Lors du remaniement du 11 avril, Zahabi
Ould Sidi Mohamed, 56 ans, chef de la diplomatie malienne dans le précédent
gouvernement, s'est vu confier le portefeuille ultrasensible de la
Réconciliation. Cet Arabe natif de Tombouctou a participé à la rébellion du
début des années 1990 au sein du Front islamique arabe de l'Azawad et à la
signature des accords de paix de 1992. Entretien.
JEUNE AFRIQUE : En quoi les négociations entre l'État
malien et les groupes rebelles sont-elles différentes de celles menées dans les
années 1990 ?
Zahabi Ould Sidi Mohamed : Il n'y a pas de problème ethnique ou racial au
Mali. Seule la mauvaise gouvernance nous a conduits là où nous sommes. Les
nouvelles autorités ont donc pris des mesures. L'adoption d'une loi contre
l'enrichissement illicite pose un premier jalon en direction de la bonne
gouvernance. La création de la Commission Vérité, Justice et Réconciliation est
un autre geste fort : depuis 1963, les rébellions se sont succédé sans que la
justice reconnaisse les souffrances des populations. Cette fois, les coupables
répondront de leurs actes devant les Maliens.
Des prisonniers sont libérés dans le cadre des "mesures de
confiance" entre l'État et les groupes armés. N'est-ce pas frustrant pour les
victimes ?
Je ne crois pas que ces libérations vont empêcher la justice de
travailler. Quand la Cour pénale internationale (CPI) commencera son travail, et
une fois les accords signés, l'État sera de nouveau présent sur tout le
territoire, c'est ce qui compte. Aujourd'hui, les deux tiers du pays ne sont pas
sous le contrôle de l'État, et nous n'avons pas les moyens d'intervenir. Ce
n'est donc pas une volonté de favoriser l'impunité, mais une mesure tactique.
Comment expliquez-vous l'actuel regain de violence dans le
Nord ?
Il s'agit de règlements de comptes entre groupes de narcotrafiquants.
Sous couvert du combat pour l'Azawad, ces mouvements tentent de prendre le
contrôle de ces trafics, quand d'autres ont des revendications réellement
politiques.
Narcotrafiquants et jihadistes n'ont rien à gagner à un processus DDR
[démobilisation, désarmement, réinsertion] : ils ont besoin de leurs armes et de
leurs véhicules pour faire leur business et préfèrent que le conflit perdure.
Dès qu'il y aura un accord, ils n'auront plus de couverture.
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Propos recueillis à Bamako par Dorothée Thiénot
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