Le trouble jeu de la France en
Centre-Afrique :
n’est-elle plus qu’une simple compagnie de CRS de l’Oncle Sam ?
Comme nous le craignions dans nos précédentes éditions, le scénario à
l’ivoirienne semble dramatiquement se répéter en République Centrafricaine. Une
fois de plus la France intervient militairement avec le blanc-seing de l’ONU,
pour officiellement mettre fin à des massacres de civils et « sauver des vies
humaines », selon son super-président François Hollande et le Ministre des
Affaires Étrangères, le philanthrope Laurent Fabius.
Charitables déclarations et louables intentions qui masquent difficilement la
responsabilité et surtout l’implication de Paris, dans la déstabilisation de ce
pays, majoritairement chrétien, livré à une rébellion musulmane venue du Nord.
Pourquoi en effet avoir tant tardé pour intervenir, alors que la France
maintient sur place une force militaire et ne peut ignorer les affrontements
meurtriers opposant depuis de nombreux mois des groupes d’autodéfense de
villageois, surnommés « anti-balaka » (ou anti-machettes) à l’ex-rébellion
Séléka. Une alliance de groupes hétéroclites arrivée justement au pouvoir en
chassant l’ancien président Bozizé en mars 2012… avec la bénédiction tacite de
Paris ! Alors volonté politique ou impuissance diplomatique ?
Les enjeux de cette nouvelle opération militaire française, baptisée Sangaris,
semblent multiples.Bien que classé parmi les pays les plus pauvres de la
planète, en raison de son instabilité, la Centre-Afrique dispose de riches
ressources en bois, or, diamants et uranium. Les nouvelles forces armées
centrafricaines qui ne sont en réalité qu’un ramassis de milices incontrôlées
n’obéissant qu’à des seigneurs de la guerre locaux, mettent le pays sous leur
coupe réglée. Sous couvert d’intervention humanitaire et de sécurisation d‘une
région, que la France a pourtant sacrément contribué à perturber depuis 2011,
notamment en Libye et en Côte-d’Ivoire, Paris cherche surtout à s’assurer du
contrôle des ressources. Quitte pour cela à conforter un pouvoir minoritaire et
illégitime, en désarmant des milices chrétiennes qui chercheraient à se venger
sur des populations musulmanes, notamment d’origine Peules, des multiples
exactions, violences et pillages à répétition dont elles sont victimes. Rien de
mieux en tout cas pour attiser un conflit ethnico-confessionnel que de croire
qu’un gouvernement d’obédience musulmane puisse diriger un pays comportant 80 %
de chrétiens. À ce stade, ce n’est plus de l’incompétence mais une réelle
politique de tension permanente et les masques tombent enfin, malgré les grandes
déclarations de principe prononcées lors du sommet sur la sécurité et la
coopération qui se tient actuellement .
Paris semble avoir lâché l’Afrique. Ou en tout cas s’être mis en retrait au
profit du bloc atlantiste, États-Unis en tête, qui entendent diriger les
opérations et superviser progressivement l’ancien pré-carré français. La
Françafrique semble avoir cédé le pas à l’Américafrique comme le déclare Patrick
Mbemko, auteur de plusieurs ouvrages de géopolitique.
Le projet est dorénavant connu : remodeler le monde en fonction de la nouvelle
guerre économique mondiale qui a débuté, et dont l’Afrique sera l’un des champs
de bataille, au propre comme au figuré. Aucun pays ne pourra rester neutre et
les chefs d’état africains n’ont guère le choix. Soit ils alignent leurs pays
sur les visées atlantistes et ils se maintiennent au pouvoir. Soit ils passent
outre et ils se retrouvent dans le camp des parias, mis à l’index des nations «
éclairées » et s’exposant à des rébellions qui trouveront toujours,
miraculeusement, les fonds nécessaires pour armer et entretenir une troupe de
plusieurs milliers d’hommes, capables de mettre en échec les armées nationales.
Le but est clair : verrouiller au plus vite le continent africain face à
l’avancée commerciale des pays émergents comme la Chine, la Russie ou le Brésil.
Pour cela il faut s’approprier rapidement les terres agricoles, les ressources
énergétiques ou l’exploitation des richesses minérales. Mais il faut aussi
contrôler les corridors d’évacuation comme la « route transversale » qui
traverse l’Afrique D’est en Ouest, de l’Océan indien au Pacifique et passe… par
la république centrafricaine. Étrangement aucun expert médiatique français
n’aborde ces questions. On se contente seulement d’appuyer la version officielle
d’une urgence humanitaire. Certains allant même jusqu’à dénier toute légitimité
à la moindre réserve ou critique prononcée. Le syndrome rwandais oblige, la
culpabilisation artificielle de la France joue parfaitement son rôle de censure
psychologique et politique.
Toutes ces guerres humanitaires dissimulent en réalité des opérations
néo-coloniales qui n’en portent pas le nom. « L’intervention française sera
rapide, elle n’a pas vocation à durer et je suis sûr de son succès », c’est la
dernière déclaration d’Hollande-le-va-t-en guerre. Souhaitons-le en tout cas.
Car comme personne ne semble se bousculer pour financer cette opération, ni
l’ONU, ni l’Union Européenne, ni les sociétés privées qui pourtant tirent
d’énormes bénéfices de leur situation sur place, il faut souhaiter effectivement
que cette probable victoire tactique, ne se transforme en une défaite
stratégique, faute de financements. À moins que comme, certains le supputent,
Paris ne consente à supporter toute la charge financière.
La Hollandie en est réduite à rendre de martiaux services en échange d’une
partie de sa dette, de son déficit ou de délais supplémentaires à titre de
remerciements dans le cadre des relations économiques et politiques avec
l’Afrique, espérant ainsi redorer l’image ternie de M. Bricolage.Les militaires
français coûtent moins cher que les intérêts de la dette. On comprendrait dès
lors plus aisément le retournement stratégique français général et son
alignement sur des intérêts contraires aux siens. Comme l’écrivait François de
La Rochefoucauld : « Quand on croit servir les autres, on ne fait que se servir
à travers eux ». fin de citation. Tout homme a son prix et il est indéniable en
tout cas, que même en temps de crise financière, l’argent demeurera toujours le
nerf de la guerre.
Source: IRIB
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La république françafricaine , par Odile Tobner | Bouteflika et ses VRP |
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