Jemil Ould Mansour, le président du Rassemblement national pour la réforme et le développement (RNRD, islamiste), plus connu sous le nom de Tawassoul, explique la position de l'opposition mauritanienne à la veille de la présidentielle prévue le 21 juin.
Jemil Ould Mansour : "Il est tout à fait envisageable de
boycotter la présidentielle".
Jemil Ould Mansour, le président de Tawassoul, parti mauritanien "d'obédience
islamiste", sait être là ou on ne l'attend pas. En novembre dernier, il faisait
une nouvelle fois cavalier seul et brisait l'union sacrée au sein de la
Coordination de l'opposition démocratique (COD, opposition dite "radicale") en
se présentant aux élections législatives et municipales. Un scrutin sans
véritable enjeu, mais qui l'a propulsé à la tête de l'opposition. De retour aux
côtés de ses anciens compagnons de la COD, au sein du Forum national pour la
démocratie et l'unité (FNDU), il menace aujourd'hui de boycotter l'élection
présidentielle, dont le premier tour est prévu le 21 juin.
Jeune Afrique : Vous avez défendu votre choix de
participer aux élections législatives et municipales. Or, vous envisagez
aujourd'hui de boycotter le scrutin présidentiel. Pourquoi ?
Jemil Ould Mansour : À l'époque, Tawassoul a rencontré beaucoup de
difficultés. La base de notre parti n'acceptait pas le boycott des élections
locales, dont l'enjeu est directement lié aux populations. Il était difficile
pour une formation qui se dit populaire de ne pas prendre cela en considération.
Sans compter que la Convention pour l'alternance pacifique [CAP, trois partis] a
finalement décidé d'y participer. Nous avons alors fait le choix de l'élection,
tout en précisant bien que nous n'acceptions pas les règles du jeu. Aujourd'hui,
ces contraintes n'existent plus. Il est alors tout à fait envisageable de
boycotter la présidentielle.
Faites-vous toujours partie de la COD ?
Pas pour le moment. Nous avons gelé notre participation, mais rien n'est
définitif.
Quelles sont vos relations avec son président en exercice,
Ahmed Ould Daddah ?
Il est vrai que notre participation aux élections législatives et municipales
n'a pas été bien accueillie au sein de la COD. Afin de régler ce problème, nous
avons rencontré à plusieurs reprises Ahmed Ould Daddah. Le FNDU est le fruit de
ces discussions avec les partis d'opposition.
Justement, à la veille de la présidentielle, le FNDU,
auquel vous avez pris part aux côtés de la COD, a fait un pas en avant en
acceptant de dialoguer avec le pouvoir.
Si ces discussions aboutissent à des garanties sérieuses, telles que la révision
totale des instances de supervision du scrutin, nous estimerons que ces
élections sont consensuelles et toutes les parties y participeront. Seulement,
cela demande du temps. C'est pourquoi le dialogue est actuellement en suspens,
car nous sommes en désaccord avec la majorité sur la date à laquelle il doit se
clore.
Le mot d'ordre quant à la participation ou non du FNDU au
scrutin sera-t-il respecté ?
Oui. Nous participerons ensemble ou nous boycotterons ensemble.
Si vos revendications ne sont pas satisfaites, êtes-vous
prêts à redescendre dans la rue ?
Dans ce cas, nous continuerons notre combat, mais pacifiquement. Notre rôle
n'est pas d'initier des révolutions populaires contre un pouvoir, mais de
sensibiliser les populations pour aboutir à un changement démocratique. La
Mauritanie n'est pas apte pour le Printemps arabe.
Au mois de février, Tawassoul soutenait l'idée d'une
candidature unique pour l'opposition. Est-ce toujours d'actualité ?
Nous continuons de penser qu'une candidature unique de l'opposition pourrait
inverser le rapport de force avec le pouvoir actuel et redonner de l'espoir aux
populations. Mais cela suppose que les partis politiques soient ensuite prêts à
travailler ensemble.
Si on vous le demande, pourriez-vous être ce "candidat du
changement" ?
Si l'opposition réclame que ce candidat soit issu de Tawassoul, nous ne serons
pas contre.
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Propos recueillis par Justine Spiegel
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