurs rassemblements par les soldats et les policiers, cette nouvelle hécatombe suivie des attentats de lundi fait redouter une surenchère de violences de la part de groupes radicaux.

Les Frères musulmans déterminés

Mohamed Morsi, premier président élu démocratiquement en Égypte, a été destitué et arrêté le 3 juillet par l'armée après que des millions de manifestants eurent réclamé son départ, lui reprochant d'accaparer les pouvoirs au profit de sa puissante confrérie des Frères musulmans et de vouloir islamiser de force la société égyptienne. Depuis le 14 août, les autorités mises en place par les militaires ont tué plus d'un millier de manifestants pro-Morsi et arrêté plus de 2 000 Frères musulmans, dont la quasi-totalité de leurs leaders.

En dépit de cette répression implacable dont ils sont la cible, les partisans du président déchu ont juré d'intensifier leurs manifestations contre le "coup d'État". Les pro-Morsi ont appelé "tous les Egyptiens à manifester massivement dans des marches non-violentes", en particulier vendredi. "Personne ne pourra nous en empêcher (...) quels que soient les sacrifices à consentir", ont-ils revendiqué dans un communiqué.

La stratégie des Frères musulmans est de montrer "qu'ils sont toujours là et qu'ils sont une force capable de mobiliser les masses", commente Shadi Hamid, spécialiste de l'Égypte au Brookings Doha Centre. Ils veulent selon lui démontrer "qu'il n'y a pas de stabilité possible sans eux et que, si vous essayez de les exclure, cela va miner le redressement économique de l'Égypte". Pour cela, "ils n'ont pas vraiment d'autre choix que de continuer à manifester le plus longtemps possible", conclut l'expert.

L'armée, le gouvernement, la quasi-totalité des médias et une large majorité de la population qualifient de "terroristes" les Frères musulmans, qui avaient largement remporté les législatives fin 2011. Alors que le pays est sous état d'urgence depuis le 14 août, que la capitale est soumise à un couvre-feu nocturne et reste parsemée de barrages de militaires équipés de blindés, le déploiement des troupes est encore plus impressionnant depuis dimanche que d'ordinaire. L'Égypte risque non seulement de glisser sur une pente meurtrière, mais également vers la crise économique, au moment même où les pays occidentaux commencent à autoriser de nouveau les voyagistes à proposer le pays comme destination touristique.


Source: Jeune afrique

 

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