Michel Kafando, le président de la transition au Burkina Faso que les putschistes avaient écarté du pouvoir jeudi dernier, réagit sur RFI au projet d’accord annoncé dimanche soir par les médiateurs ouest-africains. Le texte prévoit de restaurer le président de la transition dans ses fonctions mais aussi d’amnistier les putschistes. Michel Kafando se dit « très réservé » sur cet accord auquel il déclare « ne pas avoir été associé ». Il précise également être « toujours en résidence surveillée ».
RFI : Est-ce que vous êtes d’accord avec le projet de
résolution présenté par la Cédéao ?
Michel Kafando : Avant tout, permettez-moi de remercier et de
féliciter le peuple burkinabè - et notamment les jeunes - pour leur patriotisme
et qui a su dire « non » au coup d’Etat perpétré contre la démocratie et la
liberté au Burkina. Leur détermination fait honneur à tout ce que nous recevons
comme messages, déclarations et comme prises de position. Je peux dire que, en
plus de l’insurrection qui a été un exemple donné au monde, leur détermination
sera aussi un autre exemple pour le monde et pour l’Afrique.
Concernant l’accord, je voudrais tout simplement vous dire que je n’ai pas été
associé aux négociations à l’hôtel Laico. Comprenez bien que je suis toujours en
résidence surveillée et ce n’est d’ailleurs que ce lundi matin que j’ai reçu une
copie de ce projet d’accord proposé par les médiateurs de la Cédéao. Ce que je
voudrais simplement dire c’est que la population et notamment les jeunes se
rassurent, car en ce qui concerne l’avenir de ce pays – notamment après cette
tragédie que nous avons connue – rien ne pourra se faire qui ne prendra en
compte l’intérêt du peuple burkinabè.
Est-ce que vous avez été informé de la nature de l’accord,
dimanche, avant qu’il ne soit présenté par le président sénégalais Macky Sall ?
Cet homme se fait aider par un avocat hors norme
Quand on a un problème juridique, l’aide d’un bon avocat semble être la
solution. Découvrez comment.
Non. Je peux vous dire simplement que, la veille, samedi, j’ai reçu la visite
des deux médiateurs, c’est-à-dire le président Macky Sall et le président Yayi
Boni qui sont venus me rendre visite. Nous en avons profité pour discuter de la
situation. Après leur départ, je n’ai plus été recontacté.
Il est vrai que le bruit a couru et qu’il a été dit que le projet m’a été envoyé
pour que je donne mon avis mais je n’ai jamais reçu un tel projet et je vous
confirme que ce n’est que ce lundi matin seulement que j’ai eu copie de ce
projet d’accord qui a été proposé par la médiation de la Cédéao.
Donc, en clair, vous prenez vos distances avec ce projet
d’accord ?
Je suis, en tout cas, très réservé sur ce projet d’accord parce que tous
les problèmes qui ont été abordés ne peuvent pas trouver une solution, notamment
aux problèmes de fond. Je suis donc réservé sur cet accord. Je tiens à le dire
mais je dis aussi que, dans une situation comme celle que nous vivons, il faut
toujours ouvrir la négociation, c'est-à-dire qu’on ne peut pas rester sur ses
certitudes. Il faut toujours écouter les autres. Est-ce que cela a été fait ? Je
ne le sais pas. Je sais simplement qu’il y a aussi un certain nombre de
personnes de la Société civile qui se sont plaintes de n’avoir pas été
intimement associées aux négociations. Mais nous restons toujours ouverts. S’il
y a toujours à négocier, on négociera mais en ce qui concerne ce projet, moi,
suis très réservé.
Vous êtes très réservé sur ce que vous appelez le problème
de fond, c’est-à-dire la participation des candidats pro-Compaoré à la prochaine
élection présidentielle ?
Sur l’ensemble, il n’ya pas seulement que cela. Il y a beaucoup de
problèmes de fond qui sont posés et qui ont été posés là par, justement,
l’irruption de ce coup d’Etat. Il n’y a pas seulement l’inclusion, il y a aussi
d’autres problèmes.
Quel est le problème de fond qui, à votre avis, est le
plus important à régler ?
Nous aurons l’occasion d’y revenir. Il est trop tôt pour le faire. Je
vous promets que nous aurons l’occasion d’y revenir.
Qu’est-ce que vous attendez du sommet extraordinaire de la
Cédéao, mardi, au Nigeria ?
Je ne sais pas. Moi-même, je n’ai pas été convié à ce sommet. J’attends
donc qu’on me dise ce qui va se faire Le sommet, comme c’est un sommet de chefs
d’Etat, à ma connaissance il y a des propositions qui ont été faites. Maintenant
pour le reste, je suis comme tout le monde. J’attends de savoir ce qui va être
décidé.
Donc, vous n’êtes pas très optimiste sur les chances de
succès de ce sommet, en votre absence ?
Je ne peux pas le présager, mais je dis que ce sera quand même difficile.
Vu ce qui est proposé, ce sera certainement difficile.
Vu notamment ce point, peut-être, sur la participation des
candidats pro-Compaoré, voulez-vous dire ?
Ce n’est pas seulement cela. Il y a beaucoup de points qui sont là ; qui
vont poser problème mais, je vous le dis, on ne peut pas en parler maintenant.
Si vous le permettez, nous y reviendrons plus tard.
Vous dites que vous êtes toujours assigné à résidence.
Pouvez-vous nous donner quelques précisions ? Où est-ce que vous êtes, à l’heure
qu’il est?
Je suis dans ma résidence, celle que j’occupais avant le putsch mais je
suis quand même gardé par la sécurité présidentielle. Je suis là ; je reçois ;
je ne sors pas. En résidence surveillée, vous ne pouvez pratiquement pas
franchir le pas de la cour ; vous ne pouvez pas sortir comme vous voulez. En
tout cas, je suis bien traité ; je n’ai pas de problèmes.
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